Adieu Draghi ! Que retiendra-t-on de son mandat à la tête de la BCE ?

Publié le 24/10/2019 08:40

Adieu, Mario Draghi! Le mandat de 8 ans de l'italien de 72 ans à la tête de la BCE, au cours d'une période pour le moins agitée, se terminera à la fin du mois d'octobre.

La conférence de presse consécutive à la réunion de la BCE d'aujourd'hui fera donc office de “pot de départ”, et sera sa dernière occasion de s'exprimer publiquement et officiellement en tant que timonier de la politique monétaire européenne.

Draghi, le sauveur de l'Euro

Le plus important coup d'éclat de Draghi a eu lie en 2012, lorsqu'il a prononcé ce qui pourrait être les trois mots les plus célèbres de l'histoire de la banque centrale, promettant que la Banque centrale européenne ferait "tout ce qu'il faudra" (Whatever it takes) dans le cadre de son mandat pour préserver l'euro.

C'est ce qui permet à Draghi d'être universellement reconnu comme le garant de sa survie, et c'est le souvenir le plus marquant de son mandat que le public gardera en mémoire.

Mais il faut aussi avouer que le patron de la BCE termine son mandat dans la controverse et la division sur les politiques qu'il a défendues et la façon dont il les a menées.

Draghi a pris les rênes de la BCE basée à Francfort en novembre 2011, au moment même où la crise de la dette de la zone euro s'aggravait. En juillet 2012, alors que les rendements des obligations d'État italiennes et espagnoles se négociaient à des niveaux élevés ou presque insoutenables, Draghi a remis un gage non scripturisé lors d'un événement à Londres :

"Dans le cadre de notre mandat, la BCE est prête à faire tout ce qui est nécessaire pour préserver l'euro ", a-t-il déclaré, ajoutant "croyez-moi, ce sera suffisant."

Draghi a ensuite dirigé la BCE dans l'élaboration d'un programme d'achat d'obligations d'urgence qui allait bien au-delà de ce que la banque centrale se permettait auparavant et qui pouvait être utilisé en cas d'urgence.

Le programme, connu sous le nom de transactions monétaires directes, ou OMT, n'a jamais été utilisé, mais son existence et les efforts déployés pour l'élaborer ont permis de calmer la tempête. Les rendements de la dette des gouvernements les plus vulnérables de la zone euro sont revenus à des niveaux soutenables.

En outre, Draghi a envoyé un message sur la volonté politique d'éviter l'éclatement de l'euro. Le drame a souligné les compétences de Draghi en tant que communiquant. Au fil des ans, il s'est taillé une réputation pour sa capacité de diriger verbalement les marchés financiers, y compris le taux de change de l'euro, bien qu'il ait toujours affirmé que cela ne fait pas partie des objectifs de la BCE.

En 2015, Draghi a surmonté l'opposition de l'Allemagne et de ses alliés d'Europe du Nord pour persuader la BCE de mettre en œuvre un assouplissement quantitatif – c'est à dire créer de la monnaie pour acheter des obligations - afin de stimuler l'économie de la zone euro et de ramener une inflation obstinément faible vers son objectif (proche mais juste en dessous de 2%). La BCE a également poussé son taux de dépôt en territoire négatif pour la première fois de son histoire sous Mario Draghi.

En effet, la confiance et la conviction individuelles de M. Draghi ont joué un rôle clé dans l'extension de la boîte à outils de la BCE, y compris lors du lancement de l'assouplissement quantitatif (QE), un instrument qui était difficile à mettre en place dans la zone euro en l'absence de contrepartie budgétaire.

Des décisions de plus en plus critiquées, une BCE à bout de souffle

Bien que Draghi soit loué pour avoir aidé à sauver l'euro, il a été violemment critiqué pour ses faibles taux d'intérêt et leur effet sur les épargnants. Le tabloïd allemand Bild a réagi à la décision de la BCE le mois dernier de pousser le taux de dépôt davantage en territoire négatif avec une illustration photo d'un Draghi fanged avec le titre : "Le comte Draghila est en train de vider nos comptes."

Les rendements faibles, voire négatifs, des obligations d'État et des obligations d'entreprises sont également accusés de maintenir la pression sur le secteur bancaire européen.

De plus, les économistes mettent en garde contre le risque d'atteindre un "taux de renversement" où les taux négatifs deviennent un frein à l'économie en incitant les banques à réduire les prêts et les ménages à épargner davantage.

Mais le plus grave est que la campagne de Draghi en faveur de la décision de septembre a également ouvert des brèches au sein du Conseil des gouverneurs.

En effet, le Wall Street Journal a rapporté qu'au moins sept membres de cet organe de 25 membres, y compris les responsables des banques centrales française, allemande, néerlandaise et autrichienne se sont opposés au projet de relance du programme d'achat d'obligations de la BCE.

Si la BCE ne peut (ou ne veut) plus agir, cela pourrait signifier que Christine Lagarde devra utiliser ses compétences politiques pour persuader les gouvernements européens de recourir à la politique budgétaire et d'accroître les dépenses et les investissements publics pour soutenir l'économie.

Les politiciens ont été réticents à poursuivre des politiques budgétaires expansionnistes à la suite de la crise financière de 2008, et ils se sont contentés de laisser les banques centrales prendre l'initiative d'éviter une crise plus profonde tout en les critiquant pour leurs mesures extraordinaires.

Dans le cas de la BCE, Draghi et ses collègues se sont retrouvés dans le vide. Les membres individuels de la zone euro contrôlent leurs propres budget, et il n'existe pas de ministère des finances à l'échelle de la zone euro.

Cependant, si la BCE arrive effectivement à bout de souffle et qu'une nouvelle crise se prépare, c'est sur les gouvernements européens que pèsera la responsabilité d'éviter un éclatement de la zone euro et de sa monnaie...

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