PARIS (Reuters) - François Hollande a prôné lundi l'apaisement social en France, estimant que la crise d'Air France ne reflète pas l'état du pays, et défendu les syndicats réformistes face aux attaques de Nicolas Sarkozy et à la colère de la CGT.
Saluant la "responsabilité" des partenaires sociaux qui ont trouvé un accord vendredi sur les retraites complémentaires, le président français les a invités à parvenir à un compromis sur le futur compte personnel d'activité.
En permettant d'additionner les droits acquis dans les comptes personnels de formation, les comptes pénibilité et les comptes épargne-temps, voire d'autres droits sociaux, le compte personnel d'activité, qui suivra chaque personne tout au long de sa carrière professionnelle, doit apporter plus de sécurité aux Français en renforçant notamment leur accès à la formation.
La ministre du Travail, Myriam El Khomry, présentera fin octobre un document d'orientation "afin qu'un accord ou une position commune puisse intervenir mi-décembre", a dit François Hollande en ouvrant la quatrième conférence sociale de son quinquennat.
"Les échanges se poursuivront avec les régions au cours du mois de novembre et l'objectif, c'est que le projet de loi puisse être soumis Parlement dès le début de l'année prochaine", a-t-il ajouté.
Son entourage avait auparavant précisé que l'exécutif souhaitait que le texte soit voté d'ici l'été prochain.
Le projet de loi comprendra également une réforme du Code du travail, beaucoup plus délicate politiquement, dont le chef de l'Etat n'a dévoilé aucun détail lors de la conférence sociale.
SARKOZY ET LA CGT VISÉS
Il a seulement confirmé qu'il ne toucherait à aucun des principaux chiffons rouges des syndicats (Smic, durée légale du travail, contrat de travail) et n'inverserait pas la "hiérarchie des normes" en faisant prévaloir le contrat sur la loi.
La législation du travail est devenue "illisible", a-t-il cependant souligné, en ajoutant que la réforme serait lancée sans tarder. Le Premier ministre, Manuel Valls, qui clôturera la conférence en présentant la feuille de route sociale "en précisera la méthode et le calendrier", a dit François Hollande.
Le chef de l'Etat a renvoyé dos-à-dos ceux qui critiquent le dialogue social et ceux qui refusent de négocier, visant sans les nommer Nicolas Sarkozy et la CGT, qui a boudé la conférence sociale en raison des procédures lancées contre des salariés d'Air France soupçonnés d'avoir malmené des cadres de la compagnie lors de son dernier Comité central d'entreprise.
"Je n'accepterai jamais que des violences inexcusables qui ont été commises à Air France puissent être l'occasion de s'en prendre au syndicalisme dans son ensemble", a-t-il dit, une pique à l'adresse du président des Républicains qui a utilisé le mot 'chienlit' à propos des violences à Air France.
Quant à la CGT, "il est également commode, pour d'autres, de ne jamais s'engager à signer le moindre accord en espérant d'ailleurs que d'autres le feront à leur place, tout en dénonçant dans le même mouvement les insuffisances du dialogue social", a dit François Hollande.
Plus tôt, sur RTL, il avait réfuté tout risque d'explosion sociale, en réponse au secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez.
"Le conflit à Air France ne résume pas l'état de la France", a dit le président, deux semaines après les violences.
Il s'est refusé à commenter la décision du procureur d'interpeller à l'aube, à leur domicile, des syndicalistes soupçonnés de violences, déclarant cependant : "il y a d'autres méthodes pour interpeller, mais ce n'est pas à moi de le dire."
APAISEMENT ET DIALOGUE
"Ceux qui commettent des violences, ceux qui s'attaquent à des salariés, parce qu'en l'occurrence ce sont des salariés qui ont été molestés, doivent être punis", a-t-il ajouté.
"Ne comptez pas sur moi parce qu'il y a eu des violences ici ou là, en l'occurrence à Air France, pour discréditer le combat syndical, qui a sa noblesse et son utilité, à condition qu'à un moment on s'engage", a poursuivi le chef de l'Etat.
Quant au syndicaliste de la CGT qui a refusé mardi dernier de lui serrer la main lors d'une visite au chantier naval de Saint-Nazaire, le président a répondu : "Tant pis pour lui."
"Nous devons vivre dans une société apaisée. Il y a toujours des conflit, toujours des confrontations, toujours des intérêts divergents. Comment devons-nous répondre ? Par de la violence ? Sûrement pas. Par de l'apaisement, et donc le dialogue."
Le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, a stigmatisé un dialogue social selon lui biaisé en déclarant que les négociations ne pouvaient se limiter à du "chantage : soit vous acceptez des reculs sociaux, soit on licencie !".
"On ne peut pas avoir le choix entre se couper le bras droit ou se couper le bras gauche quand on négocie", a-t-il ajouté sur France Inter.
(Jean-Baptiste Vey, Elizabeth Pineau et Yann Le Guernigou, édité par Yves Clarisse)