La France devrait échapper de justesse cette année à la récession, mais la croissance restera minimale et légèrement inférieure aux objectifs du gouvernement, tandis que le chômage continuera d'augmenter, selon les prévisions de l'Insee publiées mardi.
L'économie française devrait ralentir fortement en 2012, avec une croissance limitée à 0,4% par rapport à l'année précédente, après 1,7% en 2011, affirme l'Institut national de la statistique et des études économiques dans sa note de conjoncture.
C'est un peu moins que le 0,5% escompté par le gouvernement pour tenir ses engagements de réduction du déficit public. Il aura l'occasion d'ajuster son objectif lorsqu'il présentera, le 4 juillet, son projet de budget rectifié.
Cette prévision est aussi plus pessimiste que celles de l'OCDE (+0,6%) et du FMI (+0,5). Et elle place la France derrière l'Allemagne, qui devrait connaître selon l'Insee une croissance de 1% en 2012, mais au-dessus de la moyenne de la zone euro, en pleine récession (-0,3%).
"Alors que l'Espagne et l'Italie devraient rester en récession jusqu'à la fin de l'année (...) l'Allemagne et la France ne connaîtraient pas d'épisode récessif", a déclaré à la presse le directeur des études et des synthèses économiques de l'Insee, Eric Dubois.
Dans le détail, le produit intérieur brut (PIB) de la France devrait faire moins bien que prévu précédemment au deuxième trimestre, en stagnant comme au premier. Il repartirait ensuite très mollement aux troisième (+0,1%) et quatrième (+0,2%) trimestres.
L'Insee ne prévoit donc pas de recul du PIB, contrairement à la Banque de France qui table sur une contraction de 0,1% au deuxième trimestre.
Plus forte baisse du pouvoir d'achat depuis 1984
La détérioration de la conjoncture s'explique en grande partie parles "tensions" financières qui "ont repris" en zone euro depuis avril. La crise de la dette reste d'ailleurs un des principaux aléas pesant sur ce scénario.
"La France souffrira de la contraction de la demande intérieure de ses partenaires de la zone euro, ce qui handicape les exportations, et de son propre effort de consolidation des finances publiques", a expliqué Eric Dubois.
En contrepartie, a-t-il noté, le pays bénéficiera de la dépréciation de l'euro et, dans la tourmente de la crise, de son statut de valeur refuge qui permet à ses taux d'intérêt de se maintenir à des niveaux historiquement bas.
Dans ce contexte de croissance atone, "le taux de chômage continuerait d'augmenter, même si la hausse sur l'année des différents contrats aidés contribuerait à freiner sa progression", a affirmé Jean-François Ouvrard, responsable de la synthèse conjoncturelle.
Il passerait de 9,3% de la population active en France métropolitaine fin 2011 à 9,9% au dernier trimestre 2012 (10,3% en incluant les départements d'outre-mer).
Coup dur pour les ménages: le pouvoir d'achat individuel des Français devrait baisser de 1,2% en 2012, enregistrant son plus fort recul depuis 1984, affecté notamment par le ralentissement des revenus d'activité et la hausse des impôts.
Le pouvoir d'achat par unité de consommation, la mesure la plus proche du ressenti des ménages, reculerait ainsi pour la deuxième année consécutive (-0,1% en 2011). Le pouvoir d'achat plus global diminuerait aussi, de 0,6%, alors qu'il a augmenté de 0,5% l'an dernier.
L'ancienne majorité s'était targuée, durant la campagne électorale, d'avoir maintenu une progression constante du pouvoir d'achat durant le quinquennat.
Eric Dubois a précisé que l'Insee avait tenu compte, pour calculer son évolution, de "deux types de mesures" pesant sur les ménages: celles qui avaient été inscrites dans le budget 2012 par le gouvernement sortant, "de l'ordre de 11 milliards d'euros", et celles "qui ont été annoncées depuis, de l'ordre de 2,5 milliards".
Du coup, la consommation des ménages progresserait très faiblement sur l'ensemble de l'année, de 0,2%, comme en 2011.
Globalement, la demande intérieure devrait nettement ralentir cette année et l'activité de devrait plus bénéficier, comme l'an dernier, d'un mouvement de reconstitution des stocks écoulés par les entreprises.