par Jan Strupczewski
BRUXELLES (Reuters) - Les dirigeants de l'Union européenne pourraient s'accorder cette semaine sur un programme d'aide de 50 milliards d'euros à l'Ukraine, car celle-ci serait intégrée dans un ensemble de mesures dont bénéficiera la Hongrie, qui a menacé de bloquer le projet, a déclaré mercredi le commissaire européen au Budget, Johannes Hahn, dans un entretien à Reuters.
Bruxelles veut revoir le budget pluriannuel du bloc communautaire pour y inclure 33 milliards d'euros de prêts et 17 milliards d'euros de subventions destinées à Kyiv, afin que l'Ukraine, candidate à une entrée dans l'UE, soit certaine de pouvoir disposer des fonds nécessaires à son fonctionnement.
La Hongrie a remis en question le montant de l'aide et sa place dans le budget de l'UE, qui doit être approuvé à l'unanimité par les Vingt-Sept.
Le soutien européen à l'Ukraine est d'autant plus important que des divergences au Congrès américain font planer une menace sur l'aide apportée par Washington à Kyiv.
Johannes Hahn a déclaré à Reuters que le gouvernement américain a informé l'UE au printemps "qu'il serait très favorable à ce que nous soyons le fer de lance de l'aide à long terme pour l'Ukraine et que nous exercions, en quelque sorte, une pression sur la Chambre des représentants et le Sénat (américains) pour qu'ils nous suivent".
"Tous les dirigeants (européens) l'ont bien compris et je pense qu'en fin de compte, la Hongrie sera aussi d'accord, car il s'agit aussi de son intérêt", a-t-il ajouté, à la veille d'un sommet qui réunira jeudi les dirigeants de l'UE pour évoquer notamment l'Ukraine.
"TOUJOURS AVOIR UN PLAN B"
La Hongrie souhaite obtenir davantage de fonds européens pour protéger ses frontières contre l'immigration illégale et inciter les pays tiers à empêcher les migrants de passer en Europe. Le réexamen du budget de l'UE prévoit 15 milliards d'euros supplémentaires pour ce type de mesures.
Revoir le budget européen ne concerne "pas seulement l'Ukraine mais aussi l'immigration, la protection des frontières, le soutien à des pays comme la Turquie, qui sont aujourd'hui de bons amis de la Hongrie et vice-versa, et à obtenir des moyens financiers supplémentaires", a indiqué Johannes Hahn.
Dans l'optique de favoriser un accord, la Commission européenne a débloqué l'accès de la Hongrie à 10 milliards d'euros du fonds de cohésion, soit une partie de l'aide européenne gelée par Bruxelles en raison de préoccupations sur le respect de l'Etat de droit par Budapest. Cette décision, annoncée mercredi, est survenue après que le Parlement hongrois a adopté une loi devant renforcer l'indépendance de la justice.
A la question de savoir si la Commission avait un plan de secours, au cas où la Hongrie continuerait de bloquer le programme d'aide à l'Ukraine, Johannes Hahn a rappelé que "l'une des qualités de la Commission est de toujours avoir un plan B, bien que parler et spéculer sur l'existence de plans alternatifs pourrait créer une échappatoire".
Le commissaire européen a toutefois ajouté que, si cela venait à être nécessaire, l'ensemble des autres pays membres de l'UE pourraient "bien sûr" verser des aides à Kyiv par le biais d'un accord intergouvernemental.
Il est "possible" que Budapest continue son blocage, "mais je ne crois pas que la Hongrie se tiendrait à l'écart de la communauté internationale, non seulement européenne, mais mondiale", a déclaré Johannes Hahn.
(Reportage Jan Strupczewski; version française Corentin Chappron, édité par Jean Terzian)