par Mimosa Spencer
PARIS (Reuters) - Kering (EPA:PRTP) a dit mardi anticiper une baisse "significative" de son résultat opérationnel courant au premier semestre, plombé par les difficultés persistantes de sa marque phare Gucci, dont les ventes ont chuté au premier trimestre.
"Compte tenu de la dégradation des tendances de chiffre d’affaires, le groupe anticipe désormais un recul de son résultat opérationnel courant du premier semestre 2024 de l’ordre de 40% à 45% par rapport au premier semestre 2023", a dit le groupe de luxe dirigé par François-Henri Pinault.
Kering a enregistré une baisse de 10% de son chiffre d'affaires en données comparables pour les trois premiers mois de l'année, à 4,504 milliards d'euros, par rapport au premier trimestre 2023.
Les ventes de Gucci ont diminué de 18%, à 2,079 milliards d'euros, après une baisse de 4% au trimestre précédent.
Ces chiffres correspondent à l'ordre de grandeur dévoilé aux marchés le 19 mars dernier par le groupe : Kering avait dit s'attendre à un repli d'environ 20% des ventes de Gucci sur la période en raison de la faible demande en Asie. Il avait aussi prévu un recul de ses ventes totales d'environ 10%.
Les analystes tablaient depuis sur une baisse des ventes en données comparables de 9% et de 14% pour Gucci, selon un consensus Visible Alpha cité par UBS.
Cette performance, bien loin derrière la croissance organique de 3% affichée par le concurrent LVMH (EPA:LVMH) au premier trimestre, illustre les difficultés rencontrées par Kering qui cherche à relancer la dynamique de Gucci tout en faisant face à des difficultés sur des marchés clés, en particulier la Chine où la reprise attendue après la levée des restrictions sanitaires liées au Covid s'est heurtée à la crise immobilière.
"Il n'est pas surprenant que des marques en transition puissent connaître de plus grandes difficultés dans un environnement où la demande ralentit, alors que les consommateurs concentrent leurs dépenses sur les marques incontournables. L'ampleur de la baisse des bénéfices surprend néanmoins à la baisse", jugent les analystes de Bernstein.
LE MARCHÉ CHINOIS "ASSEZ POLARISÉ"
"Le marché en ce moment en Chine est assez polarisé entre une appétence des clients pour le très haut de gamme ou pour des produits plus abordables", a estimé la directrice financière de Kering, Armelle Poulou, lors d'une conférence téléphonique avec des journalistes.
"Gucci en ce moment est plus positionné au milieu donc ne bénéficie pas de cette polarisation. (...) C'est la situation aujourd’hui, elle peut changer vite", a-t-elle ajouté.
La marque souffre aussi du fait que les consommateurs chinois attendent de voir les nouvelles collections arriver en magasin, a encore noté Armelle Poulou.
Gucci, qui représente près de la moitié des ventes du groupe et les deux tiers de son résultat d'exploitation, fait l'objet d'une refonte sous la direction créative de Sabato de Sarno, dont les premières créations sont apparues en boutique à la mi-février, et cherche à regagner le terrain perdu ces dernières années face à des rivaux tels que Louis Vuitton et Dior, propriétés de LVMH.
"La performance de Kering s'est fortement détériorée au premier trimestre. Alors que nous prévoyions un début d'année difficile, les conditions de marché, notamment en Chine, et le repositionnement stratégique de certaines de nos Maisons, à commencer par Gucci, ont accentué la pression sur notre chiffre d'affaires", a commenté François-Henri Pinault dans le communiqué du groupe.
"Compte tenu de ce recul et de notre détermination à continuer d’investir sélectivement dans la désirabilité et l’exclusivité de nos marques sur le long terme, nous anticipons une baisse significative du résultat opérationnel courant au premier semestre. Nous travaillons sans relâche pour surmonter les défis actuels et recréer les conditions nécessaires à une croissance durable à long terme", a-t-il ajouté.
Parmi les autres marques de Kering, Yves Saint Laurent a vu ses ventes baisser de 6% en données comparables, au premier trimestre, à 740 millions d'euros, et Bottega Veneta a augmenté ses ventes de 2%, toujours en comparable, à 388 millions.
En Bourse, l'action Kering a perdu 18% depuis l'avertissement sur résultats du 19 mars, tandis que LVMH et Hermès (EPA:HRMS) ont cédé respectivement 7,5% et 2,8%.
(Rédigé par Blandine Hénault et Jean-Stéphane Brosse, édité par)