PARIS (Reuters) - Hormis l'industriel Serge Dassault et son fils Olivier, l'ex-président de l'UMP Jean-François Copé fait figure de champion des revenus extra-parlementaires que sont désormais obligés de déclarer les élus de l'Assemblée nationale et du Sénat.
La Haute autorité pour la transparence de la vie publique (Haptvp), créée en octobre 2013 après l'affaire du compte suisse de l'ancien ministre socialiste du Budget Jérôme Cahuzac, a publié jeudi sur son site les "déclarations d'intérêts et d'activités" des 925 députés et sénateurs français.
La grande majorité de ces déclarations, souvent manuscrites et parfois difficilement déchiffrables, ne semblent guère réserver de surprise mais quelques-unes font exception.
C'est le cas de celle de Jean-François Copé, qui a dû démissionner de la présidence l'UMP à la suite du scandale du système de fausses factures présumées de la société Bygmalion, visant à couvrir des dépassement massifs de frais de campagne de l'ancien chef de l'Etat Nicolas Sarkozy en 2012.
Le député-maire de Meaux déclare avoir perçu 1.8 million d'euros pour ses activités d'avocat pour les années 2007 à 2013. A quoi il ajoute son traitement de maire (38.000 euros par an) et de député (36.557 euros en 2013), 35.135 euros de revenus de conférencier en 2013 et 36.689 de droits d'auteur en 2009-2013.
Jean-François Copé, qui déclare par ailleurs employer sa femme, Nadia, comme "collaboratrice parlementaire", fait jeu égal avec le député Front national Gilbert Collard, dont les activités d'avocat étaient toutefois le seul métier avant son élection à l'Assemblée nationale en 2012.
JETONS DE PRÉSENCE ET DIVIDENDES
Gilbert Collard déclare deux millions d'euros de revenus au titre de ces activités et 110.000 euros de droits d'auteur pour la période 2008-2012. Il dit conserver une activité d'avocat, rémunérée 16.013 euros par mois, depuis son élection.
Ces deux élus sont cependant battus par le sénateur UMP Serge Dassault : le président d'honneur de Dassault Aviation dit avoir touché pour la seule année 2013 628.820 euros brut comme président du groupe industriel du même nom, 6.404.482 euros de dividendes et plus de 35.000 euros de jetons de présence.
Son fils Olivier, député, déclare pour sa part une rémunération annuelle brute de 357.567 euros (525.495 avec dividendes et jetons de présence) comme président du conseil de surveillance du groupe industriel Marcel Dassault.
Il déclare par ailleurs 3.131.136 euros de dividendes comme président du conseil de surveillance de Rond point immobilier.
A titre de comparaison, le député UMP Hervé Gaymard n'avoue que 10.000 euros bruts par mois comme avocat et son collègue socialiste Jean Glavany un revenu de 121.000 euros, pour moitié comme salarié d'une société organisant des événements sportifs.
Le secrétaire général de l'UMP, Luc Chatel, avoue 234.135 euros de revenus d'activités de "conseil en stratégie et accompagnement" en 2012-2013.
L'ancien Premier ministre François Fillon, membre du triumvirat qui assume la direction provisoire de l'UMP, dit pour sa part avoir touché 70.000 euros en 2012 et 142.500 euros en 2013 au titre de sa société de conseil en conférences EURL 2F.
TRANSPARENCE OU INQUISITION ?
Quant à l'ancien ministre UMP Bruno Le Maire, qui a employé son épouse comme assistante parlementaire jusqu'en septembre 2013, il la déclare maintenant comme "artiste indépendante".
A gauche, le radical Jean-Michel Baylet dit avoir touché 700.000 euros en 2013, en tant que PDG du groupe La Dépêche du Midi, président de l'Occitane de communication, de Midi Olympique et de la Nouvelle République des Pyrénées.
Selon le président de la Haut autorité, Jean-Louis Nadal, "un peu plus de 10% des parlementaires exercent une activité rémunérée dans le secteur privé en parallèle de leur mandat".
Il précise dans l'Express qu'une quarantaine d'entre eux mentionnent une activité d'avocat mais qu'une "infime minorité" soulève des questions de conflit d'intérêts susceptibles de le conduire à saisir le bureau de l'Assemblée ou du Sénat.
Cet effort de transparence a déjà été appliquée aux membres du gouvernement, ce qui a valu au secrétaire d'Etat chargé des relations avec le Parlement, Jean-Marie Le Guen, de se voir reprocher d'avoir sous-évalué ses biens. ()
Nombre d'élus vivent cela comme une forme d'inquisition, à l'instar du député UMP Jacques Myard, qui a dénoncé dans un communiqué un "strip-tease intégral imposé" attisant, selon lui, "voyeurisme" et "antiparlementarisme primaire".
(Emmanuel Jarry et Chine Labbé, édité par Yves Clarisse)