Publié à l'origine sur la Bourse au quotidien.fr
Alors que Guillaume Faury s’apprête à succéder à Tom Enders à la tête d’Airbus Group (PA:AIR), il est aujourd’hui permis de s’interroger sur la valorisation du titre de l’avionneur européen.
L’action est, de loin, la plus forte progression du CAC40 depuis le début de l’année (+41% environ) et la valorisation boursière de la société atteint désormais près de 92 Mds€, soit la cinquième plus grosse « capi » française, tout près de Sanofi (PA:SASY) (97 Mds€).
Selon le principe des vases communicants, Airbus Group profite bien sûr des déboires de Boeing (NYSE:BA), qui à la suite de deux accidents survenus à quelques mois d’intervalles sur son 737 MAX, le principal concurrent de l’A320 « NEO » (New Engine Option), ronge son frein, l’appareil étant cloué au sol pour une durée indéterminée, avec un manque à gagner considérable.
Dans le même temps, Airbus Group continue d’engranger, avec 58 nouvelles commandes le mois dernier, dont 20 long-courriers A350-900 de Lufthansa (DE:LHAG) et 15 autres A350 (10 A350-1000 et 5 A350-900) de la future compagnie aérienne taïwanaise StarLux Airlines. Résultat des courses : la dynamique est désormais nettement en sa faveur.
Schématiquement, la période 2014-2018 aura en quelque sorte été une phase de transition, avec le déploiement de nouveaux programmes et des coûts de développement considérables. Celle qui s’ouvre s’annonce toutefois bien différente, avec une montée en puissance desdits programmes qui compense très largement l’arrêt de la production du légendaire, mais insuffisamment rentable A380, prévu pour 2021.
Une valeur au profil de plus en plus défensif
Au vu des carnets de commandes, copieusement garnis, tout porte en effet à croire que les autres blockbusters du groupe, au premier rang desquels l’A320 « NEO » déjà cité et l’A350XWB, encore lui, devraient poursuivre sur leur formidable lancée.
Dans l’immédiat, 2019 devrait être encore un bon cru avec près de 900 livraisons au programme, mais on peut se demander si l’action est en mesure de continuer à cette folle cadence au cours des prochaines semaines.
Pour ma part, je me dois de souligner qu’elle commence à être chère avec un PER de 21, ce qui est nettement supérieur au PER de 15 de l’ensemble du CAC40. Un ami analyste, spécialiste du secteur et qui officie dans une grande banque londonienne, a toutefois balayé cet argument. « Tu poses mal le problème ! Nous sommes face à un duopole entre Boeing et Airbus, et surtout dans un marché de croissance perpétuelle. Tu peux tabler sur une augmentation annuelle de l’ordre de 3,5% du trafic passagers sur les deux prochaines décennies. Et je vais même te dire qu’Airbus peut maintenant être considéré comme une valeur défensive, au même titre que les spécialistes des maisons de retraite ».
Comme j’étais à court d’arguments, je me suis penché sur les chiffres ce week-end, et force est d’admettre que tout va dans le sens de mon ami. L’IATA prévoit par exemple un total de 8,2 milliards de passagers en 2037, soit un doublement par rapport aux 4,1 milliards recensés l’an passé. Sur le plan géographique, la Chine deviendra par ailleurs le premier marché aérien mondial devant les Etats-Unis, l’Inde et l’Indonésie.
De quoi permettre à Airbus Group d’engranger encore de nombreuses commandes, même si je persiste à penser qu’après sa chevauchée fantastique, le titre doit consolider, du moins à court terme. En revanche, il ne me paraît pas judicieux d’être vendeur à découvert sur la valeur.