Nicolas Sarkozy a enterré jeudi soir l'idée de taxer la résidence principale dans le cadre de la réforme de la fiscalité du patrimoine, une piste controversée qu'il avait lui-même évoquée quelques semaines plus tôt.
"Je suis opposé à la taxation des plus values sur la résidence principale", a déclaré le chef de l'Etat lors de l'émission "Paroles de Français" sur TF1.
Il a justifié son revirement sur cette question sensible par "une raison assez simple": "Les gens, leur rêve c'est d'être propriétaires. On se dit, si demain je tombe malade ou si je perds mon emploi, déjà si je suis propriétaire de mon appartement, au moins je serai pas mis dehors", a-t-il dit.
"Quand on est propriétaire la première fois, on vend son logement pour acheter un plus grand parce qu'il y a un enfant qui arrive dans la famille, et naturellement, c'est la plus-value qu'on fait qui permet d'acheter", a poursuivi M. Sarkozy avant de trancher: "c'est une voie que je ferme".
C'est pourtant lui qui avait lancé ce ballon d'essai la première fois il y a quelques semaines.
"Quand vous achetez un appartement, quand vous achetez une maison, la plus-value est réalisée au moment où vous la vendez. C'est à ce moment-là qu'il faut taxer, pas au moment de la détention", soulignait-il en janvier.
Le député UMP Jérôme Chartier avait aussi défendu cette idée, mais plaidait pour un périmètre plus restreint, estimant que la taxation des plus-values sur la résidence principale, actuellement défiscalisées, ne devait concerner que les ventes dépassant 1,2 million d'euros, pour épargner les classes moyennes.
Peu compatible avec l'ambition de faire émerger une "France de propriétaires" - promesse phare de Nicolas Sarkozy lors de la campagne présidentielle de 2007 -, le projet suscitait toutefois de nombreuses réserves de la classe politique, y compris au sein de la majorité.
Le ministre du Budget et porte-parole du gouvernement, François Baroin, avait exprimé ses réticences: "La question de la taxation de la plus-value concernant la résidence principale peut avoir des impacts sur le marché immobilier, sur la mobilité des gens", avait-il souligné.
Le patron des députés UMP, Christian Jacob, avait exprimé plus directement encore son opposition "de principe". "La résidence principale n'est pas un bien comme les autres. On n'est pas sur de la spéculation, mais sur ce qui se construit toute une vie et que l'on a à coeur de pouvoir transmettre à ces enfants", avait-il déclaré.
De nombreux professionnels de l'immobilier ont eux aussi dénoncé une "fausse bonne idée", une "proposition incohérente", risquant d'entraîner une hausse des prix.
Le gouvernement et une vingtaine de parlementaires de la majorité planchent actuellement sur la future réforme de la fiscalité du patrimoine, annoncée pour le printemps.
Elle alliera la suppression du bouclier fiscal, l'aménagement voire la disparition de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et la création d'un nouvel impôt sur les revenus et plus-values du patrimoine.
Jusqu'ici le gouvernement s'est borné à assurer qu'aucune piste n'était exclue.
Hormis la taxation de la résidence principale, plusieurs idées ont été évoquées comme le relèvement du seuil d'imposition de l'ISF ou l'augmentation de l'abattement (30% actuellement) sur la résidence principale. Certains souhaiteraient ne plus soumettre la résidence principale à l'ISF.
Une surtaxation des plus-values de placements est aussi à l'étude.