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Sidérurgie: le gouvernement britannique accusé de trahison pro-chinoise

Publié le 01/04/2016 15:14
Mis à jour le 01/04/2016 16:45
Photo prise le 17 octobre 2015 de l'usine Tata de Scunthorpe (nord-est de l'Angleterre) (Photo LINDSEY PARNABY. AFP)

Photo prise le 17 octobre 2015 de l'usine Tata de Scunthorpe (nord-est de l'Angleterre) (Photo LINDSEY PARNABY. AFP)

L’annonce d’un retrait de Tata Steel du Royaume-Uni tournait à la crise politique vendredi, le gouvernement conservateur se voyant accusé d'avoir sacrifié la sidérurgie britannique sur l'autel de ses amitiés chinoises.

Deux jours après la décision implicite du géant indien de mettre en vente ses activités britanniques, l'inquiétude pour les 15.000 salariés concernés grandissait dans le pays, tout comme l'amertume, voire la colère, à l'égard d'un pouvoir accusé de double jeu.

Tata Steel a mis en avant la concurrence effrénée que représente l'importation d'acier chinois peu cher pour expliquer le manque de rentabilité de l'activité au Royaume-Uni, un sujet sur lequel Londres assure s'être battu, y compris dans les cénacles bruxellois chargés d'établir les droits de douane à l'entrée de l'Union européenne (UE).

Mais les affirmations du gouvernement étaient mises en cause vendredi, notamment par le lobby européen de l'Acier, Eurofer, selon qui les représentants britanniques se sont à l'inverse opposés à de nouvelles mesures visant à défendre l'acier européen.

"Pourquoi ? Ils font valoir la protection des utilisateurs d'acier, par exemple ils disent que l'industrie automobile, la construction, la machinerie, bénéficient d'un acier à bas prix. C'est le cas, mais en même temps, cela sacrifie notre industrie au profit d'un autre secteur", a déploré le porte-parole d'Eurofer, Charles de Lusignan.

Eurofer met en exergue le fait que les États-Unis imposent des droits de douane provisoires de plus de 265% sur certaines catégories d'acier chinois, versé en surabondance sur les marchés mondiaux, contre 13 à 16% pour l'UE sur les mêmes produits.

Or, a affirmé M. de Lusignan à l'AFP, le Royaume-Uni a cherché ces derniers mois à se ménager les bonnes grâces de la Chine, déroulant le tapis rouge au président Xi Jinping venu en visite d’État en octobre, courtisé entre autres pour les capacités d'investissement de l'Empire du milieu.

Les Britanniques "pensent que s'ils bloquent le changement et la modernisation des instruments de défense du commerce, cela leur donnera les faveurs de la Chine", d'après Eurofer.

Ces accusations, reprises par les médias au Royaume-Uni, ont d'autant plus d'écho que la sidérurgie garde une place à part dans les coeurs britanniques, depuis la révolution industrielle qui assit la prospérité du pays et dont elle fut un des fers de lance.

- "Regarder les travailleurs dans les yeux" -

Le Premier ministre David Cameron et son ministre des Finances, George Osborne, subissent en conséquence un feu nourri de critiques, à commencer par celles de leur ex-allié Nick Clegg, centriste libéral-démocrate et Premier ministre adjoint de M. Cameron de 2010 à 2015.

"George Osborne a mis sa relation spéciale avec la Chine au-dessus des intérêts du Royaume-Uni", a-t-il accusé, reprochant au gouvernement d'avoir "manqué de nombreuses occasions d'aider l'industrie sidérurgique, par exemple en prenant des mesures pour empêcher l'acier chinois à prix cassé d'inonder le marché britannique".

En déplacement à Manchester (nord de l'Angleterre) pour promouvoir la nette augmentation du salaire minimum entrée en vigueur vendredi, M. Osborne a dû se défendre de toute inaction et a promis que son gouvernement faisait "tout ce qui était réalisable et possible" pour protéger l'industrie sidérurgique.

Son collègue Sajid Javid, le ministre des Entreprises, devait pour sa part se rendre à Port Talbot, le coeur gallois de la sidérurgie britannique, où Tata emploie pas moins de 4.000 personnes, écourtant un lointain voyage en Australie pour revenir au chevet d'un secteur malade.

Il devait tenter de limiter les dégâts en assurant que sans l'intervention du gouvernement auprès de Tata Steel, le géant indien aurait fermé l'aciérie sans délai plutôt que de la mettre en vente.

Appelant M. Javid à "regarder les travailleurs dans les yeux et à promettre du concret", le syndicat Unite a espéré que cette visite ne se limiterait pas à "une opération de relations publiques".

"Les sidérurgistes de Port Talbot et de Tata Steel dans son ensemble veulent savoir exactement ce que Sajid Javid prévoit de faire pour sauvegarder leur industrie, leur gagne-pain et leur communauté", a prévenu Andy Richards, secrétaire du syndicat au Pays de Galles.

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