par Chuck Mikolajczak
NEW YORK (Reuters) - La hausse du dollar et des rendements obligataires risque de gâcher la fête à Wall Street, où les principaux indicateurs de tendance enchaînent les records dans l'anticipation de mesures de relance du président élu Donald Trump.
L'indice Standard & Poor's 500, référence des gérants américains, a gagné plus de 8% depuis l'élection du 8 novembre en prévision d'une politique inflationniste de la future administration. Les valeurs financières ont mené la hausse avec un gain de plus de 17% pour leur indice sectoriel.
"Potentiellement on jette de l'huile sur le feu, car il ne s'est encore rien passé et tout le monde fait comme si c'était déjà acté", note Richard Bernstein, fondateur du cabinet de conseil Richard Bernstein Advisors à New York.
Ces anticipations et la politique plus velléitaire de la Réserve fédérale en matière de taux d'intérêt ont aussi eu pour effet de renforcer le dollar et de pousser à la hausse les rendements des obligations souveraines.
La Fed a relevé ses taux directeurs mercredi pour la première fois depuis un an et laissé prévoir trois nouveaux tours de vis en 2017, plus que ce qu'attendait le marché.
Dans la foulée, le billet vert a atteint un plus haut de 14 ans face à un panier de devises et contre l'euro, se rapprochant de la parité avec la monnaie unique, tandis que les rendements des Treasuries ont aligné une sixième semaine consécutive de gains avec un taux d'environ 2,60% vendredi soir pour le papier à 10 ans, référence du marché.
Le dollar fort, avertissent les analystes, risque d'amputer les bénéfices des multinationales américaines alors que les profits des sociétés du S&P-500 ont tout juste renoué avec la croissance au troisième trimestre.
Et si la hausse des taux longs bénéficie aux banques en rendant plus lucrative leur activité de prêts, elle augmente aussi les coûts financiers des entreprises et atténue l'avantage comparatif de valorisation qu'avaient les actions sur les obligations depuis la crise financière.
"L'idée est que l'économie est suffisamment forte pour supporter une hausse des taux et que les résultats (des entreprises) iront en s'améliorant ; c'est pour cela que les actions continuent de monter", dit Paul Nolte, gérant de portefeuille chez Kingsview Asset Management à Chicago.
"Cela étant dit, la vigueur du dollar et la hausse des taux d'intérêt finiront par affecter les résultats. Le tout est de savoir quand et comment."
Le ratio cours/bénéfice du S&P-500 est actuellement à 20,8, bien au-dessus de sa moyenne historique de 16,6, selon les données de Thomson Reuters.
Parallèlement, le rendement du S&P-500 en matière de dividende s'élève à 2,07%, dépassé nettement par le taux de 2,60% atteint par les obligations à 10 ans.
"C'est un écart important en termes de valorisation qui va pousser les gens à rester investis en obligations", relève Greg Peters, gérant chez PGIM Fixed Income à Newark (New Jersey).
Ces deux éléments négatifs pour les marchés actions devraient toutefois être tempérés par l'amélioration de l'économie, pourvu qu'elle se confirme et se prolonge, conclut Ryan Detrick, stratège chez LPL Financial à Charlotte, en Caroline du Nord.
"Les taux montent pour une bonne raison qui est que la croissance est là, et cela est positif pour le marché actions", dit-il.
(avec les contributions de Caroline Valtekevitch et de Trevor Hunnicutt; Véronique Tison pour le service français)