Les autorités chypriotes étaient engagées mercredi dans d'intenses efforts pour préparer la réouverture des guichets bancaires, prévue jeudi après douze jours de fermeture, la situation confuse continuant d'affaiblir l'euro.
"Les indications vont dans le sens d'une réouverture jeudi des banques", a déclaré une porte-parole de la Banque Centrale, Aliki Stylianou sans toutefois donner davantage d'assurances alors que leur réouverture a déjà été repoussée à deux reprises.
Aucune indication n'a été donnée quant à l'ouverture des guichets de la Laïki (Popular Bank en anglais) et de la Bank of Cyprus, les deux principales banques de l'île et celles concernées par l'accord conclu entre les autorités chypriotes et ses créanciers de la troïka (UE, BCE, FMI).
Celui-ci prévoit la liquidation de Laïki et l'absorption d'une partie de ses activités par Bank of Cyprus.
Selon une source européenne, "il est très improbable que Bank of Cyprus et Laiki rouvrent demain" jeudi.
"Ce sera déjà très bien si toutes les autres banques rouvrent, c'est très compliqué à mettre en place", a expliqué cette source, ajoutant que concernant la Laïki, il s'agit "d'organiser comment les dépôts jusqu'à 100.000 euros, qui doivent être transférés à Bank of Cyprus, pourront être accessibles."
"Bank of Cyprus ne devrait pas non plus rouvrir tout de suite, il y a trop de travail encore pour mettre en place techniquement les contrôles administratifs pour éviter les fuites de capitaux", a affirmé cette source.
Dans un tel contexte, la crise chypriote continuait de peser sur l'euro qui évoluait vers 12H30 GMT autour de 1,2780 dollar, soit ses plus bas niveaux depuis quatre mois.
"Les cambistes restent tendus avant la réouverture des banques chypriotes", notait Omer Esiner de Commonwealth Foreign Exchange. Selon lui, un mouvement de panique à l'ouverture des guichets "pourrait compliquer les efforts des responsables politiques pour stabiliser les marchés".
"Chaque jour où le système bancaire est fermé, la confiance des gens baisse et ils veulent retirer leur argent, alors nous sommes obligés d'imposer des restrictions" aux mouvements de capitaux, a expliqué le président de la Banque centrale Panicos Demetriades.
Actuellement, les clients de Bank of Cyprus et de Laïki Bank ne peuvent retirer respectivement que 120 et 100 euros par jour.
Une certaine confusion régnait également au niveau de la direction de Bank of Cyprus. Le président de cette banque, Andreas Artemis, a démissionné mardi mais le conseil d'administration a rejeté cette décision, ce qui devrait la reporter d'une semaine.
Mercredi, c'est le directeur exécutif de cette banque qui a été limogé à la demande de la troïka, selon l'agence chypriote CNA.
Le président conservateur Nicos Anastasiades, qui a succédé il y a moins d'un mois au communiste Demetris Christofias, a fait part de son intention de mettre en place une commission chargée de déterminer les responsabilités dans le désastre qui frappe le système bancaire et l'économie chypriote.
De nombreuses entreprises chypriotes peinent à fonctionner normalement, et certaines d'entre elles risquent d'être rapidement "poussées à la faillite", selon la chambre de commerce chypriote.
Et l'inquiétude grandit sur l'île déjà en récession depuis deux ans. Mardi des lycéens se sont rassemblés devant le palais présidentiel pour exprimer leur inquiétude.
Le puissant parti communiste Akel a appelé à manifester mercredi soir devant le palais présidentiel contre le plan de sauvetage.
Les mesures prises pour empêcher la fuite des capitaux vont également viser les comptes détenus à Chypre par des étrangers, notamment russes. Les avoirs russes à Chypre dépassent 20 milliards d'euros, selon les estimations de Moody's, et vont être fortement amputés par les mesures du plan de sauvetage.
Dans un entretien au Financial Times, le ministre chypriote des Finances Michalis Sarris a souligné que ces contrôles seront mis en place pour une première période de sept jours, suivie d'une évaluation, et que certaines banques pourraient en être exemptées.
Il a précisé que des banques étrangères n'ayant pas de problèmes de liquidités et accueillant des fonds "en transit" venus de l'étranger et repartant hors du pays pour effectuer des paiements ou d'autres opérations courantes, pourraient être exemptées.
En Grèce, pays qui entretient comme la Russie d'étroits liens économiques et culturels avec Chypre, les agences des trois filiales grecques de Bank of Cyprus, Laïki et Hellenic Bank, la troisième banque chypriote, ont rouvert leurs portes mercredi, après être passées mardi sous contrôle de l'établissement grec Banque du Pirée (Piraeus Bank).
A Londres, où vivent de nombreux Chypriotes, les agences de Bank of Cyprus et Laïki restaient ouvertes. Interrogée par l'AFP, Bank of Cyprus assurait toutefois qu'il n'était pas possible de retirer dans les agences de sa filiale britannique des fonds bloqués à Chypre.