PARIS (Reuters) - François Fillon a jugé mercredi qu'une dissolution de l'Assemblée était "plausible" mais a exclu le scénario d'une cohabitation, une invite implicite à la démission de François Hollande, "incapable de concevoir l'avenir de la France".
L'ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy, candidat à la primaire présidentielle à droite pour 2017, effectuait sa rentrée devant ses soutiens à Rouez-en-Champagne, dans son fief sarthois, à l'heure où Alain Juppé se pose officiellement en rival et Nicolas Sarkozy réfléchit aux conditions de son retour.
La crise politique provoquée par la démission surprise du gouvernement de Manuel Valls et la "purge" idéologique consécutive, avec l'éviction d'Arnaud Montebourg et d'autres ministres contestataires, a changé la donne politique pour la gauche, mais aussi la droite, toutes deux confrontées à l'éventualité d'une dissolution.
Si plusieurs voix au sein de l'UMP évoquent ouvertement cette option, le parti d'opposition rejette cette perspective dans sa grande majorité.
De fait, l'UMP, toujours convalescente, dans l'attente d'une nouvelle direction et d'une ligne programmatique, n'est pas en capacité de prendre les rênes du pays.
"L'opposition républicaine n'est pas prête à gouverner le pays, elle est dans une phase de reconstruction collective", déclarait sur BFMTV Geoffroy Didier, secrétaire général adjoint de l'UMP.
Plusieurs responsables du parti soulignent en outre le "piège" que constituerait une cohabitation et évoquent l'expérience malheureuse de 1986, lorsque Jacques Chirac avait été muselé par François Mitterrand.
"Le piège, ce serait de disposer d'une majorité à l'Assemblée sans disposer de tous les leviers pour agir puisque Hollande resterait aux manettes", explique un cadre de l'UMP.
"LE RETOUR AU PEUPLE"
La seule alternative serait le retour au peuple, certes, mais après la démission de François Hollande, fait-on valoir. En 1924, Alexandre Millerand avait été contraint de partir après la victoire du Cartel des gauches à l'Assemblée.
"Le retour au peuple est toujours la solution pour résoudre une crise politique, mais pas la cohabitation", a plaidé mercredi François Fillon.
"Qui pourrait croire que le nouveau gouvernement aura la capacité politique, parlementaire, institutionnelle d'engager les réformes urgentes qui peuvent seules permettre à notre économie de se remettre en marche?", a lancé le député de Paris.
"Seule l'élection présidentielle peut en être le catalyseur. Pas les intrigues et les manoeuvres inhérentes à la cohabitation", a-t-il poursuivi, sans appeler explicitement à la démission du chef de l'Etat.
L'UMP a convoqué un bureau politique anticipé mercredi soir, à 20h30, afin de décider d'une stratégie unitaire dans cette période d'incertitude.
Certains au sein du parti se rassurent en estimant que les députés "frondeurs" de gauche ne prendront pas le risque de "se faire hara-kiri" en mettant en minorité le nouveau gouvernement de Manuel Valls et que ce dernier dispose d'outils efficaces (vote bloqué, 49-3) avant l'arme fatale de la dissolution.
Le temps de la "reconquête" n'a donc pas encore sonné pour l'UMP, mais François Fillon a de nouveau fermement réaffirmé sa détermination à en être l'ultime héraut.
Les piques incessantes décochées contre François Hollande, qui "subit les événements", lui ont permis de se décrire en contrepoint comme le candidat idéal pour l'avenir, fort d'un "projet crédible" et du "courage de l'action".
"J'ai dirigé le gouvernement durant cinq ans, et je ne rougis de rien", a-t-il affirmé, en accusant le président socialiste d'avoir "berné" les Français.
"J'ai dit un jour que j'étais à la tête d'un Etat en faillite, et je ne regrette pas d'avoir le sonné le tocsin", a-t-il lancé.
(Sophie Louet et Gregory Blachier, édité par Yves Clarisse)