par Nidal al-Mughrabi
LE CAIRE/GAZA (Reuters) - Des dizaines de Palestiniens ont été tués ou blessés samedi par des frappes aériennes menées par Israël dans la bande de Gaza, malgré un nouvel appel des États-Unis à freiner la campagne militaire et à se concentrer sur les dirigeants du Hamas.
À Khan Younis, dans le sud, les autorités sanitaires palestiniennes ont déclaré que l'hôpital Nasser avait accueilli 20 Palestiniens tués dans des frappes aériennes nocturnes, ainsi que des dizaines de blessés, dont des femmes et des enfants.
Elles ont également indiqué que les frappes israéliennes sur la ville de Gaza, dans le nord, avaient touché le siège de la YMCA, qui abrite des centaines de personnes déplacées, et ont fait état de plusieurs morts et blessés.
Selon l'agence de presse officielle WAFA, au moins trois douzaines de personnes ont été tuées lors de frappes sur trois maisons du camp de réfugiés de Jabalia, ce que les responsables de la santé n'ont pas été en mesure de confirmer.
Le ministère de la santé de Gaza a déclaré que l'offensive terrestre d'Israël et le ciblage des installations médicales avaient rendu difficile la collecte d'informations sur les victimes dans le nord de la bande de Gaza.
Les secouristes pensent que des victimes sont encore ensevelies sous les décombres dans certaines zones.
Les habitants de Gaza ont également fait état de combats et de bombardements intenses au cours de la nuit à Sheijaia, Sheikh Radwan, Zeitoun, Tuffah et Beit Hanoun dans le nord, ainsi que dans le centre, l'est et le nord de Khan Younis.
"La bande de Gaza s'est transformée en une boule de feu pendant la nuit, nous pouvions entendre des explosions et des coups de feu provenant de toutes les directions", a déclaré à Reuters Ahmed, 45 ans, électricien et père de six enfants, réfugié dans un abri.
Le conseiller à la sécurité nationale du président Joe Biden, Jake Sullivan, en visite en Israël jeudi et vendredi, a transmis le message qu'Israël devait réduire sa campagne militaire et passer à des opérations plus ciblées contre les dirigeants du Hamas, ont indiqué des responsables américains.
"CHAQUE JOUR, LA SITUATION EMPIRE"
Au cours de la visite, les responsables israéliens ont publiquement souligné qu'ils poursuivraient la guerre jusqu'à l'éradication du Hamas. Washington a semblé reconnaître son désaccord, Jake Sullivan ayant déclaré que le calendrier faisait l'objet de "discussions intensives" entre les alliés.
Un responsable militaire israélien a déclaré que les trois otages tués par erreur à Gaza par les forces israéliennes brandissaient un drapeau blanc, selon les premiers éléments de l'enquête.
L'incident s'est produit dans une zone de combats intenses où les militants du Hamas opèrent en tenue civile et utilisent des tactiques de tromperie, a déclaré le responsable, mais les otages ont essuyé des tirs contraires aux règles d'engagement d'Israël.
Israël, qui a annoncé avoir retrouvé les corps de trois autres otages tués par le Hamas, pense qu'une vingtaine des 130 personnes encore détenues à Gaza sont mortes.
L'armée israélienne a indiqué samedi avoir bombardé un bâtiment à Jabalia depuis les airs après que ses forces ont essuyé des tirs et que des militants du Hamas ont été vus sur le toit.
Elle a également déclaré avoir tué des militants retranchés dans deux écoles de la ville de Gaza et effectué une descente dans des appartements de Khan Younis où se trouvaient des armes, découvrant ce qu'elle a décrit comme une infrastructure souterraine utilisée par les militant du Hamas.
"Chaque jour, la situation empire. La nourriture diminue, l'eau se détériore, mais la mort, la peur et la destruction augmentent", a déclaré Samira, 40 ans, mère de quatre enfants, déplacée à Rafah, près de la frontière avec l'Égypte.
"Je ne peux plus m'occuper de mes enfants. Ils sont terrifiés et moi aussi. Chaque nuit, nous pensons que c'est peut-être notre dernière nuit. Les bombardements ne s'arrêtent pas", a-t-elle déclaré à Reuters par téléphone.
Face à l'intensité des combats dans la bande de Gaza et aux mises en garde contre une catastrophe humanitaire, les États-Unis ont déclaré qu'Israël risquait de perdre le soutien de la communauté internationale en menant des frappes aériennes "sans discernement".
INTENSIFICATION DES COMBATS
Lors de l'attaque transfrontalière surprise du 7 octobre, les militants du Hamas ont tué 1.200 personnes et fait 240 otages. La contre-attaque israélienne a fait près de 19.000 morts, selon les autorités sanitaires de Gaza, et l'on craint que des milliers d'autres personnes soient ensevelies sous les décombres.
Les combats se sont intensifiés depuis quinze jours, après la fin d'une trêve d'une semaine qui avait permis la libération de dizaines d'otages en échange de prisonniers palestiniens.
Selon le Wall Street Journal, des responsables israéliens et qataris devaient se rencontrer samedi en Norvège pour tenter de relancer les négociations sur la libération d'otages à Gaza en échange d'un cessez-le-feu et de la libération de prisonniers palestiniens détenus par Israël.
Signe des ramifications plus larges du conflit, les Houthis du Yémen, soutenus par l'Iran, ont déclaré avoir attaqué la station balnéaire israélienne d'Eilat, sur la mer Rouge, avec une nuée de drones, l'un des nombreux incidents signalés dans la région samedi.
La plupart des 2,3 millions d'habitants de Gaza ont été chassés de chez eux au cours des deux derniers mois, souvent à plusieurs reprises.
Après le départ de Jake Sullivan, Israël a déclaré qu'il permettrait - pour la première fois depuis le début de la guerre - l'acheminement de l'aide par le point de passage de Kerem Shalom, principale voie d'accès à Gaza, en autorisant l'entrée de 200 camions par jour.
L'agence des Nations unies pour l'aide aux réfugiés palestiniens (UNRWA) a déclaré avoir accueilli 1,4 million de personnes dans ses installations, surpeuplées.
Environ 1.000 réfugiés ont été blessés dans ces abris depuis le 7 octobre et au moins 288 ont été tués, ainsi que 135 employés de l'UNRWA, a déclaré l'agence.
(Reportage Nidal al-Mughrabi au Caire, Shani et Fadi Shana à Gaza, Henriette Chacar, Ari Rabinovitch et Frank Jack Daniel à Jérusalem, Andrea Shalal, Jeff Mason et Eric Beech à Washington ; rédigé par Michael Perry, Kevin Liffey et Giles Elgood, version française Benjamin Mallet)