par David Shepardson et Eric Beech
WASHINGTON (Reuters) - Le président américain Donald Trump a annoncé vendredi qu'il suspendait la décision prise par son administration d'autoriser l'importation de trophées d'éléphants, prenant ainsi acte du flot de critiques dont cette mesure a fait l'objet, notamment sur les réseaux sociaux.
Ce revirement intervient quelques heures après que l'administration Trump a publié une réglementation permettant à des chasseurs ayant tué des éléphants au Zimbabwe de revenir avec leurs trophées de chasse aux Etats-Unis, des importations qui avaient été interdites sous Barack Obama.
Dans un message posté sur Twitter, Donald Trump dit vouloir prendre le temps "d'examiner les données de préservation" et qu'il va "vite faire le point" avec le secrétaire de l'Intérieur, Ryan Zinke.
Ce dernier déclare dans un communiqué s'être entretenu avec Donald Trump, notant que "nous sommes tous deux convaincus que la préservation et la santé des troupeaux sont essentiels", ajoutant que "la délivrance de permis est suspendue le temps que la décision soit rééxaminée."
L'annonce du changement de réglementation avait provoqué des critiques de la part des défenseurs de l'environnement, qui estiment que cette mesure pourrait accroître les menaces pesant sur une population d'éléphants déjà en danger d'extinction.
La perspective d'une levée de l'interdiction des importations des trophées avait aussi déclenché une tempête sur les réseaux sociaux, où ont circulé des photos montrant les fils de Donald Trump, fervents chasseurs, posant à côté d'animaux morts.
L'avocate du Centre pour la diversité biologique, Tanya Sanerib, s'est félicitée de que "l'indignation publique ait poussé Trump à revoir cette décision odieuse, mais il faut plus qu'un tweet pour empêcher les chasseurs de trophées de massacrer des éléphants et des lions (...)".
"DE NOUVELLES REGLEMENTATIONS PLUS STRICTES"
La porte-parole de la Maison blanche, Sarah Sanders, a précisé que le rééxamen de la décision d'interdire les importations de trophées avait débuté en 2014, sous la présidence Obama, par le service fédéral des pêches et de la nature.
"Cette analyse a montré que la Zambie et le Zimbabwe ont mis en place de nouvelles réglementations plus strictes en matière de conservation, correspondant aux standards internationaux, permettant aux Américains de reprendre la chasse dans ces pays-là", a ajouté la porte-parole de la Maison blanche.
Dans une note officielle publiée dans la journée de vendredi, l'agence fédérale du service des pêches et de la nature dit être parvenue à la conclusion que la chasse des éléphants au Zimbabwe pour en faire des trophées, entre le 21 janvier 2016 et le 31 décembre 2018, allait "optimiser la survie de l'éléphant africain".
Si le texte publié vendredi ne fait mention que du Zimbabwe, des représentants du service des pêches et de la nature ont affirmé que la Zambie était aussi concernée.
Avant la parution du texte au Registre fédéral, des représentants du service des pêches et de la nature avaient annoncé ce changement dans la semaine lors d'un rendez-vous organisé en Tanzanie par un groupe en faveur des trophées de chasse.
SOUPÇONS DE CORRUPTION
Le nombre d'éléphants en Afrique a baissé d'un cinquième entre 2006 et 2015 du fait du braconnage pour l'ivoire, selon l'Union internationale de préservation de la nature.
Les défenseurs de l'environnement, soulignant la corruption endémique au Zimbabwe, estiment que les recettes générées par la chasse au gros gibier, qui doivent normalement être affectées à des mesures de conservation de l'espèce, vont dans les poches des escrocs et des braconniers.
Les partisans de ces grandes chasses continuent cependant de dire que les sommes payées par les chasseurs permettent de couvrir les coûts élevés de la préservation animale.
Le républicain Ed Royce, qui préside la commission des Affaires étrangères de la Chambre des représentants, avait fustigé la décision de l'administration Trump d'autoriser à nouveau les importations de trophées de chasse.
"Les éléphants et d'autres grands animaux en Afrique sont de sanglantes monnaies d'échange pour les organisations terroristes et ils sont tués à un taux alarmant. Faire cesser le braconnage n'est pas seulement préserver les animaux les plus majestueux au monde, c'est aussi protéger la sécurité de notre pays", a souligné Ed Royce.
Le Zimbabwe est actuellement plongé dans le chaos. L'armée a pris le pouvoir dans le capitale Harare tandis que le parti du président Robert Mugabe, âgé de 93 ans, exige la démission de ce dernier.
(Jean Terzian pour le service français, édité par Benoît Van Overstraeten)