Enregistrant une croissance de 5,3% lors de son dernier exercice fiscal, l'Égypte vient de connaitre sa plus forte croissance de la dernière décennie. L’occasion de se pencher sur l’évolution des emprunts gouvernementaux émis par le pays des pharaons.
Fort d’une croissance doublée en l'espace de cinq ans, l’économie égyptienne semble sur les bons rails, elle qui avait vacillé en 2011 après que le pays ait connu la révolution et une série d’attaques terroristes.
Il y a quelques semaines, lors d’un discours télévisé marquant le cinquième anniversaire du renversement du président islamiste Mohamed Morsi, le chef de l’Etat Abdel-Fattah al-Sissi a dressé un bilan positif des cinq dernières années, qu'il impute au changement de régime.
On rappellera que depuis deux ans, le pays de 90 millions d’habitants a entamé une série de réformes visant à remettre l’économie d'aplomb. Un programme de réformes et de relance soutenu à hauteur de 15 milliards de dollars par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international.
A la tête d’une mission du FMI en mai dernier, Subir Lall a salué l'efficacité des réformes entreprises.
"L'Égypte commence à récolter les fruits de son ambitieux programme de réformes économiques qui était politiquement difficile... Alors que le processus exige des sacrifices à court terme, les réformes étaient essentielles pour stabiliser l'économie et jeter les fondations d'une croissance solide et durable qui améliorera les niveaux de vie de tous les Egyptiens", a-t-il déclaré.
Dernièrement, le ministère des finance a indiqué viser les 8% de croissance à l’horizon 2021/2022, via notamment une augmentation moyenne à deux chiffres des exportations non-pétrolières.
Quid de l’évolution de la livre égyptienne ?
A l’inverse de la plupart des autres devises émergentes, le très bon comportement de la monnaie égyptienne est à souligner, elle qui affiche une hausse de 3,2% face à l’euro cette année, tandis qu’elle évolue non loin de l’équilibre face au dollar.
Le pays des pharaons est-il pour autant à l’abri de la crise monétaire qui secoue actuellement les pays émergents ? "Oui, mais jusqu’à un certain point", a indiqué lors d’un entretien accordé à CNBC Mohamed Maait, Ministre des finances du pays.
"La crise monétaire qui touche actuellement les pays émergents est inquiétante", a reconnu le Ministre, ajoutant que l’Égypte était en mesure d’absorber ses effets négatifs, pour autant que les causes ne s’aggravent pas.
Suite à la remontée des taux Etats-Unis, conjuguée à la hausse du billet vert, les investisseurs désertent les placements en devises émergentes, ce qui plombe ces mêmes devises et provoque au passage des tensions pour les pays endettés en dollar. Touchées de plein fouet, l’Argentine, la Turquie et l’Indonésie voient notamment leur monnaie battre des records de faiblesse.
On notera que la dette publique égyptienne a progressé à 36,8% du PIB au mois de juin, en hausse de 11,6% sur un an. Comparativement, la Turquie affiche un même ratio de 23% du PIB, souligne CNBC.
Au même titre que les autres pays émergents, la hausse des taux et du dollar a augmenté les coûts de financement de l’Égypte, qui doit emprunter sur la période 2018-2021 l’équivalent de 30 milliards de dollars d’obligations sur les marchés européen et américain.
Mohamed Maait se montre toutefois confiant dans la soutenabilité de la dette. "Nous reconnaissons que nous avons un haut niveau d’endettement et que nous devons le réduire. Le gouvernement introduira des mesures visant à baisser la dette ces prochaines semaines", a-t-il précisé.
Ajoutons encore que selon les dires du Chef de l’Etat, les réserves du pays en devises étrangères seraient passées ces dernières années de 15 à 44 milliards de dollars, un niveau historique.
Des obligations en euro
En vue de combler son déficit budgétaire et augmenter ses réserves de change, on rappellera que l’Égypte est venue solliciter, pour la première fois de son histoire, le marché européen de la dette au mois d’avril.
Dans le détail, le trésor égyptien avait levé deux milliards d’euros, notamment via l'émission d'une obligation remboursable dans huit ans, rémunérée par un coupon fixe de 4,75%.
Nécessitant une mise de fonds de 100.000 euros, l'obligation se traite sous le pair, permettant à l'investisseur de tabler sur un rendement annuel proche de 6%.
Moody's accorde à cette émission un rating spéculatif « B3 ». Il y a quelques jours, l’agence a revu à la hausse la perspective associée au rating, désormais positive, citant les progrès réalisés dans le cadre de l’ambition plan de réforme économique soutenu par le FMI.