PARIS (Reuters) - La contestation contre le projet gouvernemental de réforme des retraites se poursuivait jeudi en France, alors que l'examen du texte continuait d'avancer au Sénat après le vote de l'article prévoyant le report de l'âge légal de départ à la retraite de 62 ans à 64 ans - une mesure-phare qui cristallise les critiques.
Deux jours après une forte mobilisation nationale lors d'une sixième journée de manifestations et de grèves à l'appel de l'intersyndicale, les transports restaient perturbés et les expéditions des raffineries interrompues. De nouveaux rassemblements ont eu lieu dans la journée, à l'appel notamment des syndicats lycéens et étudiants.
A la SNCF et à la RATP, touchées par un mouvement de grève reconductible, le trafic était toujours réduit malgré une légère amélioration. Un TGV Inoui et un Ouigo sur trois circulaient tandis que sur certaines lignes de métro à Paris, seul un train sur trois était programmé.
Pour vendredi, la SNCF prévoit un TGV ou Ouigo sur deux en moyenne, tandis que la RATP a fait savoir que le trafic serait "en nette amélioration", avec des perturbations essentiellement sur le RER B et quelques lignes de métro.
Dans les aéroports, le trafic était aussi encore limité, la Direction générale de l'aviation civile (DGAC) ayant exigé des compagnies aériennes qu'elles renoncent à 20% à 30% de leurs vols jeudi et vendredi.
La DGAC a aussi demandé de réduire de 20% le programme de vols ce week-end dans certains aéroports, notamment à Orly.
De son côté, TotalEnergies a fait savoir que les expéditions de ses raffineries en France restaient interrompues. Le mouvement de grève dans le secteur ne semblait toutefois pas avoir pour l'heure un impact important sur les approvisionnements des stations-service, selon l'Union française des industries pétrolières (Ufip).
La production d'électricité en France était également toujours affectée en raison d'une grève reconductible des agents d'EDF (EPA:EDF). Par ailleurs, les ordures s'accumulaient sur les trottoirs dans certains quartiers de Paris en raison d'un arrêt de travail des éboueurs de la capitale.
OPÉRATIONS "COUP DE POING"
Plusieurs opérations "coup de poing" ont parallèlement été organisées jeudi pour protester contre le projet de réforme des retraites.
A Marseille, le trafic ferroviaire a été interrompu plusieurs heures à la gare Saint-Charles en raison de la présence de manifestants sur les voies.
A Saint-Denis, la CGT a dit avoir coupé l'électricité au Stade de France et au chantier du futur village olympique des Jeux de 2024. Contacté par Reuters, Enedis a toutefois démenti une coupure de courant au Stade de France, indiquant que le poste source envahi par les protestataires concernait le chantier olympique ainsi que des clients de la commune de Saint-Denis.
En parallèle à ce durcissement du mouvement de contestation, l'examen du projet de loi se poursuivait au Sénat, après l'adoption dans la nuit de mercredi à jeudi de l'article 7 par 201 voix pour et 115 contre.
Cet article, qui comprend la mesure-phare très décriée du report à 64 ans de l'âge légal de départ à la retraite, n'avait pas pu être examiné à l'Assemblée nationale en raison de débats houleux et des très nombreux amendements déposés par l'opposition.
Le Sénat a jusqu'à dimanche pour examiner et voter le projet de réforme - qui comprend au total 20 articles - du gouvernement, lequel espère parvenir à un consensus avec la droite, majoritaire à la chambre haute du Parlement.
Le vote du Sénat sur l'article 7 du texte "ne change rien dans la détermination et la mobilisation", a prévenu jeudi sur France 2 le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez.
L'intersyndicale a appelé à une septième journée de contestation samedi, tandis qu'une nouvelle journée de mobilisation nationale est prévue mercredi 15 mars - la date à laquelle la commission mixte paritaire entre députés et sénateurs devrait se réunir sur la réforme.
L'intersyndicale a demandé mardi à être reçue en urgence par Emmanuel Macron, lequel n'a pas donné suite. Dans une lettre envoyée au chef de l'Etat, elle estime que "cette absence de réponse constitue un grave problème démocratique" et "conduit immanquablement à une situation qui pourrait devenir explosive".
(Rédigé par Kate Entringer, Camille Raynaud et Blandine Hénault, édité par Jean-Stéphane Brosse et Jean Terzian)