par Marine Pennetier
PARIS (Reuters) - L'accord de principe de 14 pays de l'Union européenne - dont huit de manière "active" et "immédiate" - sur un mécanisme de répartition plus efficace des migrants secourus en Méditerranée est accueilli avec prudence par les ONG, qui réclament de longue date une approche concertée et un dispositif plus large et plus prévisible.
Quatre jours après une première réunion à Helsinki, la question des migrations, source régulière de crispation entre pays européens notamment avec l'Italie qui se plaint d'avoir à gérer seule l'afflux sur ses côtes, a fait lundi l'objet d'une nouvelle rencontre informelle entre ministres européens de l'Intérieur et des Affaires étrangères à Paris.
A cette occasion, Emmanuel Macron a fait savoir que 14 Etats membres avaient donné leur "accord de principe" sur l'initiative franco-allemande visant à mettre en place un "mécanisme de solidarité" automatique et rapide de répartition des migrants entre Etats membres.
Parmi ces 14, huit Etats membres ont "de manière active" acté de leur coopération et donc de leur participation, selon le chef de l'Etat français. Selon l'Elysée, ce "club de volontaires" comprend à ce stade la France, l'Allemagne, la Finlande, le Luxembourg, le Portugal, la Lituanie, la Croatie et l'Irlande.
Le nom des six autres pays "intéressés" par ce mécanisme de répartition "systématique, rapide et digne" des migrants secourus par des navires d'ONG en Méditerranée, n'a pas été dévoilé mais les négociations se poursuivent avec l'objectif d'aboutir à un accord formel à Malte début septembre.
"PAS POSITIF"
"Cela semble être un pas positif dans la bonne direction mais il faut vraiment avoir davantage de détails sur l'accord", a réagi Judith Sunderland, directrice adjointe pour l'Europe et l'Asie centrale de l'organisation Human Rights Watch (HRW), sur Twitter.
Même prudence à Médecins sans Frontières (MSF), qui a annoncé lundi avec SOS Méditerranée la reprise d'ici fin août de ses opérations de secours aux migrants au large des côtes libyennes.
"Nous saluons les annonces publiques suite à cette réunion qui, si l’accord de principe à un 'mécanisme de solidarité' de répartition est respecté, permettra de mettre les rescapés en sécurité plus rapidement dans un lieu où leurs vies ne sont pas en danger, où ils peuvent accéder à une assistance et voir leurs demandes d’asile étudiées", a déclaré à Reuters François Dumont, porte-parole de l'ONG.
"En revanche, le soutien des Etats européens aux garde-côtes libyens (...) pour intercepter dans une vaste zone de la Méditerranée, eaux internationales comprises, les personnes qui fuient la Libye et ses exactions et les ramener en détention demeure la norme, et c'est précisément cette contradiction aux conséquences terribles qui n’est plus tenable aujourd’hui", a-t-il ajouté.
Pour Berlin et Paris, l'objectif est de pallier les lacunes du mécanisme de répartition mis en place à l'été 2018 et d'éviter la répétition de scènes qui ont rythmé l'actualité - des centaines de migrants à bord de navires d'ONG contraints d'attendre pendant des heures voire des jours qu'une capitale européenne accepte de leur ouvrir ses ports pour débarquer.
"DISCUSSIONS PROMETTEUSES"
"Le problème, c'est que la répartition actuelle est chaotique et beaucoup trop longue, qu'on la pratique avec trop peu d'Etats", souligne-t-on à Paris. "Le but c'est donc d'aller toujours dans cette direction mais avec un mécanisme stable, pérenne et beaucoup plus large."
"En gros, aujourd'hui, ce n'est quasiment que la France et l'Allemagne qui font les répartitions des passagers des bateaux, et Malte fait l'effort de débarquement", ajoute-t-on. "Il faut que le maximum d'Etats de l'UE participent à ces relocalisations".
Pour le Haut commissaire des Nations unies pour les réfugiés Filippo Grandi et le directeur général de l'organisation internationale pour les migrants (OIM) Antonio Vitorino, "les discussions" entre membres de l'Union européenne "sont prometteuses".
"Nous encourageons ces pourparlers à progresser encore. Il est dans l’intérêt de tous d’adopter une approche concertée face à cette situation", ont ajouté les deux dirigeants dans une déclaration conjointe publiée à l'issue de leur entretien lundi avec Emmanuel Macron à l'Elysée.
(Edité par Sophie Louet)