Après avoir été longtemps considérée comme un gadget, la réalité virtuelle est en pleine révolution, et ses usages devraient se généraliser dans les toutes prochaines années, explique à l'AFP Laurent Chrétien, le directeur de Laval Virtual, le salon de référence en France qui se tient jusqu'à dimanche à Laval.
QUESTION: Où en est le secteur aujourd'hui?
REPONSE: La réalité virtuelle est aujourd'hui à un moment clef de son histoire. Les premières recherches remontent à bien longtemps, et ici à Laval on l'a intégrée en 1999. Tout un écosystème s'est développé, mais il s'est développé doucement pendant quinze-seize ans. Pourquoi doucement? Parce que les équipements coûtaient cher, parce que les compétences des ingénieurs formés n'étaient pas si nombreuses... Il y a quelques années, on pouvait voir la réalité virtuelle comme un gadget.
Ce qui fait en ce moment la bascule du secteur, c'est que tous les gros constructeurs et fabricants sont en train de développer leurs masques de réalité virtuelle, à commencer par Facebook (NASDAQ:FB) qui a racheté Oculus en 2014, et puis après les Samsung (KS:005930), les Sony (T:6758), les HTC, sans parler des Google (NASDAQ:GOOGL) Glass, de l'HoloLens de Microsoft (NASDAQ:MSFT), du Tango Project de Google, etc.
Tout le monde s'y met, mais sans vraiment avoir la vision des usages qui vont être déployés dans ces outils. Le salon Laval Virtual est l'occasion de faire un point annuel, pour tous ces acteurs, sur la rencontre entre technologie et usages. Qu'est-ce qu'on va faire avec ces technologies, qu'est-ce qui marche actuellement, qu'est-ce qui va marcher ? On a créé cette année le pavillon des contenus, pour donner notamment leur place aux studios de production audiovisuelle qui sont en train de s'emparer de ces technologies pour des documentaires, des publicités ou des films de fiction. On a aussi de plus en plus de start-ups qui développent des usages.
Q: Quelles sont les tendances cette année?
R: Il y a une tendance lourde qui est l'amenuisement des systèmes immergés complexes, ce qu'on appelle des "caves", ces cubes avec écrans et systèmes de projections qui peuvent coûter 2 millions d'euros, au profit des masques de réalité virtuelle dont certains ont une qualité et un rendu qui permettent de faire à peu près la même chose.
Il y deux ans, il y avait quinze caves sur le salon. Aujourd'hui, vous avez sans doute 500 casques de réalité virtuels, incomparablement moins chers. Sans parler de ceux dans lesquels vous mettez simplement des smartphones!
Q: Quelles applications à la réalité virtuelle?
R: Quelque chose qui va émerger, c'est sans doute la téléprésence immersive. Assez rapidement, et à mon avis dans moins d'un an, on va avoir des solutions fiables de téléportation virtuelle: ça permet d'avoir la présence de votre corps dans un univers virtuel, pour que les autres qui sont aussi dans cet univers virtuel vous voient comme si vous étiez au même endroit.
Demain, au lieu d'avoir du Skype sur votre écran d'ordinateur pour communiquer avec quelqu'un au bout du monde, vous l'aurez dans un masque de réalité virtuelle, et vous serez vraiment, physiquement, dans la réunion qui peut se tenir à 1.000 ou 10.000 km de chez vous. Vous serez vraiment dans la salle de réunion !
Plus généralement, les usages de la réalité virtuelle vont bientôt être beaucoup plus massifs dans le grand public. D'ici cinq ans, on peut parier sur le fait que chaque foyer sera équipé d'au moins un dispositif de visualisation en réalité virtuelle. D'autant que les secteurs du jeu vidéo et de l'audiovisuel, de façon plus générale, s'emparent massivement de cette technologie.
On est à un moment charnière. La croissance a été extrêmement lente depuis les années 1990, et --à l'instar de ce qu'on voit sur le salon, avec un doublement de sa taille sur les trois dernières années-- on est en train d'accélérer à toute vitesse depuis 2014 ou 2015. Ca va durer entre trois et cinq ans, et après on aura des technologies qui seront quasi banalisées, et utilisables par beaucoup. On aura de plus en plus d'applications dans la santé, dans l'éducation, dans la formation, dans le tourisme, dans l'industrie...