(Reuters) - Le fabricant américain de semi-conducteurs Broadcom (NASDAQ:AVGO) a présenté lundi une offre de rachat non sollicitée à son compatriote Qualcomm (NASDAQ:QCOM), à 130 milliards de dollars (112 milliards d'euros) dette incluse, ce qui en ferait la plus grosse acquisition jamais effectuée dans le secteur technologique.
Hors dette, le montant de l'opération s'élèverait à 103 milliards de dollars.
Qualcomm a dit qu'il étudierait cette proposition.
Le groupe devrait la décliner, la jugeant trop faible, a déclaré à Reuters une source proche du dossier, soulignant aussi un risque de refus de la part des autorités de la concurrence.
Un tel mariage associerait deux des principaux fabricants de puces pour smartphones et constituerait un défi pour Intel (NASDAQ:INTC), le numéro un mondial du secteur, qui s'efforce de se diversifier dans la téléphonie mobile à partir de son coeur de métier dans les ordinateurs.
Broadcom propose 70 dollars par titre, payables en actions et en numéraire, soit une prime de 27,6% sur le cours de clôture de Qualcomm jeudi, veille de la diffusion dans la presse des premières informations sur cette possible offensive.
Les actionnaires de Qualcomm recevront 60 dollars en numéraire et 10 dollars par action Broadcom. Dette incluse, l'opération s'élève à 130 milliards de dollars.
Daniel Ives, analyste chez GBH Insight, estime que les investisseurs espéraient entre 75 et 80 dollars par action.
"Désormais, il s'agit d'un jeu de poker très risqué pour les deux groupes", juge-t-il.
Le titre Qualcomm, qui dépassait les 80 dollars en 2014 prenait 0,94% à 62,39 dollars à la Bourse de New York vers 17h40GMT, tandis que Broadcom lâchait 0,24% à 272,98 dollars à ce stade, après avoir touché un record de 281,80 dollars.
SOUS L'OEIL DES RÉGULATEURS
Un éventuel rapprochement des deux groupes ferait l'objet d'un examen minutieux de la part des autorités de la concurrence, en Chine, un marché crucial pour eux.
Pékin devrait se livrer à une étude particulièrement attentive après le refus de Washington d'autoriser des accords avec les fabricants de puces chinois sur le marché américain.
Broadcom pourrait scinder QTL, la branche de Qualcomm spécialisée dans les licences, afin d'obtenir le feu vert des régulateurs et financer l'accord, avance Romit Shah, analyste chez Nomura Instinet.
Au 30 juillet, Broadcom disposait d'une trésorerie de 5,25 milliards de dollars, et celle de Qualcomm s'élevait à 35,03 milliards de dollars au 24 septembre.
"Nous pensons que la vente de QTL à un fonds d'investissement ou à un groupe télécoms pourrait rapporter 25 milliards de dollars", indique Romit Shah.
Broadcom a ajouté que BofA Merrill Lynch, Citi, Deutsche Bank (DE:DBKGn), JP Morgan et Morgan pourraient aménager le financement de la dette.
QUALCOMM VULNÉRABLE
Broadcom avait approché Qualcomm l'année dernière pour discuter d'un éventuel rapprochement, mais ne l'avait plus contacté avant l'annonce de ce lundi, selon des sources.
Le litige de propriété intellectuelle avec Apple (NASDAQ:AAPL), qui a pesé sur ses comptes au troisième trimestre, a rendu Qualcomm plus vulnérable à un rachat. Certains doutent également de sa capacité à financer le rachat pour 38 milliards de dollars de NXP Semiconductors, spécialiste des puces pour voitures.
Sa structure de gouvernance ajoute à cette fragilité.
Son conseil d'administration, soit dix membres, devra être renouvelé dans sa totalité d'ici le printemps et Broadcom pourrait profiter de la date limite fixée en décembre pour déposer sa propre liste susceptible de favoriser par la suite les négociations.
(Supantha Mukherjee à Bangalore; Bertrand Boucey et Catherine Mallebay-Vacqueur pour le service français, édité par Juliette Rouillon et Marc Angrand)