Publié à l'origine sur la Bourse au quotidien.fr
Wall Street n’avait jamais pris très au sérieux la menace de guerre commerciale totale brandie par Donald Trump, qui qualifiait l’Europe d’ennemie (dans la sphère économique) et de « profiteuse » par la faute de traités injustes pour les Etats-Unis, et les investisseurs américains ont en l’occurrence eu le nez creux.
Le président américain et le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker ont en effet tenu une conférence de presse commune hier à l’issue de laquelle un accord a été conclu. Selon ses termes, les projets de surtaxations réciproques sont notamment abandonnés et l’UE s’est engagée à acheter davantage de soja américain, produit pris pour cible par la Chine en représailles des taxes américaines instaurées sur l’acier.
Il s’agit d’une énième version du scénario classique de mise sous pression des « partenaires » commerciaux avant de conclure un accord qui satisfait (plus ou moins) les signataires, lesquels se sont également entendus pour réformer les règles de l’OMC, ce qui revient à dire que les bases actuelles du commerce international appartiennent au passé et que les Etats-Unis aspirent à obtenir la mise en place de mécanismes qui leur seront plus favorables. Il faut toutefois faire preuve d’un grand optimisme pour imaginer que le « monde de demain » soit également à l’avantage des exportateurs européens…
Les envolées et saillies de Donald Trump doivent être relativisées
En attendant, cette refonte est conforme à une revendication constante de Donald Trump, quand bien même elle ne reflète pas forcément un consensus parmi les membres du Congrès (beaucoup de républicains et de démocrates restent attachés –et pour de bonnes raisons – aux traités négociés sous George W. Bush en 2002) et les « sherpas » de Wall Street.
Il n’y a toutefois pas de raison de déplorer la tournure de ce sommet de Washington et sans doute un grand enseignement à en tirer : avec Donald Trump, les grandes envolées lyriques et pleines de superlatifs se doivent d’être relativisées.
Et si le président américain a pu obtenir un accord de principe de la part des Européens, que se passera-t-il concrètement et combien de temps faudra-t-il pour que les choses se mettent en place ? Ce qui va suivre relève de la pure spéculation… et il valait mieux ne pas trop spéculer mercredi soir !
Les permabulls se sont certes empressés de célébrer l’armistice américano-européen et le Nasdaq s’est envolé de 1,2%, inscrivant un nouveau record absolu en séance et en clôture (le zénith historique intraday de la veille a été dépassé de 5 points à 7 933 points)… Mais peu après la clôture, Facebook (NASDAQ:FB) a fait état de comptes trimestriels plombés par la sécurisation des données des utilisateurs (+50%, soit 7,4 Mds$), lesquels ont par ailleurs été moins nombreux qu’attendu.
L’action du réseau social a très fortement réagi, s’effondrant de 22% vers 170$, soit une perte de capitalisation de 157Mds$ (l’équivalent de la capitalisation de LVMH (PA:LVMH), la plus grosse capitalisation du CAC40) et 20 Mds$ de plus que la « capi » d’IBM (NYSE:IBM).
Le Nasdaq a en conséquence reculé de 1,5% en transactions électroniques, un nouveau contrepied qui pourrait faire très mal…