STRASBOURG (Reuters) - Le Parlement européen a définitivement adopté jeudi le projet de règlement sur le contrôle – ou filtrage -, des investissements étrangers touchant à des secteurs sensibles du point de vue de la sécurité ou de l’ordre public.
Le texte, qui a déjà fait l’objet d’un accord de principe entre le Parlement et les Etats membres, devrait entrer en vigueur 18 mois après son adoption formelle par le Conseil européen, soit fin 2020.
Il avait été présenté en septembre 2017 par la Commission européenne en réponse à une demande conjointe de la France, de l'Allemagne et de l'Italie.
Si tous les pays du G7 – les principales puissances économiques mondiales – et 14 Etats membres de l’UE disposent de leur propre mécanisme de filtrage des investissements non communautaires, 14 en sont aujourd’hui dépourvus.
Le texte adopté à Strasbourg instaure une obligation d’information mutuelle entre les Etats - et la Commission européenne -, dès que l’un d’eux lance une telle procédure vis-à-vis d’un investissement "sensible".
Si le pays destinataire de l’investissement reste libre de la décision finale, ses partenaires peuvent faire part de leurs commentaires et Bruxelles émettre un avis motivé, de sa propre initiative ou sur demande d’un Etat.
"L’Etat membre procédant au filtrage tient dûment compte des commentaires des autres Etats membres et de l’avis de la Commission", précise le projet de règlement.
ETUDIER LES "INVESTISSEMENTS ETRANGES"
La même procédure peut être appliquée vis-à-vis d’un investissement litigieux dans un Etat qui ne possède pas de mécanisme de filtrage, dès lors qu’un autre Etat membre ou la Commission européenne estime que le projet concerné représente un danger pour lui ou pour les intérêts de l’Union.
Des informations sur la nature et la valeur de l’investissement ainsi que sur l’identité de l’investisseur ultime peuvent alors être requises.
"On va passer de la loi du silence à la loi du dialogue", a estimé le Français Franck Proust, rapporteur du projet de règlement devant le Parlement.
"Il ne s’agit pas d’interdire les investissements étrangers, il s’agit de porter un regard méfiant sur les investissements étranges qui ne répondent pas à une logique économique mais à une logique politique", a ajouté l’eurodéputé Les Républicains.
Les investissements concernés sont "de toute nature" et ne concernent pas seulement ceux qui visent à prendre le contrôle total ou partiel d’une entreprise européenne.
Les domaines dans lesquels la vigilance des Etats est susceptible de s’exercer sont notamment les "infrastructures critiques, qu’elles soient physiques ou virtuelles", les "installations sensibles", les "technologies critiques" comme la Défense, la robotique ou les biotechnologies et les "biens à double usage" (civil et militaire), l’approvisionnement en matières premières ou encore "le pluralisme des médias".
S’agissant des intérêts de l’UE elle-même, le projet de règlement cite le programme de radionavigation par satellite Galileo, certains programmes de recherche, notamment sur l’intelligence artificielle, ou les réseaux transeuropéens de transport de personnes, de marchandises, de communication ou d’énergie.
(Gilbert Reilhac, édité par Yves Clarisse)