par Francesco Guarascio
BRUXELLES (Reuters) - Les mesures de confinement en vigueur pour freiner la pandémie de nouveau coronavirus ont eu pour effet de mettre fin prématurément à l'épidémie de grippe saisonnière en Europe, ce qui pourrait pénaliser le développement du vaccin pour l'hiver prochain, mettent en garde des spécialistes.
La grippe, qui sévit généralement dans l'hémisphère nord d'octobre à la mi-mai, a pratiquement disparu en Europe depuis le mois dernier. Elle a causé durant l'hiver 2017-2018 la mort de 152.000 personnes en Europe, soit bien plus que le COVID-19 dont le bilan est à ce stade proche de 100.000 décès sur le continent.
"La saison de la grippe s'est achevée plus tôt qu'à l'accoutumée cette année et cela est probablement dû aux mesures prises contre le SARS-CoV-2, comme la distanciation sociale et le port du masque", a déclaré à Reuters Holger Rabenau, virologue à l'Hôpital universitaire de Francfort, utilisant l'appellation scientifique de ce nouveau coronavirus.
Avec un échantillon plus réduit du nombre de cas, moins de données disponibles et le retard pris dans leur traitement en raison de l'accent mis sur la crise sanitaire en cours liée au coronavirus, le développement du vaccin contre la grippe pour la prochaine saison pourrait en pâtir.
Selon Pasi Penttinen, expert en grippe du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC), les laboratoires ne disposent pas d'un tableau complet de la circulation du virus de la grippe sur la dernière partie de la saison.
"Cela pourrait être un problème", a-t-il déclaré, notant par exemple que des informations réduites sur d'éventuelles mutations du virus peuvent déboucher sur un vaccin moins efficace.
Les données sur les décès liés à la grippe ne sont pas encore disponibles, mais les premières estimations indiquent une mortalité beaucoup plus faible cette année.
Selon des données provenant de 11 pays européen, seulement 4.000 patients souffrant de la grippe ont été admis en soins intensifs cette année, soit moitié moins qu'au cours de la même période lors des deux saisons précédentes.
D'après une étude publiée ce mois-ci par des experts de l'Université de Tokyo et du Centre japonais de lutte contre les maladies, l'épidémie de grippe cette saison a également été plus faible au Japon, sans doute en raison des mesures de confinement.
Les experts estiment aussi que les cas déclarés de grippe pourraient avoir été sous-estimés car ils ne prennent pas en compte les personnes présentant des symptômes légers qui ont choisi de rester chez eux, les hôpitaux étant déjà submergés de malades du COVID-19.
(Version française Claude Chendjou, édité par Jean-Michel Bélot)