PARIS (Reuters) - L'attentat à l'arme blanche qui a fait un mort et quatre blessés, samedi soir à Paris, est la première manifestation d'une menace islamiste d'origine tchétchène en France.
L'assassin, Khamzat Azimov, lui-même abattu par un policier, est né en Tchéchénie en 1997. Il avait obtenu la nationalité française en 2010, de même que sa mère, précise-t-on au ministère de l'Intérieur.
Ses parents, en garde à vue depuis dimanche matin, s'étaient réfugiés en France au début des années 2000 lors d'un pic de la guerre de Tchétchénie entre la Russie et les indépendantistes.
La France avait alors accueilli nombre de Tchétchènes auxquels elle avait accordé le statut de réfugiés.
Ce que n'a pas manqué lundi de critiquer l'ancien ambassadeur russe en France Alexandre Orlov, selon qui les autorités françaises ont manqué de vigilance.
"Quand j'étais encore ambassadeur, je trouvais que les autorités françaises donnaient à ces familles l'asile trop facilement", a-t-il dit à Europe 1. "On voit les conséquences."
La ville de Strasbourg, où ont résidé les Azimov avant de venir vivre il y a un an à Paris dans un hôtel meublé du XVIIIe arrondissement, a accueilli ainsi quelques dizaines de familles.
L'ami d'enfance de Khamzat Azimov, placé en garde à vue dimanche, Abdel Hakim Anaïev, est aussi d'origine tchétchène.
Lors de son arrestation, il a été vu vêtu d'un T-shirt arborant le nom de la capitale de la Tchéchénie, Grozny, et un dessin de Kalachnikov.
Abdel Hakim Anaïev a épousé religieusement une jeune femme, objet par la suite de poursuites judiciaires pour avoir tenté de se rendre en Syrie. C'est leur fréquentation qui a valu à Khamza Azimov d'être interrogé en tant que témoin par la section antiterroriste de la brigade criminelle en avril 2017.
"SUIVEUR"
Bien que les réfugiés tchétchènes constituent le quatrième groupe d'étrangers fichés "S" après les Algériens, les Marocains et les Tunisiens, selon le ministère de l'Intérieur - certains sont notamment partis faire le djihad en zone irako-syrienne - l'attentat de samedi est le premier commis en France par une personne issue de cette communauté en France.
Si les attentats à la bombe qui ont fait trois morts et 264 blessés le 15 avril 2013 à l'arrivée du marathon de Boston ont été imputés à deux frères d'origine tchétchène, en France, les membres de cette communauté dans le collimateur de la police et de la justice s'illustraient plutôt jusqu'ici dans le trafic de stupéfiants ou d'armes, dit-on de même source.
Fiché S en raison de sa fréquentation d'un petit groupe d'habitants de Strasbourg soupçonnés de velléités de départ en Syrie, Khamzat Azimov était plutôt décrit comme un "suiveur" et certainement pas comme appartenant au "haut du spectre" des individus considérés comme dangereux, précisent des sources proches de l'enquête.
Selon un de leurs camarades strasbourgeois interrogé par France Inter, c'est plutôt Abdel Hakim Anaïev qui ne faisait pas mystère de son désir de partir en Syrie.
Aucun "élément déterminant" n'a été découvert lors de la perquisition de l'hôtel parisien où l'assassin vivait avec ses parents, a-t-on dit à Reuters de source proche de l'enquête.
Des témoins interrogés par les médias à Strasbourg ou dans cet hôtel du XVIIIe arrondissement décrivent une famille discrète, religieuse mais sans ostentation particulière.
Le fait que les aspirants terroristes "ne donnent aucun signe extérieur (...) rend difficile le travail des services" de police et de renseignement, a souligné le député La République en marche et ancien patron du Raid Jean-Michel Fauvergue sur Radio Classique.
(Elizabeth Pineau et Emmanuel Jarry, avec Service France)