Le président russe Vladimir Poutine et le chef du gouvernement italien Enrico Letta devraient lancer mardi un fonds d'investissement commun doté d'un milliard d'euros, lors d'un sommet bilatéral à Trieste, la ville d'Italie la plus tournée vers l'Est de l'Europe.
A Moscou, on souligne que le nouveau fonds d'investissement, financé par le Fonds souverain russe et la Caisse italienne des dépôts, "stimulera des investissements communs" aux deux pays. Ses premiers versements, centrés sur des secteurs comme la logistique, l'ingénierie, l'industrie automobile, l'agriculture et l'aérospatiale, devraient intervenir l'année prochaine.
En tout, "une vingtaine d'accords commerciaux seront signés dans trois secteurs majeurs: les finances, l'énergie et l'industrie", selon des sources gouvernementales italiennes.
Parmi les dossiers chauds abordés par l'Italie, qui lorgne sur l'argent russe pour l'aider à sortir de la récession dans laquelle elle est plongée depuis deux ans, figurera notamment Alitalia, à la recherche d'un partenaire étranger pour l'aider à faire face à un plan de restructuration.
Selon les sources italiennes, M. Letta pourrait sonder M. Poutine sur une possible entrée de capitaux russes dans la compagnie aérienne en difficulté.
Il sera également question du géant italien de la sidérurgie, Ilva, propriété de la famille Riva. Depuis plusieurs mois, la justice italienne a dans le collimateur cette entreprise en raison d'un vaste scandale écologique mettant en cause l'une de ses usines à Tarante (sud). Ilva est l'un des plus gros employeurs de la région.
La rencontre bilatérale, qui a débuté avec près de deux heures de retard vers 12h30 GMT, sera suivie d'une conférence de presse. Elle intervient au second jour de la visite de Vladimir Poutine en Italie.
Lundi, le chef d'Etat russe avait été reçu en audience par le pape François au Vatican, avant de dîner avec son vieil ami et ancien chef du gouvernement italien, Silvio Berlusconi.
Moscou a qualifié de "foutaises" mercredi des rumeurs prêtant l'intention à M. Poutine d'octroyer un passeport russe au Cavaliere pour échapper à ses ennuis judiciaires en Italie. Un vote est prévu mercredi au Sénat qui privera M. Berlusconi de son fauteuil et de son immunité parlementaire, en application d'une loi après sa condamnation à un an de prison pour fraude fiscale.
Par ailleurs, une manifestation contre les lois homophobes en vigueur en Russie doit avoir lieu à Trieste dans la journée.
Lundi soir, à Rome, une cinquantaine de personnes en majorité des femmes, rassemblées devant l'hôtel de M. Poutine, avaient crié "en Russie vas-y toi", à l'adresse du président russe et en soutien aux Pussy Riot, le groupe punk russe dont deux des membres ont été emprisonnées.
Selon la presse italienne, les discussions entre les deux hommes devraient également tourner autour de la situation énergétique de l'Italie, qui aurait besoin de voir ses prix du gaz, de pétrole et d'électricité à l'importation baisser si elle veut espérer sortir de la crise.
Ainsi, Il Sole 24 Ore explique que Saipem, la filiale d'ingénierie et d'exploration du géant italien Eni (pétrole et gaz), se verrait proposer de participer au projet de gazoduc entre la Russie et la Turquie via la Mer noire. Le patron d'ENI, Paolo Scaroni, a indiqué qu'il rencontrerait "probablement" M. Poutine à Trieste.
Un autre accord, le premier de ce genre pour un pays de l'Union européenne, permettra aux entreprises italiennes de bénéficier de frais de douanes à tarifs préférentiels, selon Il Sole.
Un site de e-commerce sera également lancé afin de favoriser la vente de produits italiens en Russie. Par ailleurs, Fincantieri (chantiers navals) devrait signer un contrat afin de construire des plateformes pétrolières off-shore.
Le conflit en Syrie sera également abordé par MM. Letta et Poutine, au lendemain de l'annonce de la tenue d'une conférence de paix le 22 janvier à Genève, a précisé un responsable du Kremlin.
Enfin, les deux chefs d'Etat devraient entériner l'installation d'un site annexe du célèbre musée de l'Hermitage de Saint-Pétersbourg à Venise, sur la place Saint-Marc.