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Otan: Macron provoque une onde de choc avant le sommet anniversaire

Publié le 08/11/2019 16:27
Mis à jour le 08/11/2019 16:31
Otan: Macron provoque une onde de choc avant le sommet anniversaire
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par Marine Pennetier

PARIS (Reuters) - A un mois du sommet des 70 ans de l'Otan, les propos d'Emmanuel Macron sur une Alliance atlantique en état de "mort cérébrale" provoquent une onde de choc et relancent le débat sur le devenir et la finalité stratégique de l'organisation, déjà sous le coup des critiques répétées de Donald Trump.

Depuis sa diffusion jeudi, l'interview du chef de l'Etat français dans The Economist n'en finit plus de susciter des remous, de Berlin - où la chancelière Angela Merkel a pris ses distances avec un jugement "radical" - à Moscou où le ministère des Affaires étrangères a salué des "paroles sincères".

Le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg a pour sa part assuré que l'Alliance était "forte", le Premier ministre canadien Justin Trudeau a insisté sur son "rôle extrêmement important" et le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo a estimé que l'Otan restait "historiquement un des partenariats stratégiques les plus importants".

Les déclarations du chef de l'Etat français - notamment sur le devenir de l'article 5 de l'Otan, pierre angulaire du traité qui prévoit une solidarité automatique en cas d’agression contre un des Etats membres - laissent présager de vifs débats dans la capitale anglaise les 3 et 4 décembre entre les 29 pays membres.

La position française est toutefois loin d'être une surprise. Emmanuel Macron avait déjà donné le ton à l'issue du dernier Conseil européen à Bruxelles le 18 octobre, fustigeant "la faute lourde" de l'Otan et émettant des doutes sur la stratégie de l'alliance face aux crises contemporaines après l'offensive turque en Syrie.

"L'Otan en tant que système ne régule pas ses membres", renchérit-il dans les colonnes de The Economist. "C'est quoi, l'article 5 demain ? C'est-à-dire que si le régime de Bachar al Assad décide de répliquer à la Turquie (membre de l'Otan, NDLR), est-ce que nous allons nous engager, c'est une vraie question".

"Il faut clarifier maintenant quelles sont les finalités stratégiques que l'on veut poursuivre au sein de l'Otan", ajoute-t-il.

"RISQUE"

Créée en 1949 au début de la Guerre froide, l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (Otan) est notamment intervenue en Bosnie en 1995 et au Kosovo en 1999 avant de s'engager dans la "guerre contre le terrorisme" après les attentats du 11 septembre 2001, en Libye ou encore en Afghanistan.

Mais depuis l'arrivée de Donald Trump à la Maison blanche en janvier 2017, l'organisation internationale est la cible d'attaques du président américain qui la juge "obsolète", trop coûteuse et pas assez efficace.

Pas un sommet de l'Otan ne se passe désormais sans que le locataire de la Maison blanche n'égratigne les "mauvais payeurs" et ne réclame un meilleur "partage du fardeau" entre Etats membres au nom de leur engagement pris en 2014 à porter leur budget défense à 2% de leur PIB d'ici 2024.

Le sommet de Londres ne devrait pas déroger à la règle. Les observateurs s'attendent à une nouvelle remise en cause de l'article 5 par le président américain à même de raviver l'inquiétude des pays de l'Est qui comptent sur le "parapluie américain" pour assurer leur sécurité. Et les interrogations d'Emmanuel Macron ne devraient pas aider.

"Il y a un réel problème et le risque d'une prophétie auto-réalisatrice quand Trump et Macron disent la même chose à propos de l'article 5, surtout à un moment où il n'y a ni consentement européen ni capacités européennes" pour trouver un substitut à l'Otan, estime ainsi François Heisbourg, conseiller à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS) .

Quant à une potentielle stratégie visant à provoquer un électrochoc, "cela ne fonctionnera pas en 2019 : les Britanniques sont obsédés par le Brexit et ont des élections, les Allemands sont paralysés, les Polonais fortement opposés, les Espagnols ont des élections et je ne pense pas que l'Italie était le public qu'il visait ", ajoute-t-il sur Twitter (NYSE:TWTR).

"KILL THE MESSENGER!"

Les propos d'Emmanuel Macron vont "nuire à l'Otan et pourraient être utilisés par ses détracteurs, dont Trump", renchérit Thomas Wright, du think tank Brookings Institution de Washington.

Des critiques auxquelles ne s'associe pas l'ancien ambassadeur de France aux Etats-Unis, Gérard Araud, qui souligne que ce n'est pas la France qui a commencé "à mettre en doute l’utilité de l’Otan, ce n'est pas la France qui piétine en ce moment les valeurs et les intérêts de l'Otan en Syrie.".

"C’est la France qui nous appelle à tirer les conséquences de cette crise indéniable", estime-t-il sur Twitter, pariant que la France va devenir dans les prochains jours le "bouc émissaire" de ses alliés. "Une façon pour eux de se rassurer sans rien faire de substantiel pour répondre à la crise. Kill the messenger!".

A Paris, une source française reconnaît que la stratégie d'Emmanuel Macron, qui vise à "mettre les choses sur la table et dire ce que beaucoup d’autres pensent mais n'osent pas dire", est "risquée".

Mais "soit on joue une unité molle en ne disant rien et on sera complice d'une forme de laxisme par rapport à une situation qui est grave ; soit on joue la carte 'cash' qui crée des clivages mais avec l'ambition à terme d'arriver à créer un consensus", ajoute cette source.

(avec Michel Rose, édité par Sophie Louet)

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