LILLE (Reuters) - Le tribunal administratif de Lille a débouté vendredi la préfecture du Pas-de-Calais, qui demandait l’autorisation de fermer 72 lieux de commerce et de restauration pour migrants dans la "jungle" de Calais.
Le juge a estimé que les préoccupations exprimées par le préfet étaient "tout à fait compréhensibles" mais que "les conditions d'urgence et d'utilité requises ne sont pas remplies pour faire droit à sa demande".
Les commerces et lieux de restauration "constituent des lieux de rencontre apaisés" et "ont une autre utilité que purement alimentaire", ajoute-t-il dans un communiqué.
"Nous avons été entendus mais la préfecture a déjà prononcé la fermeture de plusieurs commerces qui sont fermés, nous allons maintenant demander que les coiffeurs et épiceries puissent fonctionner à nouveau rapidement", s'est réjoui François Guennoc, vice-président de l’association "l’Auberge des migrants".
"Nous demandons un dialogue avec la préfecture pour obtenir de meilleures conditions sanitaires et de sécurité", a-t-il ajouté.
Après la décision du tribunal, la préfecture a déclaré dans un communiqué que "les opérations de contrôle administratif et judiciaire des lieux de vente à la sauvette (...) (avaient) vocation à se poursuivre".
Elle a ajouté qu'elle continuerait de lutter contre les phénomènes illégaux, "ces commerces ne respectant aucune des règles sanitaires en vigueur, présentant des risques importants en matière de sécurité incendie et générant des troubles à l’ordre public en entretenant une économie souterraine".
Le sous-préfet, Vincent Berton, a précisé que la préfecture allait se pourvoir en cassation devant le Conseil d'Etat.
Depuis début juillet, la préfecture a mené des opérations de contrôles sur les commerces dans la "jungle" dans le but de les limiter puis a demandé à la justice l’autorisation de les détruire.
Elle avait estimé à l'audience que ces lieux de commerce étaient des troubles à l'ordre public.
Le collectif d’associations humanitaires présentes sur le site avait expliqué qu'à l'inverse l'existence de ces lieux de restauration diminuait les interminables files d'attente au moment des distributions de repas, qui créaient des moments de tensions entre les différentes communautés de migrants.
"L’Auberge des migrants" a affirmé vendredi avoir recensé 9.106 personnes dans le camp, dont 1.500 au Centre d'accueil provisoire et 250 au centre Jules Ferry.
D’après l’association, il y aurait 865 mineurs dans la "jungle", en grande majorité non accompagnés d’adultes. "On se doutait que le nombre avait nettement augmenté mais là c’est plus de 2.000 en un mois", a dit François Guennoc.
Les autorités, qui affirmaient jusqu'à présent que les migrants étaient 4.500, vont procéder à un nouveau comptage, a dit la préfecture.
(Pierre Savary, édité par Gérard Bon et Jean-Baptiste Vey)