BORDEAUX (Reuters) - Le procès de dix personnes, dont l'ancien ministre UMP Eric Woerth, soupçonnées d'abus de faiblesse commis entre 2006 et 2010 au détriment de l'héritière de l'Oréal Liliane Bettencourt s'est ouvert lundi matin à Bordeaux pour cinq semaines.
Les deux premiers jours d'audience devraient être consacrés à des questions de procédure, avec notamment les demandes de report du procès d'au moins deux avocats de la défense qui estiment que la mise en examen le 27 novembre à Paris pour faux témoignage de Claire Thibout, l'ancienne comptable de la milliardaire, l'un des principaux témoins à charge, remet en question l'instruction des juges bordelais.
Ce témoignage est central dans le procès, dans la mesure où l'ex-comptable a déclaré avoir préparé des enveloppes d'argent, notamment destinées à Eric Woerth, alors trésorier de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007.
Agissant sur plainte de deux des prévenus, François-Marie Banier et Patrice de Maistre, le juge parisien Roger Le Loire a pointé des contradictions dans les déclarations de Claire Thibout, au point de convaincre les prévenus et leurs avocats que l'instruction avait été menée à charge.
Des avocats devraient demander le renvoi de la procédure au parquet pour régulariser l'ordonnance de renvoi et inclure les éléments à décharge, ainsi qu'un sursis à statuer le temps que l'instruction du juge Le Loire, qui concerne encore cinq autres témoins de l'affaire, soit menée à son terme.
Durant cinq semaines comparaîtra le photographe François-Marie Banier, accusé d'avoir obtenu de la milliardaire environ 1 milliard d'euros de valeurs, ramenées à 600 millions d'euros après un accord avec la fille la victime, Françoise Bettencourt-Meyers, la première à avoir déposé plainte.
ACCORD ENTRE COURBIT ET LES BETTENCOURT
Son compagnon, Martin Le Barrois d'Orgeval, comparaîtra également pour abus de faiblesse, blanchiment et recel.
L'ancien gestionnaire de fortune Patrice de Maistre, le seul dans ce dossier à avoir été placé en détention provisoire durant près de trois mois, répondra de plusieurs accusations, notamment celle d'avoir bénéficié de libéralités pour un montant de plus de 8 millions d'euros et d'avoir retiré de fortes sommes d'argent des comptes en Suisse de la milliardaire.
Eric Woerth est soupçonné d'avoir perçu une partie de ces sommes de la part du gestionnaire de fortune, l'ancienne comptable ayant même dit avoir préparé une enveloppe de 150.000 euros qui, selon elle, devait lui être remise.
L'ex-président de la République, Nicolas Sarkozy, mis en examen pour ces faits a finalement bénéficié d'un non-lieu faute de "charges suffisantes" selon les juges.
Sur les bancs des prévenus figurent également l'homme d'affaires Stéphane Courbit, qui avait obtenu de la milliardaire un investissement de 143,7 millions d'euros dans son groupe Lov Group Industrie de paris en ligne.
A la veille du procès, un accord de restitution de cette somme a été trouvé avec la famille Bettencourt, qui a accepté en contrepartie de retirer sa constitution de partie civile.
L'avocat Pascal Wilhelm, successeur de Patrice de Maistre en tant que gestionnaire de fortune, Carlos Cassina-Vejarano, l'ancien gestionnaire de l'île d'Arros aux Seychelles, propriété de Liliane Bettencourt ainsi que deux notaires, Patrice Bonduelle et Jean-Michel Normand, comparaissent également.
L'infirmier Alain Thurin, qui a bénéficié des libéralités de l'ex-milliardaire, est absent à l'ouverture du procès. Selon le procureur il aurait tenté de mettre fin à ses jours.
(Claude Canellas, édité par Yves Clarisse)