La BNS se tient prête à agir, mais n'en voit pas la nécessité pour l'instant (par Peter Rosenstreich)
La Banque nationale suisse a manifestement opté pour la réactivité plutôt que pour la proactivité. N'étant pas sous pression, elle va attendre de voir comment les choses évoluent. Comme nous nous y attendions, elle a maintenu ses taux en l'état (taux des dépôts à vue à -0.75%, Libor à trois mois entre-1.25% et -0.25%), sans toucher aux exemption aux taux négatifs. Compte tenu de son arsenal d'outils limité, le durcissement des seuils d'exemption serait sa première option (hors des interventions systématiques et mineures sur le marché des changes). Nous avons eu droit au discours classique, mentionnant la surappréciation du franc et la poursuite des interventions sur les marchés des changes, mais nous n'en attendions pas moins et le marché n'a pas réagi à la menace. Dans son communiqué, la BNS indique que les prévisions d'inflation ont dû être révisées à la baisse, la glissade des prix du pétrole ayant contribué à affaiblir les pressions inflationnistes. Elle estime que l'inflation devrait revenir en territoire positif en 2016, ce qui nous paraît optimiste. Par ailleurs, l'institution a qualifié les performances économiques de légèrement affaiblies, l'activité manufacturière et commerciale restant déprimée, d'où des perspectives économiques mondiales un peu moins favorables qu'en décembre. La croissance du PIB est désormais prévue entre 1% et 1.5%. Enfin, le ralentissement des prix immobiliers a été confirmé, avec un ralentissement des prêts hypothécaires qui reflète l'affaiblissement des fondamentaux de la croissance (le ton s'est tempéré par rapport au communiqué précédent).
Contrairement aux actions précédentes de la Banque centrale européenne, qui avaient contraint la BNS à réagir, les dernières mesures d'assouplissement de la BCE sont perçues comme un signe avant-coureur de taux négatifs. L'EUR/CHF est extrêmement sensible aux différentiels de taux d'intérêt, comme l'appétit pour le risque. Bien que Mario Draghi ait assuré que les taux pouvaient être encore réduits, le passage subtil de l'utilisation des taux à l'assouplissement du crédit indique que le recours à de nouveaux abaissements est peu probable. Le manque de vigueur du CHF a montré que le marché était satisfait, le rétrécissement des spreads a semblé moins probable et la pression pesant sur la BNS a diminué. Cette dernière continuera de surveiller le CHF et les entrées de capitaux potentiels en provenance de l'Europe, résultant d'actions de la BCE ou d'événements (Brexit, Grexit, élections espagnoles, etc.). Sauf événement choc, nous anticipons la poursuite de la tendance haussière de l'EUR/CHF sur le court terme, avec la résistance à 1.10229 comme premier objectif.
Malgré les récents commentaires du président de la BNS, Thomas Jordan, laissant entendre que la stratégie de politique monétaire de la Suisse avait limité l'attrait du franc, nous pensons que la BNS dispose de moins de contrôle. En outre, un abaissement de la bande inférieure des taux négatifs à -1.25% ou une expansion du bilan de 100%+ du PIB entraîne des risques de déstabilisation potentiels qui sont difficiles à modéliser. Nous sommes d'accord avec Andrea Maechler, membre de la BNS, qui estime qu'il y a des limites à l'efficacité de la banque centrale. Selon nous, la BNS est très proche de ces limites. La banque centrale ciblera vraisemblablement les exemptions aux taux négatifs dans un premier temps. Pour l'instant, il est peu probable qu'elle se voit contrainte de piocher dans son maigre arsenal, mais compte tenu de la détérioration des perspectives d'inflation et de croissance européennes, de nouvelles mesures de soutien pourraient devenir nécessaires. Nous restons négatifs sur l'EUR/CHF en raison de la montée des événements porteurs de risque en Europe et de la demande régulière d'actifs refuges à long terme.
