PARIS (Reuters) - La reprise dans le secteur de la construction en France, bien qu'indéniable, pourrait commencer à être bridée dès l'an prochain sous l'effet d'une hausse des taux qui entamera le pouvoir d'achat immobilier des ménages, estime la Coface dans une note publiée vendredi.
Confiant pour l'activité du secteur à court terme (à un horizon de neuf à douze mois), l'assureur se montre plus dubitatif pour les perspectives à moyen terme et s'attend à une inversion de tendance pour les défaillances dans le secteur, qui étaient reparties à la baisse en 2016.
Après avoir progressé en moyenne de 4,2% par an entre 2008 et 2014, les défaillances d'entreprises dans la construction ont diminué de 6,8% en 2016 et devraient selon Coface reculer de 7,7% cette année.
Malgré cette nouvelle baisse des défaillances dans le secteur sur l'ensemble de l'année, les premiers signes d'un retournement devraient se manifester dès le second semestre, a expliqué Paul Chollet, économiste de l'assureur-crédit, lors d'une conférence de presse.
Les incertitudes pour 2018 sont principalement liées au resserrement attendu l'an prochain de la politique monétaire de la Banque centrale européenne, sous l'effet de la remontée de l'inflation et de l'amélioration de la conjoncture. Avec pour conséquence la disparition de l'un des principaux facteurs de soutien du secteur: les taux bas.
"TROU D'AIR"
Selon le scénario retenu par les économistes de la Coface, le taux d'intérêt moyen des crédits à l'habitat devrait par conséquent atteindre 2,2% en décembre prochain et grimper à 3% fin 2018 (contre 1,51% à fin mars d'après les données de l'Observatoire Crédit logement-CSA).
Frédéric Wissocq, responsable de l'arbitrage pour la branche construction chez Coface, a expliqué lors d'une conférence de presse s'attendre à "un trou d'air", dans le sillage des "effets d'aubaine" qui soutiennent actuellement la demande d'investisseurs et d'acquéreurs ayant à l'esprit la perspective cette remontée des taux.
L'évolution de l'activité de la construction l'an prochain dépendra aussi largement des décisions que prendra le prochain exécutif pour un secteur dont le rétablissement a grandement bénéficié des incitations fiscales comme le prêt à taux zéro (PTZ, prêt aidé par l'Etat pour faciliter l'accession à la propriété des personnes aux revenus modestes) ou le dispositif Pinel par exemple (qui permet d'obtenir des réductions d'impôts pour l'achat d'un bien immobilier neuf mis en location pendant au moins six ans).
Au-delà de la disparition de ces facteurs ayant alimenté la reprise, le secteur de la construction présente d'ores et déjà des fragilités internes, a expliqué Frédéric Wissocq.
Il a notamment souligné que l'activité de rénovation-entretien - qui représente près de 60% de l'activité dans la construction hors travaux public - reste atone, l'incertitude économique et politique incitant les ménages à l'attentisme.
Dans les travaux publics, le "frémissement" est surtout lié aux grands travaux, notamment ceux du Grand Paris. Mais le moteur traditionnel du secteur, la demande des collectivités locales, reste à la peine.
Frédéric Wissocq a également rappelé que "c'est paradoxalement au moment où l'activité repart que les entreprises dans des situations fragiles peuvent avoir le plus de problèmes de liquidités en trésorerie".
Pour faire face à la demande, elles doivent financer la reprise de leur activité, ce qui passe souvent par le crédit bancaire.
"Quand on est une petite entreprise fragile qui est dans un secteur qui a énormément souffert, c'est plus difficile pour obtenir ce financement", a-t-il indiqué en rappelant que la grande majorité des entreprises de la construction comptent moins de dix salariés.
(Myriam Rivet, édité par Sophie Louet) OLFRBUS Reuters France Online Report Business News 20170421T162629+0000