par Jan Strupczewski et Gabriela Baczynska
BRUXELLES (Reuters) - Les diplomates européens s'attellent ce mercredi à la proposition que Bruxelles présentera à Londres sur une période de transition qui s'appliquerait probablement deux années après le départ du Royaume-Uni de l'Union européenne, programmé pour mars 2019, a-t-on appris auprès de responsables européens.
Mais certains diplomates et hauts fonctionnaires de l'UE impliqués dans la préparation de ce premier "débat d'orientation" entre les ambassadeurs des Vingt-Sept ont prévenu: le gouvernement britannique ne doit pas tenir pour acquis que la deuxième phase des négociations sur le Brexit sera lancée lors du prochain conseil européen, les 14 et 15 décembre.
Un document préparé en vue des discussions de mercredi, que Reuters a pu consulter, montre que les ambassadeurs européens débattront du "format" et de la "durée" de cette période de transition.
Plusieurs responsables ont confié à Reuters que la Grande-Bretagne devrait se conformer durant cette période à toutes les directives et règlements européens, même s'ils devaient être modifiés pendant ce laps de temps et qu'elle n'aurait aucun pouvoir d'influence sur eux.
"Tout autre système serait trop compliqué", explique l'un d'eux.
Il n'est pas certain que durant cette transition, la Grande-Bretagne continue d'avoir un statut de membre à part entière du marché unique européen, ont souligné des responsables. "Il n'est par exemple pas pensable d'attendre qu'ils soient dans le marché unique sans contribuer au budget de l'UE", a dit l'un deux.
Cette période de transition, ou de mise en place, est censée éviter que le divorce prévu en mars 2019 soit un saut dans le vide. Les entreprises britanniques conserveraient provisoirement un accès au marché unique européen, et les obligations qui vont avec s'imposeraient au Royaume-Uni, notamment la libre circulation des personnes.
Dans un discours prononcé le 22 septembre dernier à Florence, la Première ministre britannique, Theresa May, s'est prononcée pour ce mécanisme qui verrait les mêmes règles continuer de s'appliquer.
"L'avis de l'UE sur cette période de transition et sur l'avenir sera d'une certaine manière un moment de vérité qui mettra à nu tous les mensonges de ceux qui ont fait campagne pour le Brexit en affirmant que la Grande-Bretagne pourrait avoir le beurre et l'argent du beurre", a dit un troisième responsable européen.
JOUER LA MONTRER ?
Réunis le mois dernier en conseil européen à Bruxelles, les Vingt-Sept ont informé May que le compte n'y était toujours pas sur la première phase des négociations, celle qui porte sur les termes du divorce, à commencer par la "facture" du Brexit dont Londres devra s'acquitter, les droits futurs des expatriés et la question de la frontière avec la République d'Irlande.
Or les Européens ont fixé comme règle d'obtenir d'abord des "progrès suffisants" sur cette première phase avant d'engager la phase 2 qui portera sur l'avenir des relations entre Londres et l'UE et sur la période de transition.
Ils ont cependant demandé à leurs équipes de lancer des "discussions préparatoires internes" sur la phase 2 avec l'espoir de pouvoir la lancer à l'occasion du dernier conseil européen de l'année, programmé les 14 et 15 décembre.
Le ministre britannique du Brexit, David Davis, est attendu vendredi à Bruxelles pour la première session de négociation depuis le conseil européen des 19 et 20 octobre.
Mais nul ne s'attend à ce que sa brève rencontre avec Michel Barnier, le négociateur en chef de l'UE, ne produise une avancée notable sur le principal point de blocage actuel, le "chèque" que Londres devra signer avant de partir pour s'acquitter de ses engagements financiers auprès de l'UE.
Certains Européens ne verraient du reste pas d'un mauvais oeil que les négociations tardent encore, forçant les entreprises britanniques à lancer leurs plans d'urgence pour se préparer à la possibilité d'un Brexit sans période de transition, voire sans accord.
Des négociateurs continentaux pensent que les inquiétudes britanniques sur la possibilité de voir des investissements se détourner du Royaume-Uni à compter de l'année prochaine pourraient être à l'avantage de Bruxelles.
La discussion de mercredi devrait être suivie d'une ou deux autres réunions similaires.
Mais l'offre qui en découlera ne sera pas présentée aux Britanniques tant que les dirigeants des Vingt-Sept n'auront pas accepté d'ouvrir la phase 2 des négociations.
(Henri-Pierre André pour le service français)