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Chine: des réformes économiques sur la touche, le Premier ministre aussi

Publié le 17/10/2017 12:19
Le Premier ministre chinois Li Keqiang, à Pékin, le 19 septembre 2017 (Photo FRED DUFOUR. AFP)

Le Premier ministre chinois Li Keqiang, à Pékin, le 19 septembre 2017 (Photo FRED DUFOUR. AFP)

Chargé de piloter la deuxième économie mondiale, le Premier ministre chinois Li Keqiang a vu son autorité se dissoudre, ses promesses d'ouverture et de réformes n'ayant pas résisté à la centralisation de l’État-parti sous la présidence de Xi Jinping et à l'envolée de la dette du pays.

En 2013, peu après son entrée en fonction, Li Keqiang enthousiasmait les dirigeants d'affaires à l'édition chinoise du Forum économique mondial: il promettait un traitement "équitable" aux firmes étrangères, un rôle accru au marché et des réformes structurelles en faveur du privé.

Alors que débute mercredi le Congrès quinquennal du Parti communiste (PCC) au pouvoir, l'euphorie s'est évaporée. "Il y a clairement une grande déception", indique à l'AFP Christopher Balding, professeur de l'Université de Pékin à Shenzhen.

"La Chine est beaucoup plus centralisée qu'il y a cinq ans. Cela devient très compliqué d'arguer qu'elle est vraiment prête à ouvrir son économie", insiste-t-il.

Les entreprises étrangères se plaignent de discriminations drastiques dans certains secteurs, tandis que Washington et Bruxelles dénoncent volontiers le protectionnisme du géant asiatique.

Si le président Xi Jinping se fait le chantre de la mondialisation, la Chambre de commerce européenne à Pékin évoque elle une "lassitude" face aux "engagements jamais concrétisés".

Li Keqiang, 62 ans, "s'est démené pour défendre ses vues réformistes" et rogner l'emprise des entreprises d’État, mais "clairement il n'a guère eu d'influence", notent les experts de l'Economist Intelligence Unit.

La "zone franche" de Shanghai, inaugurée en fanfare en 2013 comme "laboratoire" de ses réformes, n'a ainsi jamais décollé.

Doté d'un profil rassurant d'économiste anglophone, Li Keqiang s'est vu rapidement éclipsé par un Xi Jinping avide de cimenter le pouvoir du Parti. De l'avis général, il devrait conserver son poste à l'issue du Congrès... mais sans davantage d'autorité.

- 'On l'a marginalisé' -

"Il ne fait pas d'ombre à Xi" car "on l'a marginalisé, en lui prenant la plupart de ses compétences", observe Jean-Pierre Cabestan, de l'Université baptiste de Hong Kong.

Appuyé par son conseiller économique Liu He, Xi Jinping préside la commission pilotant les affaires financières et économiques, ainsi qu'un puissant comité nouvellement créé, dévolu aux réformes.

Pour Jean-Pierre Cabestan, cet empiètement a pu contribuer "au cafouillage dans la gestion de la crise boursière de l'été 2015", quand les autorités semblaient incapables d'enrayer l'effondrement des marchés.

Les deux dirigeants semblent également avoir divergé sur l'envolée de la dette, les proches de Xi Jinping se montrant plus prompts à y reconnaître un risque majeur de déstabilisation.

En juillet, le président Xi en personne sonnait la charge contre les risques financiers résultant d'un endettement intenable, sur fond d'avertissements du Fonds monétaire international.

"Xi ayant désormais assis son autorité" sur le Parti, il pourra "utiliser sa position pour imposer les décisions nécessaires pour contrer la dette", juge l'Economist Intelligence Unit. D'autant qu'érigé en "noyau dirigeant" du PCC, Xi Jinping devient comptable des performances économiques.

D'autres demeurent circonspects: "La Chine va probablement continuer de donner la priorité à la croissance plutôt qu'à la réduction de l'endettement" afin de préserver l'activité, estime Christopher Balding.

- Contrôle de l’État -

Certes, Xi Jinping sera en position d'accélérer les réformes, mais cela ne changera pas sa "réticence à desserrer le contrôle de l’État" sur l'économie, renchérit Julian Evans-Pritchard, de Capital Economics.

Pékin s'efforce justement de renforcer ses groupes étatiques, fusionnant certains pour former des champions nationaux --dans le rail ou l'énergie-- et ouvrant leur capital aux investisseurs privés.

Mais ces réformes censées accroître leur efficacité "n'empêchent pas l’État d'y maintenir une ingérence excessive (...) souvent au détriment des performances" et ne prévoient pas de faillite pour les firmes en difficulté, déplore Julian Evans-Pritchard.

Dans le même temps, le Parti apparaît soucieux de conforter son contrôle du secteur privé, via les cellules qu'il possède dans chaque entreprise --y compris étrangère.

Autres aspects de cette reprise en main: le gouvernement a décidé de juguler les investissements à l'étranger des grands conglomérats privés, et voudrait même, selon le Wall Street Journal, entrer au capital de géants de l'internet.

"L'objectif-clé (du régime) reste de solidifier le système politico-économique existant", résume Louis Kuijs, d'Oxford Economics. "Ce n'est guère compatible avec des réformes audacieuses", ni avec "un désendettement à marche forcée".

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