LILLE (Reuters) - Le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, a rejeté vendredi l'idée d'ouvrir à Calais un centre d'hébergement pour les migrants qui tentent de passer au Royaume-Uni, provoquant l'incompréhension de la maire UMP qui l'avait proposée.
"Je ne veux pas d'un nouveau Sangatte à Calais", a-t-il déclaré sur Europe 1 en référence au centre de la Croix-Rouge fermé en 2002. "La situation de Sangatte, c'était le désastre humanitaire, l'appel d'air pour les migrants, et surtout un extraordinaire terrain de cynisme et d'intervention pour les passeurs. Je ne veux pas de cela."
La maire UMP de Calais, Natacha Bouchart, dont la ville est submergée par l'afflux de migrants - un millier à l'heure actuelle -, lui avait demandé, à la surprise générale, l'ouverture d'un centre d'accueil "pour raisons humanitaires".
La sénatrice-maire a changé totalement de position sur la question puisque jusque-là, comme l'UMP et les gouvernements de droite, dont ceux de Nicolas Sarkozy qui a fermé Sangatte lorsqu'il était ministre de l'Intérieur, y étaient opposés.
Elle utilisait jusqu'à présent les mêmes arguments que Bernard Cazeneuve, le risque de provoquer un appel d'air et de créer un point de fixation des migrants à Calais.
"Ma proposition n'est pas uniquement d'ouvrir un centre mais fait partie d'une stratégie globale", a dit à Reuters Natacha Bouchart, ajoutant qu'"en raison de l'explosion du nombre de migrants cette solution devait être étudiée".
"L'appel d'air, il est crée par les autorités britanniques, c'est elles qui doivent modifier leur conditions d'accueil."
DISPOSITIF EUROPÉEN
La maire de Calais dénonce la passivité du gouvernement "qui n'apporte pas de solutions aux Calaisiens, pas de réponse ni pour la population, ni pour les associations, ni pour les migrants" mais rejoint Bernard Cazeneuve sur un point.
"C'est un dispositif européen efficace qui permettra de résoudre le problème", estime-t-elle.
Natacha Bouchart rencontrera le ministre de l'Intérieur le 15 septembre pour lui demander "d'engager une discussion au niveau européen avec les ministres et les maires des villes concernées par les problématiques migratoires".
"L'Europe doit accompagner et aider financièrement des villes comme Lampedusa et Calais", prône l'élue en référence à l'île italienne en Méditerranée submergée de migrants qui quittent par la mer les côtes d'Afrique du Nord, souvent au péril de leur vie.
Selon la ville de Calais et la préfecture, il y aurait entre 1.000 et 1.500 migrants dans le Calaisis et leur nombre a doublé en quelques mois avec l'arrivée massive de migrants en provenance notamment du Soudan, d'Erythrée et de Somalie.
Les problèmes se multiplient à Calais, avec des migrants prêts à tout pour monter à bord des camions qui traversent la Manche pour rejoindre le Royaume-Uni.
Le centre de la Croix-Rouge de Sangatte, ouvert en 1999, devait abriter un maximum de 800 personnes mais plus de 2.000 s'y entassaient avant sa fermeture.
(Pierre Savary, édité par Yves Clarisse)