PARIS (Reuters) - Le Front national (FN) ne doit pas se faire d'illusions sur sa véritable force et est loin d'être aux portes du pouvoir, a déclaré Jean-Marie Le Pen.
Le fondateur de la formation d'extrême droite estime aussi que son unité est gravement menacée par la crise ouverte qui l'oppose à sa fille Marine, qui a conduit lundi la direction du FN à le suspendre le temps de convoquer une assemblée générale pour supprimer son titre de président honoraire.
Jean-Marie Le Pen publie vendredi sur son site internet ce qu'il présente comme une déclaration faite lundi devant le bureau politique de la formation, juste avant la réunion du bureau exécutif qui l'a sanctionné pour une série de déclarations polémiques.
"Ne nous faisons pas d'illusions sur la force réelle du mouvement", a-t-il dit. "Le fait, réel, d'arriver en première position lors des (élections) européennes et des départementales ne doit pas nous aveugler. Le chiffre des voix obtenues doit être la vraie référence", indique-t-il dans une allusion au fort taux d'abstention de ces scrutins.
"Ce sont les événements qui nous rallient l'opinion de nos concitoyens, l'aggravation inéluctable de la situation (à laquelle, il faudra remédier après) peut nous conduire au pouvoir et à ses terribles responsabilités, mais nous n'en sommes pas aux portes, loin de là", dit-il encore.
Pour Jean-Marie Le Pen, "l'unité du mouvement est une des conditions sine qua non, or, elle est gravement menacée par la crise actuelle."
L'ME DU FN BLESSÉE
Cette crise a été provoquée par de nouvelles sorties polémiques du fondateur du FN qui mettent à mal la stratégie de "dédiabolisation" du parti impulsée par Marine Le Pen depuis qu'elle a succédé à son père aux commandes du FN.
Une interview à l'hebdomadaire d'extrême droite Rivarol où il a réitéré ses propos sur les chambres à gaz nazies, "détail" selon lui de l'histoire de la Seconde guerre mondiale, et défendu la mémoire du maréchal Pétain a mis le feu aux poudres.
Jean-Marie Le Pen, qui a refusé de comparaître devant le bureau exécutif, estime que, dans cette affaire, "c'est l'âme du FN qui a été blessée."
"On craint d'avoir mauvaise réputation républicaine. Sommes-nous devenus le premier parti antifasciste et antiraciste de France ?", s'est-il demandé, pour ajouter : "Laissons ces tristes hochets à nos ennemis et soyons fiers d'être le parti des patriotes français et des parias du drapeau tricolore."
Quant à sa convocation devant le bureau exécutif réuni en commission disciplinaire, il a déclaré qu'elle était "indélicate, injustifiée, immorale et (...) scandaleuse."
Il a encore assuré qu'il ne s'était pas exprimé au nom du Front national dans ses interviews controversées, "laissant ce soin aux collaborateurs socialo-gaullistes de la présidente" Marine Le Pen.
(Yann Le Guernigou, édité par Jean-Philippe Lefief)