par Elizabeth Pineau
PARIS (Reuters) - La présidence italienne de l'Union européenne accueille ce mercredi le troisième sommet pour l'emploi à Milan, où sera abordée en coulisses la perspective de possibles sanctions de Bruxelles à l'encontre du projet de projet de budget français pour 2015.
Les dirigeants d'une vingtaine de pays sont attendus en Lombardie pour tenter d'accélérer les mécanismes d'aide à l'emploi, avec un accent mis contre le chômage des jeunes qui s'élevait à 23,3% en moyenne le mois dernier dans l'UE.
Il s'agira de la première rencontre entre Matteo Renzi, François Hollande et Angela Merkel depuis la publication d'informations en provenance de Bruxelles évoquant un possible rejet par l'UE du projet de budget 2015 de la France.
Selon des sources européennes, la Commission demanderait qu'il soit modifié afin de respecter les engagements de Paris en matière de réduction des déficits.
Si ces critiques émanent d'une Commission finissante, qui laissera la place le 1er novembre à une équipe renouvelée avec un nouveau président à sa tête, Jean-Claude Juncker, la tension entre Bruxelles et Paris, qui a une nouvelle fois renoncé à son objectif de réduction des déficits, est toutefois palpable.
Et s'il rappelle que le budget de la France n'est "pas du tout le sujet" à Milan, l'Elysée prépare son argumentaire.
La France ne se place "pas du tout dans l'hypothèse" d'une demande révision de la part de la Commission, assure l'entourage présidentiel, soulignant que le projet de plan budgétaire ne sera transmis que le 15 octobre aux autorités européennes.
"COMMENTAIRES PRÉMATURÉS"
"Des commentaires sont donc prématurés sur la question de savoir si la Commission européenne demandera une révision. On n'est pas du tout dans cette hypothèse", dit-on. "Nous y reviendrons le moment venu".
Le ministre des Finances, Michel Sapin, a enfoncé le clou mardi en contestant le pouvoir de la Commission de rejeter le budget de la France, qui n'a en outre aucune intention de faire plus d'économies en 2015 que les 21 milliards d'euros déjà prévus, ni d'augmenter les impôts.
Censurer le budget d'un Etat membre de l'Union européenne "n'est pas dans les pouvoirs de la Commission", a-t-il affirmé sur RTL. "Heureusement que dans nos démocraties, le seul endroit où on adopte, où on rejette, où on censure, ce sont les Parlements de chacun des pays concernés."
Confronté à la double panne de croissance et d'inflation, Paris a renoncé à ramener le déficit public à la limite européenne de 3% fin 2015, ce qu'il s'était engagé à faire après avoir obtenu un délai de deux ans. Le retour à 3% est désormais prévu fin 2017, soit après la prochaine élection présidentielle.
Si l'exécutif communautaire devait sévir, il utiliserait alors pour la première fois les pouvoirs dont il dispose depuis 2013 en matière de contrôle des budgets nationaux.
La Commission pourrait aussi faire passer la procédure disciplinaire engagée contre la France au dernier stade avant celui des sanctions, tout en accordant à Paris deux années supplémentaires pour ramener son déficit dans les limites imposées par les traités, disent des sources bruxelloises.
CHÔMAGE DES JEUNES
Le dossier pèsera sur la visite de quelques heures de François Hollande à la réunion de Milan, première d'une série de rendez-vous automnaux consacrés à la croissance et à l'emploi en Europe, priorité de la nouvelle Commission européenne.
Jean-Claude Juncker veut en effet mettre en place un plan d'investissements de 300 milliards d'euros sur les trois prochaines années pour lutter contre le chômage.
Principale cible du sommet italien : le chômage des jeunes, un fléau qui affecte principalement le sud du continent.
En France, le taux de chômage au 2e trimestre chez les 15-24 ans était 22,8% selon l'Insee, contre plus de 44% en août en Italie et moins de 8% en Allemagne.
En juillet 2013, l'Europe a débloqué six milliards d'euros pour les régions où le taux de chômage des jeunes dépasse 25%. En France métropolitaine, 11 régions sur 22 sont concernées.
"Cette initiative européenne pour la jeunesse, nous la déclinons en France sous la forme d'une garantie qui concerne cette année 10.000 jeunes. L'objectif est de 50.000 fin 2015 et 100.000 fin 2017", a déclaré le ministre du Travail, François Rebsamen, après une réunion à l'Elysée.
"C'est financé en partie par l'Union européenne. Le système est complexe et nous essayons d'obtenir un dispositif plus simple, plus efficace et plus rapide", a-t-il ajouté, alors que le déblocage d'une partie des financements se fait attendre.
Allocation d'un montant équivalent au Revenu de solidarité active (RSA), la garantie jeune s'adresse à des personnes de 18 à 25 ans en situation de précarité, sans emploi et sans formation.
Paris souhaite une pérennisation de l'enveloppe de six milliards ainsi que la mobilisation d'autres outils budgétaires comme le fonds social européen et la Banque européenne d'investissements.
(Edité par Yves Clarisse)