Une enquête de la CFDT, qui a été débattue jeudi par plusieurs candidats à la présidentielle, "casse des clichés" sur le rapport des salariés au travail, notamment sur la durée légale, la santé, la charge et le management.
"La question du travail est trop souvent absente du débat" politique, a regretté Laurent Berger, lors d'une conférence de presse de présentation des premiers résultats de cette enquête menée auprès de 200.000 personnes, "Parlons travail".
Et quand elle l'est, ce "n'est pas sous des angles qui nous conviennent", les candidats l'abordant soit "sous l'angle exclusif du temps de travail, avec la question des 35 heures, ce qui est réducteur", soit sous celui "des conséquences de la numérisation, donc du volume d'emplois".
Or cette enquête "casse des clichés", en montrant par exemple que le temps du travail "n'est pas une question centrale" pour les salariés, a ajouté Laurent Berger, puisque pour 42% des personnes interrogées, la durée légale du temps de travail "n'est pas le problème".
Jusqu'à 39 heures par semaine, ils sont plus de 65% à penser que les horaires s'accordent bien avec leur vie personnelle. Entre 40 et 47 heures, ils ne sont plus qu'un salarié sur deux à le penser et moins de 30% au delà de 48 heures.
Autre enseignement de l'enquête réalisée en ligne entre septembre et décembre 2016: 77% disent aimer leur travail, être fiers de ce qu'ils font (57%) et ne travaillent pas avant tout pour gagner le plus d'argent possible (54%).
En revanche, elle met en exergue le fait que les salariés se plaignent d'une charge de travail trop importante, qui affecterait négativement leur santé.
Dans le détail, une personne sur trois considère que son travail nuit à sa santé, 44% disent ressentir souvent des douleurs physiques, 34% dorment mal et 36% ont fait un burn out à cause du travail. Et une majorité critique la charge de travail "excessive" et n'a pas le temps de le faire "correctement".
- La CFDT ne soutient aucun candidat -
Dans ce contexte, 97% des personnes interrogées considèrent qu'il est juste de tenir compte de la pénibilité du travail dans le calcul de la retraite, une des idées phares de l'organisation syndicale, mise en place en 2015 par le gouvernement malgré une vive opposition du patronat.
Le manque d'autonomie est la seconde source de mal-être au travail.
"Les gens veulent être davantage consultés sur les décisions qui les concernent dans les entreprises. Cette enquête montre que le modèle de l'entreprise hiérarchique est périmé. Il y a une profonde aspiration à davantage de coopération et de reconnaissance du travail", a analysé M. Berger.
Trois candidats sont venus commenter l'étude.
Benoît Hamon a de nouveau défendu son idée de taxe sur les robots. Il a également appelé à "étendre les pouvoirs des comités d'entreprise" afin qu'ils puissent émettre "un avis conforme en cas d'utilisation de l'argent public", donnant l'exemple du CICE.
De son côté, François Fillon a réaffirmé son intention de mettre fin aux 35 heures. Il a précisé qu'il donnerait aux entreprises au moins un an pour négocier des accords sur le temps de travail, avant de fixer une durée de référence qui s'appliquerait à celles qui n'auraient pas trouvé d'accord.
Emmanuel Macron a de son côté redit sa volonté de "suspendre" le compte pénibilité, qui doit, selon lui, être "adapté" par branche. Il a aussi expliqué qu'il n'aimait pas ce mot qui renvoyait à une notion "doloriste" du travail. M. Fillon, lui, veut supprimer le compte pénibilité, auquel la CFDT tient particulièrement.
Marine Le Pen n'avait pas été conviée, car le Front National présente un "danger", sur les questions "démocratique", "économique" et "sociale", selon le numéro un de la CFDT.
Forte de ces résultats, l'organisation syndicale, qui ne soutient "aucun candidat", a formulé jeudi plusieurs propositions, dont le renforcement du rôle des représentants syndicaux "pour peser dans la stratégie de l’entreprise". Elle souhaite aussi la mise en place du chèque syndical, portée par MM. Macron et Hamon.
Ce dispositif, peu soutenu par les syndicats et le patronat n'a pas réussi à s'imposer. Utilisé de leur propre initiative par une poignée d'entreprises, le "chèque syndical" est un titre de paiement émis par l'employeur à destination du salarié. Il ne peut l'utiliser que pour financer un syndicat dans son entreprise, sans obligation d'y adhérer.