Publié à l'origine sur la Bourse au quotidien.fr
Un calme précaire – à moins qu’il s’agisse d’un simple rebond technique initial – succède ce jeudi au coup de froid polaire qui s’est abattu hier sur les places boursières européennes.
La séance de mercredi, caractérisée par des reculs de 3% en moyenne des principaux indices du Vieux Continent, tandis que Wall Street perdait 2%, a en effet été la pire depuis le 23 août. Un coup de semonce d’autant plus étonnant qu’à peine 48 heures plus tôt, il n’était question que de l’été indien qui ramenait les actions au contact de leurs précédents plus hauts absolus de fin avril ou du 25 juillet.
Les plus optimistes se félicitaient également que le pétrole soit retombé en moins de quinze jours sous ses niveaux du 13 septembre (vers 52,5$, contre 55$), avant le bombardement (d’ailleurs toujours pas formellement élucidé) des deux sites de production de Saudi Aramco.
Cet incident s’était rajouté à l’interminable feuilleton de la guerre commerciale sino-américaine, à une hausse du dollar honnie par Donald Trump ou encore aux incertitudes liées au Brexit. Autant d’éléments négatifs digérés par les marchés comme s’il s’était agi d’un élixir de jouvence qui les avaient à chaque fois propulsé vers des sommets toujours plus vertigineux.
Les facteurs anxiogènes n’avaient déjà eu de cesse de se succéder depuis le début de l’été et ils n’ont pas tardé à perturber l’entame du quatrième trimestre… et à retentir comme un mauvais présage à l’orée d’un mois d’octobre que bien des opérateurs superstitieux redoutent.
Si le scénario du mois écoulé a donc déjoué tous les pronostics malgré pléthore d’ombres au tableau, alors vivement les prochaines mauvaises nouvelles pour démarrer octobre du bon pied. Dans les faits, celles-ci n’ont pas tardé et elles ont pour le coup été très fraîchement accueillies.
Peur sur l’économie américaine
En premier lieu, l’indice ISM manufacturier est ressorti à 47,8 points en septembre, son plus mauvais score depuis dix ans, après 49,1 points en août et alors que les économistes tablaient au contraire sur une hausse à 50,3 points.
Le rapport mensuel d’ADP (PA:ADP) sur l’emploi privé a en quelque sorte achevé de couper les jambes des investisseurs, faisant état de 135 000 créations de postes le mois dernier, un chiffre grosso modo conforme aux anticipations et dont ils ne se sont pas formalisés. Non, ce qui leur a vraiment déplu, c’est la forte révision à la baisse du chiffre d’août à 157 000, alors que le cabinet de ressources humaines avait originellement annoncé 195 000 nouveaux emplois privés.
Pourtant, bien d’autres combinaisons statistiques pré-récessionnistes du même acabit de part et d’autre de l’Atlantique n’avaient jusqu’ici pas provoqué de séisme boursier de cette ampleur, voire pas de séisme du tout !
Gardons en mémoire les nombreuses occasions précédentes durant lesquelles des séries de chiffres totalement à rebours du consensus – et donc de nature à plonger les marchés dans la déprime – ont débouché en quelques heures sur une vague d’euphorie qui ont pris tous les vendeurs à contrepied.
Reste qu’il n’en fallait pas davantage pour raviver les spéculations sur de nouvelles mesures de soutien monétaire de la part des banques centrales… Et qui pourrait douter en ce 3 octobre que la FED cessera de tergiverser lors de sa prochaine réunion et poursuivra son cycle de détente de taux ?
Jusqu’au 30 septembre, la Réserve fédérale pouvait prétendre que ses deux premières baisses de taux estivales étaient préventives et qu’il n’y avait aucun « agenda ». prédéterminé en la matière. L’économie américaine montrait alors des signes de résilience, notamment dans le secteur immobilier et de la consommation des ménages, mais voilà que surgissent (par-delà l’activisme des banques centrales) des craintes de ralentissement économique absolument déprimantes pour les consommateurs. Lesquels prendraient alors conscience que le marché de l’emploi se contracte depuis plusieurs mois et que les banques se montrent plus frileuses et pointilleuses sur la qualité des emprunteurs (il y a tellement de surendettement et de « subprime » dans les prêts à la consommation)…
Ce n’est donc pas un hasard – et c’est très révélateur – de voir Wall Street plombé par le secteur de la distribution avec des écarts moyens supérieurs à -3,5% et des ruptures à la baisse particulièrement brutales sur Kohl’s, Macy’s (-5,8% chacun), L-Brands (-4,9%), Newell Brands (NASDAQ:NWL) (-4,5%) ou encore Best Buy (-4,4%).
Dans un tout autre registre, Donald Trump a organisé une conférence de presse mercredi matin qui a rapidement pris une tournure chaotique et s’est terminée en affrontement avec la presse, accusée d’être « corrompue » au sujet de l’affaire du coup de fil avec son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky.
Le président américain a publié pas moins de 85 tweets à ce sujet en à peine 24 heures ! Un record absolu.