L’annonce de nouvelles sanctions américaines contre des hommes d’affaires russes et leurs entreprises a provoqué lundi un important mouvement de défiance sur les titres russes. Actions, obligations souveraines et d’entreprises, rouble, aucun actif n’a été épargné.
Ces nouvelles sanctions, contrairement aux précédentes qui visaient à punir Moscou pour sa politique en Ukraine ou pour son soutien au régime syrien, sont une réponse cette fois à l’ingérence de la Russie dans la politique intérieure américaine. Elles visent à répondre aux «attaques» de Moscou contre «les démocraties occidentales», en ligne de mire particulièrement le rôle joué lors de la campagne présidentielle américaine.
Les mesures visent 24 d’hommes d’affaires et 14 entreprises, notamment Oleg Deripaska, surnommé «le roi de l'aluminium» et proche de Vladimir Poutine, Alexeï Miller, directeur général de Gazprom, Andrey Kosting, président de la VTB Bank… tous soupçonnés d'être liés à «des activités malveillantes» visant à déstabiliser les démocraties occidentales.
A la Bourse de Moscou, l’indice RTS (libellé en dollars) chutait de 11,4% lundi à l’heure de la clôture des marchés européens et l’indice Micex (exprimé en roubles) de 8,3%.
Sur le marché des changes, le rouble glissait de 3,4% face au dollar et de 4,6% face à l’euro.
La dette corporate malmenée
L’onde de choc des sanctions, qui portent un sérieux coup à l’économie russe, a percolé jusqu’au marché obligataire souverain, mais également corporate.
Le contrat d’assurance pour s’assurer contre un défaut de paiement (CDS) de la Russie sur sa dette à 5 ans gagnait 17 points de base (100 points de base égalent 1%) à 138 points, selon des données IHS Markit Data.
Le rendement de l’obligation souveraine russe à 10 ans progressait de 23 points de base à 7,70%.
Sur le marché de la dette corporate, la tension était palpable, comme l’illustrent ces exemples.
1. Le géant de l’aluminium Rusal, contrôlé par le multimilliardaire Oleg Deripaska, dont l’action s’est effondrée de 50% à la Bourse de Hong Kong (place de cotation du titre), faisant s’envoler plusieurs milliards de capitalisation boursière, a indiqué que la situation actuelle pourrait l’amener à «faire défaut sur une partie de sa dette». Ses obligations ont par ailleurs été retirées de la plate-forme de trading obligataire MarketAccess, selon Reuters.
2. L’obligation Polyus, premier producteur d'or de Russie, a vu son obligation échéance en 2024 tomber à 83% du nominal, soit un rendement de 8,9%. Le groupe est une victime indirecte des sanctions de Washington : Souleïman Kerimov, membre du Conseil de la Fédération de Russie, contrôle le capital de la compagnie aurifère.
3. L’obligation en dollar, d’une maturité égale au 1er mars 2024 et d’un coupon de 4,375% de la société nationale russe des chemins de fer, RZD Capital Russian Railways, entièrement aux mains de l’État, est passée en quelques heures de 101% du nominal à 98%.
4. Situation similaire pour l’obligation Gaz Capital SA libellée en dollar, à échéance 19 juillet 2022 et rémunérée par un coupon de 4,95%. L’obligation est désormais disponible à 100,70% du nominal contre 102,5% à la veille de l’annonce des sanctions. Gaz Capital est une filiale financière du géant gazier contrôlé par l’État russe Gazprom.