Une Fed étonnamment dovish (par Yann Quelenn)
Les termes clés du communiqué du FOMC concernaient, comme d'habitude, le marché du travail et l'objectif d'inflation. L'optimisme règne. Cependant, la poursuite de l'amélioration de l'emploi n'a pas encore donné l'impulsion attendue à l'inflation, qui reste inférieure à l'objectif à long terme de 2%malgré le léger mieux de ces derniers mois. La Fed reste convaincue que les effets de la baisse des prix de l'énergie et des importations vont s'atténuer et que les pressions inflationnistes vont s'accroître. Les prix de l'énergie augmenteront peut-être, mais d'après nous, l'affaiblissement général de la demande continuera à pousser les prix à la baisse. L'objectif d'inflation de 2% semble encore très loin.
De notre point de vue, les prix de l'énergie et des importations sont loin d'être les seuls moteurs d'une hausse des taux de la Fed. Les conditions économiques et financières mondiales sont également des facteurs importants empêchant la banque centrale américaine d'agir. La Fed refuse toutefois d'admettre que le ralentissement chinois a mis en lumière les difficultés sous-jacentes de l'économie US. Les exportations chinoises sont tombées de 25% en 2015, autrement dit, les pays occidentaux ont moins acheté en Asie. Par conséquent le secteur manufacturier américain est à la peine, ce qui exerce des pressions sur le marché du travail, lequel reste résilient pour l'instant. Malheureusement, les communiqués du FOMC ne mentionnent pas ces problèmes, ce qui montre que la Fed pourrait être exagérément optimiste en ce qui concerne la santé de l'économie américaine.
EURUSD La paire EUR/USD progresse, stimulée par la décision de la Fed de maintenir ses taux inchangés hier. La résistance horaire des 1,1218 (plus haut du 10/03/2016) a été cassée. Un support horaire peut se situer à 1,1058 (plus bas du 16/03/2016). La paire devrait poursuivre sa consolidation. À plus long terme, la structure technique favorise un biais baissier aussi longtemps que la résistance tiendra bon. La résistance clé située autour de 1,1453 (plus haut du range) et de 1,1640 (plus bas du 11/11/2005) plafonnera probablement toute appréciation des cours. Les détériorations techniques actuelles favorisent une baisse progressive vers le support des 1,0504 (plus bas du 21/03/2003).
GBPUSD La paire GBP/USD est repassée au-dessus de la barre de 1,4200. Cependant, la structure technique affiche toujours une ligne de tendance baissière à moyen terme. La paire peut rencontrer une résistance horaire à 1,4437 (plus haut du 11/03/2016), alors qu'un support horaire peut se situer à 1,4033 (plus bas du 03/03/2016). La paire devrait afficher un mouvement de baisse supplémentaire. La structure technique à court terme est négative et favorisera une accentuation de la baisse vers le support clé des 1,3503 (plus bas du 23/01/2009), tant que les cours restent au-dessous de la résistance des 1,5340/64 (plus bas du 04/11/2015, voir aussi la moyenne mobile quotidienne à 200 jours). Cependant, les conditions générales de survente et la récente reprise de l'intérêt acheteur ouvrent la voie à un rebond.
USDJPY La paire USD/JPY reste dans un range entre la forte résistance des 114,91 (plus haut du 16/02/2016) et le support des 110,99 (plus bas du 11/02/2016). Il y a une forte volatilité, mais la paire continue d'évoluer sans élan clair. Nous privilégions un biais baissier à long terme. La paire vise le support des 105,23 (plus bas du 15/10/2014). Une hausse progressive vers la résistance majeure des 135,15 (plus haut du 01/02/2002) semble actuellement peu probable. La paire peut rencontrer un autre support clé à 105,23 (plus bas du 15/10/2014).
USDCHF La paire a chuté hier, plombée par la décision de la Fed de maintenir ses taux inchangés. Un support horaire situé à 0,9796 (plus bas du 11/03/2016) a été cassé. Une résistance horaire se situe à 0,9914 (plus haut du 16/03/2016). Elle devrait poursuivre sa progression. À long terme, la paire affiche des sommets depuis mi-2015. Un support clé peut se situer à 0,8986 (plus bas du 30/01/2015). La structure technique favorise un biais haussier à long terme.