par Katharina Bart
ZURICH (Reuters) - Interpol a placé mercredi deux anciens dirigeants de la Fédération internationale de football (Fifa) sur sa liste rouge à la demande des autorités américaines qui poursuivent leur enquête sur des faits de corruption impliquant des responsables de la plus haute instance mondiale du football.
L'annonce d'Interpol est survenue au lendemain de la démission surprise du président de la Fifa, Sepp Blatter, peu de temps avant la publication d'informations rapportant que le président démissionnaire était visé par une enquête aux Etats-Unis.
Selon une source proche de la Fifa, c'est sur les conseils de son entourage que Sepp Blatter a décidé d'annoncer son départ, ce qu'il excluait jusqu'alors.
Ses adversaires soulignaient de leur côté que la situation du Suisse devenait intenable à mesure que s'étendaient les enquêtes ouvertes contre ses proches, que les partenaires commerciaux de la Fifa exprimaient leur mécontentement et que l'Union des fédérations européennes de football (UEFA) accentuait sa pression.
C'est dans ce contexte de tensions qu'Interpol a placé mercredi sur sa liste rouge Jack Warner, ancien président de la Concacaf, l'instance supérieure du football sur le continent américain, et Nicolas Leoz, ancien dirigeant de la fédération sud-américaine de football.
Quatre autres personnes, Alejandro Burzaco, Hugo Jinkis, Mariano Jinkis et Jose Margulies, qui évoluent dans le monde du football ou des médias, ont été placées sur cette liste, ce qui ne signifie pas qu'elles sont visées par un mandat d'arrêt.
CORRUPTION
La Fifa continue de démentir l'implication de son secrétaire général, le Français Jérôme Valcke, ou de tout autre membre de son actuelle direction dans un transfert de 10 millions de dollars au coeur d'un scandale de corruption sur lequel enquête la justice américaine.
Selon une source proche du dossier, Jérôme Valcke, bras droit de Sepp Blatter, aurait supervisé le versement de cette somme en 2008 à Jack Warner, vice-président de la Fifa à l'époque, avec l'assentiment de la fédération sud-africaine de football.
L'enquête cherche à déterminer si ces 10 millions de dollars ont été versés à Jack Warner après l'attribution du mondial 2010 à l'Afrique du Sud, ce que le ministre sud-africain des Sports, Fikile Mbalula, a une nouvelle fois nié mercredi, assurant que l'Afrique du Sud n'a acheté aucune voix pour obtenir l'organisation de la Coupe du monde.
Les autorités américaines ont annoncé la semaine dernière enquêter sur des faits de corruption remontant aux 24 dernières années tandis que leurs homologues suisses s'intéressent à l'attribution des coupes du monde 2018 à la Russie et 2022 au Qatar.
La Russie a fait part de sa surprise après l'annonce de la démission de Sepp Blatter mais son départ ne perturbe pas les préparatifs en vue de la Coupe du monde 2018, a dit le Kremlin.
En Europe, d'où partaient certaines des plus virulentes attaques contre Sepp Blatter, beaucoup de responsables ont salué l'annonce de son départ tout en insistant sur la nécessité d'une réforme en profondeur de la Fifa.
Le chef de file du football néo-zélandais, Andy Martin, a souligné que l'heure était venue pour la Fifa de redorer un blason terni.
PLATINI FAVORI ?
En Asie, où Sepp Blatter comptait beaucoup de soutiens, la confédération asiatique de football a dit qu'elle allait réfléchir en interne aux meilleures solutions possibles, tant pour la Fifa que pour le football mondial.
Greg Dyke, président de la fédération anglaise de football, a estimé que l'annonce du départ de Sepp Blatter ouvrait la voie à un réexamen de l'attribution au Qatar de la Coupe du monde 2022.
Une telle hypothèse est vivement combattue à Doha où le cheikh Hamad ben Khalifa Al Thani, président de l'Association du football qatari, a annoncé que le Qatar ne renoncerait pas à organiser le Mondial 2022.
"Nous exhortons M. Dyke à laisser le processus juridique suivre son cours et à se concentrer sur sa promesse de livrer une équipe anglaise capable de gagner la Coupe du monde au Qatar en 2022", a-t-il dit.
Si le départ formel de Sepp Blatter ne devrait pas intervenir avant décembre, sa succession commence à s'organiser. Bien qu'il n'ait pas annoncé sa candidature, le nom du président de l'UEFA, Michel Platini, revient régulièrement.
A l'unisson, les responsables français du football ont réaffirmé mercredi leur souhait de voir l'ancien meneur de jeu de la Juventus Turin devenir président de la Fifa.
Le prince jordanien Ali Ben al Hussein, battu vendredi par Sepp Blatter, a déclaré à la chaîne de télévision Channel 4 qu'il "souhaitait aider", sans pour autant annoncer de candidature formelle.
Parmi les autres candidats potentiels, figurent Chung Mong-joon, un homme d'affaires sud-coréen, Domenico Scala, président indépendant du comité d'audit et de conformité de la Fifa, Jérôme Champagne, un ancien diplomate français et éphémère candidat à la présidence de la Fifa, ou encore Wolfgang Niersbach, un ancien journaliste sportif allemand élu cette année au comité exécutif de la Fifa.
(Nicolas Delame pour le service français)