Face à la pression des syndicats, en particulier de la CGT qui a relancé en octobre un mouvement de grève des travailleurs sans papiers, le gouvernement tente de reprendre la main sur le dossier, en s'attaquant en premier lieu aux entreprises qui les emploient.
Le ministre de l'Immigration, Eric Besson, a précisé lundi qu'il présenterait en Conseil des ministres avant la fin décembre ou début janvier un texte sur ce point, précisant des propos qu'il avait tenus dimanche ainsi que son collègue du Travail, Xavier Darcos.
Ce dernier avait menacé de "fermetures administratives" les entreprises employant des travailleurs sans papiers.
Eric Besson a précisé lundi que les fermetures pourraient concerner "des établissements et pas les entreprises elles-mêmes".
"Il faudra que la mauvaise foi soit démontrée, il faudra bien évidemment que les chiffres soient conséquents: si vous avez un établissement de 1.000 personnes et que vous identifiez un étranger en situation irrégulière qui aurait été employé, vous vous doutez bien qu'il y a une question de proportion", a-t-il expliqué.
"Simplement, a-t-il poursuivi, les chefs d'établissement qui emploieraient, en en étant conscients ou en ayant fraudé des étrangers en situation irrégulière, savent qu'après le vote de cette loi, ils seront particulièrement sanctionnés", a ajouté le ministre de l'Immigration.
Depuis six semaines, se mène une campagne d'occupation de chantiers et de sociétés d'intérim par les sans-papiers exigeant leur régularisation, à l'initiative de la CGT qui comptabilise aujourd'hui plus de 5.200 grévistes dans 1.800 entreprises.
Depuis le 22 octobre, le ministère de l'Immigration tient des réunions techniques avec les syndicats autour d'un nouveau projet de circulaire portant sur les conditions de régularisation.
M. Darcos avait annoncé dimanche qu'il réunirait jeudi la Commission nationale de la lutte contre le travail illégal (partenaires sociaux et corps de contrôle).
Ces intitiatives ont suscité des réactions au PS et dans le patronat, jusqu'à présent discrets.
Après Martine Aubry, ce week-end, pour qui "ces milliers de sans-papiers qui sont aujourd'hui exploités dans les entreprises et qui font grève doivent avoir leurs papiers", Laurent Fabius a estimé lundi que les régularisations devaient se faire sur "des critères objectifs : être en France depuis une certaine période, ne pas avoir de condamnation, être intégré".
Le Medef a condamné lundi "avec la plus grande fermeté le travail non déclaré ou l'emploi de +sans-papiers+ en toute connaissance de cause". Et la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) a estimé que "toute sanction prise de manière uniforme sans tenir compte des circonstances serait forcément injuste et risquerait de constituer une double peine pour les entreprises".
Les deux organisations estiment que les employeurs malhonnêtes sont minoritaires et que les autres n'ont pas les moyens de déjouer les "tromperies".
Un argument que balaient nombre de sans-papiers grévistes qui, sur les sites qu'ils occupent, expliquent que leurs employeurs, souvent des entreprises d'interim, savaient clairement que les papiers qu'ils présentaient lors de l'embauche soit étaient faux soit appartenaient à d'autres.
Francine Blanche de la CGT, estime à "au moins 400.000 le nombre de travailleurs sans-papiers, sans compter l'aide à la personne".
Elle dénonce une "double hypocrisie": "les grands donneurs d'ordre qui disent +on ne sait pas +, c'est qu'ils n'ont pas voulu aller regarder".