Publié à l'origine sur la Bourse au quotidien.fr
Cela fait des semaines que ceux qui dénoncent un marché boursier « absurdement surévalué » se font moquer.
Pourquoi la correction de la semaine dernière (-3% en moyenne pour le S&P500 et le Dow Jones) ne précèderait-elle pas un rebond vers de nouveaux sommets cet été ?
Le S&P500 a reperdu -7,5% depuis le 8 juin, et il revient s’appuyer sur son plancher des 11,12 et 15 juin derniers : c’est sûrement un bon point d’entrée.
Christine Lagarde a déclaré que le pire de la crise est derrière nous, Larry Kudlow continue de défendre la thèse de la reprise en « V » : comprenez que l’économie va retrouver sa vitesse de croisière bien plus tôt que l’attendait le consensus…aidée par les milliers de milliards de dollards mobilisés pour la relance.
En France, la totalité des plans de soutien annoncés avoisine 22% de notre PIB (30 à 33% aux Etats-Unis), sans compter les 750 Mds€ du plan de soutien de l’Europe dont la France devrait récupérer quelques miettes.
Sur le papier, le passif et l’actif semblent se compenser mais ce n’est qu’une illusion : nous savons depuis la fin des années 90 et le début de la monétisation de la dette japonaise que l’argent des banques centrales subit l’attraction des actifs virtuels et évite autant que possible de s’enliser dans l’économie réelle où les profits s’inscrivent dans le temps long.
Pendant des décennies, les rythmes de croissance des sphères virtuelle et réelle étaient comparables, c’est ce qui a fait la fortune des actionnaires de Warren Buffett (Berkshire Hathaway), apôtre du type de gestion « Buy & Hold » de Berkshire Hathaway.
Aujourd’hui, c’est le « day trading », le « trend following » qui semblent garantir le succès des investisseurs.
Il est indifférent de prendre position à l’achat ou à la vente parce que de toute façon, c’est pour quelques heures et qu’à la fin la journée, il vaut mieux avoir ramené son exposition à zéro.
Si une nouvelle tendance émerge et qu’elle s’établit solidement à la baisse, les ventes à découvert pourraient constituer le symétrique de la phase haussière (20 séance de hausse sur 23 pour le Nasdaq) pré-23 juin… à cette nuance près: les indices montent par l’escalier et redescendent par l’ascenseur.
La FED a t-elle grillé toutes ses cartouches pour maintenir les marchés en lévitation ?
La FED continue sans aucun doute à faire la pluie et le beau temps, parfois à 24H d’intervalle : au lendemain du feu vert à l’assouplissement de la Volcker Rule (cette règle garantit la séparation des activités bancaires, notamment les activités de trading, de banques de détail et d’assurance) qui avait euphorisé les banques d’affaires, elle a douché l’ensemble des valeurs financières en publiant un communiqué jeudi soir faisant la synthèse des stress tests (revue des capacités à encaisser le choc du Covid-19).
Mais ces résultats ont été éclipsés par des “ajouts” de la FED qui interdit les rachats de titres (buybacks) par les banques au 3ème trimestre, qui prône aussi la suspension des dividendes et la modération des “bonus”, d’où des rechutes de -8% à -9% sur Keycorp (NYSE:KEY), Capital One, Goldman Sachs (NYSE:GS), Regions Fnl et Comerica, Fifth Third Bancorp (NASDAQ:FITB), Citizens Fnl, Wells Fargo…
Et le temps se gâte brusquement sur le Nasdaq pour quelques GAFAM emblématiques : Facebook (NASDAQ:FB) -8,3%, Alphabet (NASDAQ:GOOGL) -5,8%, Apple (NASDAQ:AAPL) -3%, Amazon (NASDAQ:AMZN) et Microsoft (NASDAQ:MSFT) -2%…. qui représentent à eux cinq pas moins de 50% de la capitalisation du Nasdaq100.
Inutile de se demander quelle sera l’orientation de Wall Street si les cinq titans se mettent à enchainer les séances “d’ajustements à la baisse”.
La logique du suivi de tendance a ceci d’implacable : elle est 100% réversible et les vendeurs n’ont pas plus d’états d’âme à appuyer sur le bouton “rez-de chaussée” que les acheteurs sur “rooftop” lorsque l’ascenseur redescend.