par Dominique Rodriguez
PARIS (Reuters) - La bataille pour le contrôle de Darty a pris fin, se soldant par la victoire de la Fnac à l'issue de plusieurs mois de tractations face à son rival Conforama, filiale du groupe sud-africain Steinhoff, qui a jeté l'éponge mercredi matin.
Conforama a renoncé à relever son offre, qui reposait sur un prix de 160 pence par action, signant le second abandon du groupe Steinhoff sur une cible européenne.
"A un prix supérieur, Darty ne créerait plus suffisamment de valeur pour les actionnaires, le personnel et d'autres porteurs de parts de Steinhoff", a souligné dans un communiqué Alexandre Nodale, le directeur général de Conforama.
La Fnac a dit mardi être assurée du contrôle de 51,84% du capital de Darty, dans le cadre de sa dernière offre de 170 pence par action, valorisant le distributeur de produits électroniques et d'électroménager à environ 900 millions de livres (1,16 milliard d'euros).
Ces déclarations mettent fin à une bataille de surenchères qui a culminé le 21 avril avec le dépôt de cinq offres améliorées en moins de 24 heures. Depuis septembre, date des premières approches de Fnac, le prix des offres a doublé.
La Fnac, qui entend se diversifier et atténuer sa dépendance au marché du livre et du disque, face à la concurrence de groupes comme Amazon (NASDAQ:AMZN), a précisé mardi détenir 29,73% du capital de Darty et avoir reçu des engagements irrévocables d'actionnaires de sa cible à hauteur de 22,11%.
Vers 14h50, l'action Fnac cédait 0,65% à la Bourse de Paris après les annonces de son concurrent tandis qu'à Londres, le titre Darty perdait 0,30%, à 168,28 pence l'action, se traitant ainsi en dessous de l'offre de Fnac.
TRACTATIONS
La Fnac s'est lancée dans une opération de rachat d'actions à grande échelle pour asseoir son emprise sur Darty, faisant progresser sa participation de 5,59% entre le 21 et le 26 avril, en achetant 10% du groupe à 170 pence l'action.
"Ils ont appelé les actionnaires de Darty sans arrêt pour les convaincre de leur céder leurs parts. C'était un travail de Titan. Ce qui est étrange, c'est que Steinhoff ait laissé faire", a dit de Fnac une source proche du dossier.
Le directeur général de Conforama a quant à lui déclaré à Reuters: "On n'était pas prêts à faire le deal à n'importe quel prix", ajoutant qu'"au delà de 160 pence, cela pouvait être dommageable au groupe et à ses actionnaires".
Détenteur de Conforama en France et Harveys au Royaume-Uni, Steinhoff envisageait Darty comme un moyen de développer ses activités de vente de meubles en Europe, dans un contexte difficile en Afrique du Sud.
Le groupe contrôle toujours 20,4% du capital de Darty. "On va voir", a dit Alexandre Nodale interrogé sur la vente éventuelle de cette part à Fnac.
"Ce n'est pas la première fois que Steinhoff prend la porte. Ils avaient les capacités financières mais ils ont jugé que le prix était trop élevé", observe un analyste du secteur requérant l'anonymat, qui juge par ailleurs l'opération coûteuse pour la Fnac.
Coté à Francfort et à Johannesburg et valorisé à 21 milliards d'euros, Steinhoff a jeté l'éponge dans les enchères pour le britannique Home Retail, détenteur d'Argos, le 18 mars, laissant les supermarchés J Sainsbury emporter la mise.
Darty, dont le conseil d'administration doit encore accepter l'offre de Fnac, n'a pu être joint dans l'immédiat.
Le groupe, qui effectue 70% de son activité en France et dispose de 400 points de vente en Europe, réalise un chiffre d'affaires annuel de 3,8 milliards d'euros. Parmi ses concurrents, figurent notamment Media-Saturn, filiale du groupe allemand Metro, ainsi que le britannique Dixons.
Outre la nécessité d'un feu vert des autorités de la concurrence française, l'acquisition de Darty par Fnac pourrait rencontrer d'autres obstacles.
Les syndicats du groupe Darty ont dit le 22 avril soutenir l'offre de Steinhoff, jugée plus favorable à l'emploi que celle de Fnac. Cette dernière a estimé à 13 millions d'euros les économies résultant de sa fusion avec Darty.
Fnac a vu sa situation s'améliorer au cours des négociations, avec l'annonce d'un rachat de 15% du groupe par Vivendi (PA:VIV), présidé par le milliardaire breton Vincent Bolloré, qui devrait augmenter son capital de 159 millions d'euros.
Selon deux sources proches du dossier, Fnac s'est également garanti le financement de la transaction par un consortium de banques mené par Crédit Agricole (PA:CAGR), Société Générale (PA:SOGN) et Natixis.
(Julie Carriat pour la version française, édité par Jean-Michel Bélot)