Après les recettes de l’État, l'Assemblée nationale s'attaque mardi au budget de la Sécu 2018, le gouvernement parlant d'un budget de "responsabilité" et de "solidarité" quand la gauche et certains à droite dénoncent "l'injustice" de la hausse de la CSG.
Sitôt le volet recettes du projet de loi de finances adopté en première lecture, ce qui doit être le cas mardi en milieu d'après-midi, les députés vont plancher sur les 57 articles du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), le premier du quinquennat Macron. Un millier d'amendements sont au menu jusqu'à vendredi, voire jusqu'au lundi 30 octobre.
Pour le rapporteur général Olivier Véran (LREM), c'est le budget "des engagements tenus et du pouvoir d’achat".
Au prix d'économies dans le domaine de la santé, le déficit de la Sécu doit être réduit à 2,2 milliards d'euros l'année prochaine, niveau inédit depuis 17 ans. La ministre de la Santé Agnès Buzyn vante l'engagement dans "une trajectoire du retour à l'équilibre en 2020".
Le régime général (maladie, retraites, famille, accidents du travail) serait en léger excédent de 1,2 milliard en 2018. Pour l'atteindre, la branche maladie devra réaliser plus de 3 milliards d'euros d'économies, via notamment une augmentation de 2 euros du forfait journalier hospitalier et des baisses de prix des médicaments. Il existe une "marge de manœuvre énorme" car "30% des dépenses de l'assurance maladie ne sont pas pertinentes", notamment à l'hôpital, assure Mme Buzyn dans Le Journal du Dimanche.
En même temps, comme promis par le candidat Emmanuel Macron, les cotisations sociales des salariés du privé vont baisser, ce qui se verra sur les feuilles de paie dès janvier.
Mais la mesure sera financée par une hausse de la contribution sociale généralisée (CSG), faisant contribuer en particulier davantage les retraités, ce qui concentre les critiques des opposants.
Des députés LR, Constructifs, ainsi qu'Insoumis et communistes dénoncent un "coup de poignard" sur les retraités et "un impôt injuste, dont l’augmentation va toucher principalement les personnes âgées les plus pauvres". Des socialistes ont tenté, en vain, en commission d'exempter certaines catégories.
- 'Deuxième lame' -
Le groupe Nouvelle Gauche voit globalement dans ce PLFSS "la deuxième lame du budget des riches", accompagnant dans le budget de l’État la transformation de l'ISF ou "la mise en place d'une +flat tax+ pour les +premiers de cordée+".
À l'unisson des ténors de la majorité, le chef de file LREM Thomas Mesnier défend les mesures de "solidarité" notamment prévues par le budget de la Sécu: "soutien aux plus fragiles, en particulier les familles monoparentales, mais aussi les anciens, avec la revalorisation du minimum vieillesse".
Droite et Constructifs (issus de LR et UDI) ne voient pas de "budget de rupture" et regrettent que le gouvernement n’engage pas de "véritables politiques structurelles".
La gauche de la gauche déplore une "religion de la comptabilité".
Plusieurs parlementaires s'attendent à des débats dans l'hémicycle "intenses et politisés", en présence de Mme Buzyn et également du ministre des Comptes publics Gérald Darmanin (toujours membre de LR), devenu le meilleur ennemi de la droite.
Dans les sujets sous les projecteurs, l'idée du rapporteur d'une modulation de la "taxe soda" en fonction du taux de sucre a fait son chemin et l'Assemblée devrait donner son feu vert.
La hausse du prix du tabac ou l’extension de l’obligation vaccinale promettent aussi des temps forts. Concernant les vaccins, les doutes atteignent quelques "marcheurs", telle Blandine Brocard, qui va demander une nouvelle fois un "moratoire" pour permettre "un débat serein".
Au sein du groupe LREM, réunions internes et échanges avec les ministères ont été multipliés en amont pour déminer le débat.
Ainsi, la question hautement sensible d'une possible fin de l'universalité des allocations familiales, pour les réserver aux foyers sous un plafond de ressources, a été renvoyée à une mission d'information de l'Assemblée plus large sur la politique familiale, qui débutera en décembre.
La présidente de la commission des Affaires sociales et ex-socialiste Brigitte Bourguignon, qui entend avec d'autres incarner la "jambe" gauche du projet de M. Macron, a affirmé qu'elle "veillerai(t) à ce que les mesures (portées) garantissent le progrès social".