par Julien Ponthus et Emmanuel Jarry
PARIS (Reuters) - France et Allemagne, une nouvelle fois condamnées à s'entendre pour éviter une sortie de la Grèce de la zone euro, ont affiché lundi soir à Paris une position commune en attendant des propositions du Premier ministre grec, Alexis Tsipras.
François Hollande et Angela Merkel sont convenus de respecter le résultat du référendum grec de dimanche contre un plan "argent contre réformes" proposé par les créanciers internationaux d'Athènes.
Mais ils ont placé la balle dans le camp de la Grèce à la veille d'un sommet de la dernière chance de la zone euro.
"La porte est ouverte aux discussions et il revient maintenant au gouvernement d'Alexis Tsipras de faire des propositions sérieuses, crédibles, pour que (sa) volonté de rester dans la zone euro puisse se traduire", a dit le président français après un entretien avec la chancelière.
Celle-ci a confirmé qu'une reprise des négociations avec la Grèce était possible en fonction des propositions grecques.
L'un et l'autre ont souligné le caractère urgent de la situation, alors que la Grèce est censée rembourser le 20 juillet 3,5 milliards d'euros à la Banque centrale européenne.
Ils ont aussi mis l'accent sur la nécessité d'un équilibre entre solidarité et responsabilité -- "Nous avons déjà fait preuve de beaucoup de solidarité", a dit Angela Merkel.
Sa déclaration a été saluée par une source diplomatique française comme le signe d'une "convergence" des démarches de Paris et Berlin et qu'une solution était possible.
Dirigeants politiques européens et analystes partagent l'opinion selon laquelle l'issue de la crise dépend dans une large mesure de ce que fera Alexis Tsipras de sa "victoire" de dimanche.
EXASPÉRATION
Mais "la France et l'Allemagne (...) sont les deux premiers copropriétaires de l'euro et il est vital qu'elles continuent à parler d'une seule voix", déclarait lundi matin à Reuters l'ex-commissaire européen Michel Barnier.
La crise grecque a une nouvelle fois mis l'accent sur les différences de culture et de vision des deux pays.
Les Allemands, ministre des Finances Wolfgang Schäuble en tête, privilégient une vision économique et financière pouvant éventuellement s'accommoder d'une sortie de la Grèce de l'euro, quand les Français prennent en compte la dimension géopolitique d'une crise aux conséquences imprévisibles.
"Si le chaos s'installe dans ce pays, cela aura des conséquences pour la Grèce mais aussi pour les Balkans et pour l'ensemble de l'Union européenne", souligne le directeur de l'Institut Jacques Delors, Yves Bertoncini.
Les premières réactions au vote grec ont encore montré combien ce dossier est perçu différemment à Paris et Berlin.
Le "non" grec est vu avec une certaine sympathie en France, notamment dans l'aile gauche du Parti socialiste, chez les écologistes et aux deux extrêmes de l'échiquier politique.
Ce qui n'exclut pas l'exaspération d'une grande partie de l'opinion fatiguée de financer la Grèce à perte, ce qui la rapproche de l'opinion allemande et de la majeure partie des pays de l'Union européenne, plus pauvres compris.
La chancelière allemande s'efforce de jouer un rôle de modératrice auprès des "faucons" de son gouvernement et des milieux patronaux excédés par le gouvernement grec.
"Je ne pense pas que les Allemands seront totalement fermés à toute idée de restructuration de la dette" grecque, l'un des points durs des négociations avec Athènes, a dit à Reuters la députée socialiste Elisabeth Guigou. "Ce qui sera très difficile à obtenir de leur part, c'est un troisième plan d'aide."
(Edité par Yves Clarisse)