par Simon Carraud
PARIS (Reuters) - Xavier Bertrand a annoncé lundi qu'il quittait Les Républicains au lendemain de l'élection à la tête du parti de Laurent Wauquiez, dont la ligne droitière ravive les divisions au sortir d'une année électorale désastreuse.
"Je ne reconnais plus ma famille politique donc j'ai décidé de la quitter (...) Je ne crois plus aujourd'hui aux partis politiques à l'ancienne", a déclaré sur France 2 le président de la région des Hauts-de-France.
L'ancien ministre, qui avait renoncé l'été dernier à se présenter à la présidence de LR, a ajouté n'avoir aucune intention de rejoindre un parti ou d'en créer un.
Invité du journal de 20h00 de TF1 (PA:TFFP) au même moment, Laurent Wauquiez a relativisé cette défection.
"Xavier Bertrand considère visiblement qu'il n'y a pas sa place. C'est son choix. Je le respecte", a-t-il dit.
"Je ne vais pas regarder dans le rétroviseur. J'avance, je regarde vers l'avenir et moi ce que je veux c'est faire émerger une nouvelle génération, cette droite nouvelle qui assume ses idées, très tranquillement, mais qui assume juste de dire ce que trop souvent beaucoup de Francais sont condamnés à penser tout bas", a ajouté le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes.
Plébiscité dimanche par les adhérents des Républicains, Laurent Wauquiez est plus que jamais placé sous surveillance par les modérés du parti, qui se méfient de son orientation droitière.
Elu président de LR avec près de 75% des voix, l'ex-ministre de Nicolas Sarkozy jouit d'une légitimité incontestable pour guider le parti sur une trajectoire nettement à droite, conformément au ton de sa campagne, mais au risque de perdre certains passagers en route.
"Je veux une famille politique qui soit porte et fenêtres ouvertes", a-t-il dit sur TF1.
L'élection passée, l'heure est aux consultations. Laurent Wauquiez doit s'entretenir mardi avec le président du groupe LR à l'Assemblée nationale, Christian Jacob, puis rencontrer l'ensemble du groupe et enfin déjeuner avec le président LR du Sénat, Gérard Larcher.
Toujours selon l'agenda transmis par ses services, le nouvel homme fort de la droite doit ensuite s'entretenir avec les deux candidats malheureux au scrutin de ce week-end, Maël de Calan et Florence Portelli.
L'INCONNUE PÉCRESSE
Cette dernière "se présentera en 'militante vigilante' et rappellera au président nouvellement élu qu'elle ne réclame pas de poste pour elle-même mais attend des garanties, au nom des 16.000 militants qui lui ont fait confiance", fait savoir dans un communiqué son porte-parole, Pierre Liscia.
Lundi matin, Jean-Pierre Raffarin, l'une des voix de la frange modérée de LR, a mis Laurent Wauquiez en "observation".
"On va voir ce que va donner Laurent Wauquiez", a-t-il prévenu sur France Inter. "On va mettre en observation Laurent Wauquiez."
Cette attitude contraste avec le regard "bienveillant" que porte l'ex-Premier ministre sur Emmanuel Macron.
L'ancien sénateur laisse au président d'Auvergne-Rhône-Alpes environ un an pour s'assouplir et recentrer son discours, faute de quoi la droite pourrait selon lui se scinder en deux branches distinctes, comme au temps où le RPR cohabitait avec l'UDF.
Lors de sa déclaration de victoire, le nouvel élu a dit croire au "rassemblement" et appelé les dubitatifs à se ranger derrière lui. Il n'a par ailleurs jamais prononcé la locution "la droite et le centre" qui fleurissait jusque-là dans le discours des dirigeants de LR.
"Laurent Wauquiez aura le souci du rassemblement mais aussi et avant tout de l'efficacité", relève Geoffroy Didier, qui fut son directeur de campagne. "Il ne faut pas qu'au nom du rassemblement, les choses se diluent. C'est un savant dosage entre le rassemblement qui est nécessaire et l'efficacité qui est primordiale."
Dans son entourage, on précise qu'il devrait s'adresser cette semaine à plusieurs personnalités de poids, comme la présidente de la région Île-de-France, Valérie Pécresse, pressentie pour occuper la présidence du conseil national de LR - sous réserve qu'elle accepte.
Alain Juppé s'est pour sa part contenté lundi d'un message laconique sur Twitter ("à lui de jouer maintenant, avec sa génération") assorti d'un encouragement à l'adresse de Maël de Calan, balayé dimanche avec 9,25% des voix.
Ce score, en deçà de son objectif de 10% à 20%, a permis de mesurer l'influence déclinante de la sensibilité libérale et européenne parmi les adhérents encore actifs, autrement dit ceux qui n'ont pas tourné le dos à LR au profit d'Emmanuel Macron ou simplement par désillusion.
Devant ses partisans, le jeune représentant "juppéiste" a posé plusieurs conditions pour "que la droite parvienne à se relever", qui ont résonné comme autant de mises en garde destinées à Laurent Wauquiez.
(Avec Elizabeth Pineau et Mathieu Rosemain)