Publié à l'origine sur la Bourse au quotidien.fr
L’indicateur de volatilité du marché américain, plus connu sous le nom de VIX, s’est redressé de 8% vers 13,6 hier, mais après être parti d’un plancher de 12,40 mardi. Nous sommes donc loin d’assister à une poussée de fièvre comme l’emballement de l’actualité aurait pu le laisser craindre…
Compte tenu des risques très concrets d’emballement de la guerre commerciale à l’échelle planétaire et de la volonté de Donald Trump d’en découdre avec ses alliés de l’Otan sur la question du financement de la « protection » américaine, un niveau médian de 13 sur le VIX – équivalent à celui de la mi-juin – correspond à un degré de complaisance extrême des marchés.
La série de sept séances de hausse du « S&P » sur un total de 8 depuis le début du mois, un quasi sans-faute donc, a mécaniquement compressé le baromètre du stress. Et tel un serpent qui se mord la queue, la glissade du VIX a symétriquement suscité un retour de l’appétit pour le risque, le marché se fiant au passage au vert de nombreux indicateurs techniques.
Les gérants ayant fait preuve d’une très compréhensible prudence à mesure que les nuages se sont accumulés depuis la fin du mois de juin (guerre commerciale, ferments inflationnistes, signaux alarmants du côté des pays émergents…), ils se sont progressivement retrouvés sous-investis… puis contraints de réemployer une partie de leurs liquidités, le plus souvent à contre-cœur. Pour autant, la nature de leurs mandats ne leur laisse guère le choix : certains seuils prédéfinis de liquidités inemployés ne peuvent être excédés plus de quelques séances.
C’est pourquoi, sans grande surprise, les programmes d’achats qui privilégient les valeurs de croissance (incarnées par notre fameux Fangman) ont été réactivés. Il n’était pas question en effet d’initier une rotation sectorielle en faveur des utilities ou des valeurs bancaires – très décotées –, leur situation ne faisant qu’empirer au fil des semaines.
▶ Gare à l’aplatissement de la courbe des taux
Le plus gros frein demeure cependant l’aplatissement de la courbe des taux, avec moins de 30 points de base d’écart entre les bons du Trésor américain à 2 et 10 ans, et 37 points entre le 2 ans et le 30 ans, soit moins de 1,3 point de base de rémunération supplémentaire par année de maturité.
Ce pourrait surtout être le signe précurseur d’une récession, même si les économistes fervents admirateurs des banques centrales s’évertuent à expliquer que le « biais » accommodant toujours en vigueur en Europe, au Japon et même aux Etats-Unis écrase littéralement les spreads, une situation qui présente de grands avantages pour les entreprises, les emprunteurs institutionnels, les Etats surendettés.
Les taux bas sont une « commodité », un artifice monétaire, et perdent de ce fait tout caractère prédictif, mais tout le monde a fait semblant d’y croire… jusqu’à hier soir avec les plongeons inattendus de 5% du WTI et de 7% du Brent, ce malgré une spectaculaire contraction des stocks hebdomadaires de pétrole outre-Atlantique (-12,6 millions de barils au titre de la semaine close le 6 juillet, contre un recul de « seulement » 4,8 millions attendu par les économistes).
Je dois avouer que je n’ai pas vu le coup venir et que si quiconque avait cru pouvoir bénéficier d’un délit d’initié sur les chiffres de l’AIE (l’Agence américaine de l’énergie), il se serait fait littéralement désintégrer en renforçant ses positions « longues ».
C’est peut-être « l’effet contre-pied » qui a amené nombre d’opérateurs à couper leurs positions face à une contrepartie absente… mais justement ! Cette absence de contrepartie me paraît très symptomatique d’anticipations devenues très prudentes concernant le cycle de croissance.
Ajoutons-y un « effet Trump », un de plus, puisque le président américain fait pression sur l’Arabie saoudite pour qu’elle augmente encore sa production. Il pourrait en outre chercher à convaincre Vladimir Poutine d’en faire autant lors de leur entrevue (sans témoins) de lundi prochain.