par Tangi Salaün
PARIS (Reuters) - François Fillon a été condamné lundi à cinq ans de prison, dont deux ferme, et à 375.000 euros d'amende dans l'affaire d'emplois fictifs au bénéfice de son épouse Penelope, un scandale qui avait coulé sa campagne pour l'élection présidentielle de 2017.
Le parquet national financier (PNF) avait requis deux ans de prison ferme contre l'ancien candidat Les Républicains (LR) au terme de son procès en mars dernier, la peine maximale pour détournement de fonds publics s'élevant à dix ans.
Son épouse et son ancien suppléant Marc Joulaud ont aussi été reconnus coupables des charges qui pesaient contre eux et condamnés à des peines plus légères.
Les avocats de François et Penelope Fillon ont annoncé leur intention de faire appel du jugement.
Avant de rendre son délibéré, la présidente du tribunal, Nathalie Gavarino, avait rejeté une requête des avocats de la défense demandant la réouverture des débats après la polémique suscitée par des déclarations de l'ex-procureure du PNF, Eliane Houlette, sur les pressions de sa hiérarchie qu'elle aurait subies pendant l'enquête.
François Fillon, qui avait qualifié pendant son procès le travail d'assistante parlementaire de son épouse d'"essentiel", n'est pas parvenu à convaincre les magistrats de la 32e chambre du tribunal correctionnel de Paris de la réalité de cet emploi.
Les juges ont en outre condamné l'ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy à une peine d'inéligibilité de dix ans et à verser 401.000 euros de dommages-intérêts à l'Assemblée nationale, qui s'était portée partie civile dans cette affaire.
Penelope Fillon a été condamnée à trois ans de prison avec sursis pour complicité et recel de détournement de fonds publics et recel d'abus de biens sociaux.
Les enquêteurs estiment que la discrète épouse de l'ancien député de la Sarthe, pour laquelle un des procureurs a lui-même dit "éprouver de la peine" pendant le procès, a perçu plus d'un million d'euros prélevés sur l'enveloppe parlementaire de son mari du début des années 1980 à 2013.
"IL Y AURA UN NOUVEAU PROCÈS"
"Il y aura un nouveau procès", a déclaré Antonin Lévy, défenseur de l'ex-chef du gouvernement, quelques minutes seulement après l'annonce du jugement.
"C'est d'autant plus nécessaire que depuis quelques jours on commence enfin à comprendre ce que nous pressentons depuis 2017, les conditions ubuesques dans lesquelles cette enquête s'est déclenchée, les conditions scandaleuses dans lesquelles cette instruction a été ouverte, les conditions surprenantes dans lesquelles les investigations se sont ensuite conduites."
De son côté, Pierre Cornut-Gentille, avocat de Penelope Fillon, a parlé d'une décision "extrêmement sévère" et dénoncé "une atteinte à la séparation des pouvoirs".
Reconnu lui aussi coupable de détournement de fonds publics, l'ancien suppléant de François Fillon au Palais-Bourbon, Marc Joulaud, a écopé d'une peine de trois ans de prison avec sursis et d'une amende de 20.000 euros avec sursis pour avoir continué à la payer à l'époque où son mari était au gouvernement.
François et Penelope Fillon avaient tenté pendant le procès de démontrer que ce salaire correspondait à un travail réel de secrétariat, de présence sur le terrain et de conseil, dont des tâches "ponctuelles et précises" comme la gestion du courrier et de "petites revues de presse sur la partie purement locale de la circonscription".
Lorsque le scandale avait éclaté en pleine campagne en vue de l'élection présidentielle de 2017, François Fillon avait refusé de se retirer, malgré sa mise en examen, en dénonçant un "assassinat politique".
Favori du scrutin après son triomphe lors de la primaire de la droite, le candidat conservateur avait été éliminé au premier tour, ouvrant la voie à l'élection d'Emmanuel Macron face à la candidate d'extrême droite Marine Le Pen.
Retiré de la vie politique, François Fillon, 65 ans, travaille désormais pour le fonds d'investissement Tikehau Capital.
(édité par Blandine Hénault)