par Simon Carraud et Elizabeth Pineau
PARIS (Reuters) - Le parquet de Nanterre est sur le point d’ouvrir une information judiciaire visant Carlos Ghosn, mis en cause notamment pour un dîner organisé au château de Versailles en 2016 pour sa femme.
Ce développement devrait intervenir dans les semaines à venir, une fois que les procès-verbaux rédigés jusqu’à présent par les enquêteurs auront été examinés de près, a-t-on déclaré jeudi au parquet.
Cela signifie que les investigations seront menées non plus par le parquet, comme c'était le cas depuis l'ouverture de l'enquête préliminaire, mais par un ou des juges d'instruction.
L'ancien patron de Renault-Nissan est soupçonné d'avoir en connaissance de cause utilisé les ressources du groupe automobile à des fins privées.
Interrogé par Reuters, l'un de ses avocats, Jean-Yves Le Borgne, a déclaré que "jamais M. Ghosn n'a demandé la gratuité de la mise à disposition des salles, et encore moins le fait que cela soit imputé à Renault (PA:RENA)".
"Je pense qu'il y a eu un malentendu, un qui pro quo, entre ceux qui pour le compte de M. Ghosn ont organisé cette soirée et les interlocuteurs du château de Versailles", a-t-il ajouté, assurant que son client avait proposé de rembourser les 50.000 euros de frais d'organisation.
Carlos Ghosn se trouve au Liban, le pays de son enfance où il s'est installé fin décembre après avoir fui le Japon où il devait être jugé pour des malversations financières qu'il conteste à la tête de Nissan (T:7201).
"UN ÉVÉNEMENT INSTITUTIONNEL", POUR LE CHÂTEAU DE VERSAILLES
"Carlos Ghosn est prêt à répondre à la justice française. S'agissant de sa venue en France, les choses sont compliquées", a poursuivi Jean-Yves Le Borgne, évoquant l'interdiction de quitter le Liban imposé par la justice libanaise et le mandat d'arrêt diffusé par Interpol à la demande du Japon.
L'ancien patron de Renault et Nissan possède les nationalités française, libanaise et brésilienne mais ne dispose plus de ses passeports depuis son départ du Japon, où il affirme avoir été victime d'un complot en raison de ses projets pour l'alliance automobile franco-japonaise.
La fête en question à Versailles a eu lieu le 8 octobre 2016. Carlos Ghosn a déclaré qu'elle était organisée pour les 50 ans de sa femme Carole.
L'ancien patron, qui dément toute malversation, a affirmé que cette fête n'avait jamais été présentée comme un événement institutionnel. Il a dit avoir pensé que les lieux lui avaient été gracieusement prêté à titre personnel par le château de Versailles.
Il a dit avoir été surpris d'apprendre par la suite que l'événement avait coûté 50.000 euros et que ce montant avait été déduit des prestations offertes par le château au constructeur automobile en échange de son mécénat.
"La soirée du 8 octobre 2016, il était évident pour nous que c’était institutionnel", a cependant déclaré jeudi une porte-parole du château de Versailles. "Le donneur d’ordre était la société Renault Nissan."
L'établissement a des documents prouvant ses dires qu’il "tient à la disposition de la justice", a-t-elle ajouté, en refusant de les communiquer à Reuters.
Renault n'a pas répondu dans l'immédiat à une demande de commentaire.
(avec Gwénaëlle Barzic, Sarah White et Gilles Guillaume, édité par Bertrand Boucey)