par Paul Carrel, Michael Nienaber et Jörn Poltz
MUNICH (Reuters) - L'Union chrétienne sociale (CSU), alliée bavaroise de la CDU d'Angela Merkel, a subi dimanche son plus grave revers électoral depuis 1950 lors d'élections régionales dont le résultat, favorable à l'extrême droite et aux Verts, pourrait attiser les tensions au sein de la coalition au pouvoir à Berlin.
La CSU a obtenu 37,3% des voix, selon les résultats provisoires. Elle perdrait ainsi sa majorité absolue pour la deuxième fois seulement depuis 1962, ce qui risque de semer la discorde au sein d'un parti qui était déjà un partenaire difficile pour la chancelière allemande.
Le mouvement conservateur va maintenant devoir former une coalition, ce qui confine à l'humiliation.
Les Verts, favorables à l'immigration, thème-phare du scrutin, doublent leur score avec 17,8%. Ils sont suivis par Alternative pour l'Allemagne (AfD), parti d'extrême droite qui fait son entrée au parlement régional avec 10,7% des voix.
Les Freie Wähler (électeurs libres), partenaires les plus probables de la CSU, obtiennent 11,6% et le Parti social démocrate (SPD), membre de la coalition gouvernementale, recueille 9,5%.
"Bien sûr, ce n'est pas un jour facile pour la CSU. Nous n'avons pas obtenu un bon résultat", a admis le Ministre-président bavarois, Markus Soeder. "Nous acceptons le résultat avec humilité", a-t-il poursuivi, ajoutant que le mouvement souhaitait néanmoins former un gouvernement stable le plus rapidement possible.
La CSU n'était pas descendue au-dessous de 43% depuis 64 ans. Lors du dernier scrutin régional, en 2013, elle a obtenu 47,7%.
"Le séisme politique s'est produit en Bavière, mais les répliques seront ressenties à Berlin (...) On parlera encore plus de la fin de l'ère Merkel", a commenté Fred Kempe, président de l'Atlantic Council, un cercle de réflexion de Washington.
POUR LE SPD, "QUELQUE CHOSE DOIT CHANGER"
Sans nommer la chancelière, Andrea Nahles, présidente fédérale du SPD, a imputé la "piètre performance" de son parti à la politique du gouvernement. "Il est clair que quelque chose doit changer", a-t-elle ajouté.
En vertu d'un accord conclu après guerre, la CSU représente la CDU (Union chrétienne-démocrate) en Bavière. Son chef de file Horst Seehofer est ministre de l'Intérieur dans le gouvernement d'Angela Merkel. Interrogé dimanche par la ZDF, il n'a pas exclu de renoncer à ses fonctions à la tête du mouvement.
L'AfD, qui a fait une entrée fracassante au Bundestag en décrochant 94 sièges lors des élections législatives de septembre 2017, sera désormais représenté dans tous les parlements régionaux à l'exception du Land de Hesse, mais il devrait y siéger à l'issue des élections régionales du 28 octobre.
La formation exploite les peurs nées de l'arrivée en Allemagne de près d'un million de réfugiés en 2015. La Bavière a été la principale porte d'entrée des demandeurs d'asile qu'Angela Merkel a décidé d'accueillir.
Horst Seehofer a toujours dénoncé cette initiative et, depuis son arrivée au ministère de l'Intérieur, la concurrence de l'AfD l'a poussé à adopter des positions encore plus dures sur l'immigration, ce qui n'a manifestement pas suffi.
Le revers que sa formation a subi dimanche pourrait l'inciter à se montrer encore plus ferme à l'égard d'Angela Merkel, qui effectue son probablement son dernier mandat à la tête du gouvernement.
Sa coalition CDU-CSU-SPD, reconduite en mars dernier, a déjà failli éclater à deux reprises en raison de divergences sur l'immigration et la proximité présumée de l'ex-chef des services de renseignement Hans-Georg Maassen avec l'extrême droite.
Les élections bavaroises seront donc suivies dans deux semaines par celles de Hesse, où la CDU devrait également subir un revers sans perdre sa position dominante, puis les délégués du mouvement conservateur se réuniront en décembre pour leur congrès annuel.
Angela Merkel briguera à nouveau la présidence du parti avec le soutien de ses ténors, malgré le revers qu'elle a subi au Bundestag où Volker Kauder, l'un de ses fidèles, a été évincé de la présidence du groupe.
(Jean-Philippe Lefief pour le service français)