Les actionnaires d'AccorHotels doivent valider mardi en assemblée générale extraordinaire le rachat du groupe d'hotellerie de luxe FRHI et l'arrivée au capital de Qataris et de Saoudiens mais c'est la stratégie d'un actionnaire chinois Jin Jiang qui fait bruisser le secteur.
Numéro 7 mondial, le groupe shanghaien Jin Jiang est déjà propriétaire en Europe de Louvre Hotel Group (Campanile, Kyriad, Golden Tulip...) et s'est invité depuis le début de l'année au capital d'AccorHotels franchissant successivement les seuils de 5% fin janvier, 10% fin février, et enfin 15% fin mai. Ce qui en fait d'ores et déjà le premier actionnaire du groupe français.
Pour autant, le fonds contrôlé par la mairie de Shanghai a plusieurs fois indiqué à l"Autorité des marchés financiers ne pas vouloir prendre le contrôle d'AccorHotels. Ces déclarations à l'AMF l'engagent légalement jusqu'à la fin du mois de novembre. Il peut toutefois le faire jusqu'à mardi matin.
Mais il n'a pas exclu de "continuer de monter au capital", ni de demander à entrer au conseil d'administration du leader européen du secteur. Cependant à deux jours de l'AGE, il n'a toujours pas officiellement formulé de demande pour avoir un ou plusieurs représentants au conseil d'administration.
"Je ne vois aucune raison pour que Jin Jiang s'arrête là", assure un analyste du secteur, qui souhaite garder l'anonymat. "Ils ne sont qu'à 15,06% mais on pourrait les voir rapidement entre 20 et 30%. C'est un pari que je fais car Colony et Eurazeo (PA:EURA) (actionnaires à 11% à eux deux, NDLR) sont plutôt vendeurs, les Qataris et les Saoudiens ne sont pas forcément là ad vitam eternam", lance-t-il à l'AFP.
Derrière Jin Jiang, on retrouve au capital les fonds souverains qatari (Qatar Investment Authority) et saoudien (Kingdom otelsHolding Company of Saudi Arabia, propriété du prince saoudien Al Walid ben Talal) qui, une fois le rachat de FRHI validé par les actionnaires de AccorHotels, auront respectivement 10,5% et 5,8%. Viennent ensuite les deux actionnaires historiques, le fonds Colony Capital (5,90%) et la société d'investissement Eurazeo (5,18%), tous deux voués à quitter le capital à moyen terme, selon différentes sources du secteur.
Selon cet analyste, le groupe chinois a fait "il y a plusieurs semaines une offre de rachat des 11,08% détenus de concert par le fonds Colony Capital et la société d'investissement Eurazeo, de quoi déjà porter à 26,1% sa participation".
- 'Jin Jiang et Bazin en discussion' -
Jin Jiang "propose aux deux actionnaires historiques autour de 45 euros par action", selon cet analyste. "C'est une question de valorisation: 45 euros est le niveau de cours sur lequel les Qataris et les Saoudiens ont discuté avec Sébastien Bazin (PDG d'AccorHotels) pour déterminer l'augmentation de capital réservé, c'est le point bas sur lequel Colony et Eurazeo sont prêts à réfléchir (pour vendre leurs parts, ndlr) et c'est le niveau des options que Sébastien Bazin a acheté à titre personnel fin 2014, pour 4,5 millions d'euros et qui arrivent à maturité en novembre prochain", affirme le financier.
"Demande de siège ou pas, ce qui est certain c'est que Jin Jiang est actuellement en discussion avec Sébastien Bazin pour un accord de gouvernance, pour mettre les choses au clair, pour limiter la participation du Chinois de manière à ce qu'il n'y ait pas d'OPA", affirme pour sa part un autre analyste, contacté par l'AFP.
Parallèlement, l'Etat français, qui redoute une prise de contrôle rampante, veille. Le président François Hollande, s'est même dit "très attentif" à ce que le capital d'AccorHotels "reste diversifié".
"La Chine a 200 milliards à investir chaque année en croissance externe hors de Chine, l'hôtellerie a été inscrite dans le plan quinquennal comme un secteur stratégique sur lequel il faut prendre des parts de marché et on voit qu'ils sont sur tous les deals des 24 à 36 derniers mois, il y a un vrai sujet et ça ne va pas s’arrêter là", conclut le premier analyste.