Sauver leur emploi en fabriquant des crèmes glacées de qualité : un an après avoir repris leur usine, les salariés de "la Fabrique du Sud" à Carcassonne savourent leur succès, que saluera mardi François Hollande lors d'une visite.
"La Belle Aude, une glace aussi bonne que notre histoire est belle", peut-on lire à l'entrée de la société coopérative et participative (scop), créée il y a un an sur les cendres du fabricant de crème glacées Pilpa.
Une initiative sociale et solidaire dont le succès sera salué mardi par le président François Hollande qui s'adressera à cette occasion aux élus de l'Aude.
Le groupe Pilpa, racheté fin 2011 par le géant britannique de la glace R&R Ice Cream, emploie 124 salariés à Carcassonne lorsque sa fermeture est décidée peu de temps après.
19 de ses anciens salariés décident alors d'unir leur force pour fabriquer des glaces artisanales, élaborées "avec des produits locaux de qualité", tout "en respectant les règles de l'économie sociale et solidaire", se souvient Christophe Barbier, aujourd'hui président du conseil d'administration de la scop.
Les glaces "La Belle Aude" sont nées.
"La scop? C'est que du bonheur !", s'exclame Stéphane, ancien chef de ligne de production chez Pilpa. "J'ai décidé de me lancer dans l'aventure et j'ai suivi une formation pour apprendre à fabriquer des glaces", ajoute fièrement le créateur des délicieuses recettes qui font le succès de la marque.
Car, un an seulement après leur arrivée dans les bacs des grandes surfaces de l'Aude, les glaces "La Belle Aude" ont séduit les consommateurs. La scop a enregistré un chiffre d'affaires de 750.000 euros en 2014, dépassant les estimations les plus optimistes.
"On s'est battus pour sauver nos emplois et on a prouvé que cette entreprise solidaire était rentable", se réjouit M. Barbier.
"Nous voulons doubler notre chiffre d'affaires l'année prochaine, puis atteindre 2,2 millions d'euros en 2016, ce qui nous permettra de dégager des bénéfices", précise-t-il, en rappelant toutefois que les comptes sont à l'équilibre dès cette année.
- Un salarié = une voix -
Mais "la Fabrique du Sud" est avant tout une aventure humaine. "C'est notre entreprise à tous, toute l'équipe a contribué au succès de nos produits", indique M. Barbier.
"La règle chez nous c'est un salarié = une voix", ajoute-t-il. Les 19 employés de la scop détiennent des parts sociales de l'entreprise et tous ont le même pouvoir de décision.
L'équipe a réussi, grâce au soutien de l'agglomération de Carcassonne, à conserver les anciens bâtiments de Pilpa, en périphérie de la préfecture de l'Aude. Dans un immense hangar, six personnes sont à pied d’œuvre autour du fraiseur, sorte de cuve métallique chargée de transformer le mélange en crème glacée.
"L'ambiance est top", se réjouit Yannick en remplissant des pots de 500 ml d'une onctueuse glace au chocolat."On est 19 patrons, ça change tout", explique-t-il.
Un avis partagé par l'ensemble des salariés sociétaires. Tous mettent en avant l'amélioration de leurs conditions de travail et apprécient particulièrement d’être consultés lors des prises de décisions importantes.
Mais cela a un prix et les salariés ont dû consentir des baisses de salaire significatives. "J'ai perdu environ 300 euros par mois", reconnaît Stéphane. "Mais j'ai un boulot qui me plaît", s'empresse-t-il d'ajouter.
Les salariés de la scop ont également décidé de limiter l'amplitude des salaires, qui varient de 1.250 euros à 1.900 euros par mois, car "il n'y a pas de sous-métier", insiste M. Barbier, en dégustant une glace rhum-raisin, un des trois nouveaux parfums lancés cette année.